NOUGE Paul

Biographie

Paul Nougé, né à Bruxelles le 13 février 1895 et mort à Bruxelles le 6 novembre 1967, est un poète belge, instigateur et théoricien du surréalisme en Belgique, le « Breton belge », a-t-on dit.

Né de père français d’origine charentaise et de mère belge, Paul Nougé suit l’enseignement du lycée français de Bruxelles puis s’engage en 1909 dans des études de chimie biologique et travaille de 1919 à 1953 comme biochimiste dans un laboratoire médical. Il est en 1919 membre fondateur du premier Parti communiste belge. En novembre 1924 il crée la revue “Correspondance” qui publie 26 tracts jusqu’en septembre 1925, avec la collaboration de Camille Goemans et de Marcel Lecomte, exclu en juillet 1925. Nougé rencontre la même année les surréalistes français, Louis Aragon, André Breton et Paul Éluard, signe ainsi le tract “La Révolution d’abord et toujours”, et fait en 1926 la connaissance de Louis Scutenaire. Nougé et Goemans, René Magritte et E. L. T. Mesens se rapprochant, septembre 1926 marque l’ébauche de la constitution du groupe surréaliste de Bruxelles à travers la confection de tracts communs, auxquels André Souris s’associe.

Nougé compose en 1927 des détournements des exemples du manuel de grammaire de Clarisse Juranville, illustrés de cinq dessins de Magritte, et préface l’exposition de Magritte à la galerie “Le Centaure” de Bruxelles. En 1928 il fonde la revue “Distances”, rédige les textes poétiques du catalogue d’un marchand de fourrures, illustré par Magritte (“Le catalogue Samuel”, réédité par Didier Devillez éditeur, Bruxelles, 1996) et la préface d’une exposition de Magritte à la galerie “L’époque” (signée par les “complices” Goemans, Mesens, Lecomte, Scutenaire et Souris) puis prononce en janvier 1929 à Charleroi une conférence sur la musique qui accompagne un concert dirigé par André Souris et une exposition de Magritte (“La conférence de Charleroi”, publiée en 1946). Entre décembre 1929 et février 1930 Nougé réalise dix-neuf photographies qui seront publiées en 1968 sous le titre “Subversion des images”. En 1931 il préface l’exposition qui suit le retour de Magritte à Bruxelles. Des extraits des “Images défendues” sont publiés en 1933 dans le cinquième numéro du “Surréalisme au service de la Révolution”. En 1934 Nougé cosigne “L’action immédiate” dans “Documents 34” dont Mesens est le rédacteur, en 1935 “Le Couteau dans la plaie” et publie en 1936, dans “Les Beaux-Arts” de Bruxelles, René Magritte ou la révélation objective. Il est alors avec Mesens à l’origine de l’exclusion du groupe d’André Souris.

Mobilisé en 1939 à Mérignac puis à Biarritz, lors de la guerre, comme infirmier militaire, Nougé préface en 1941 une exposition, rapidement fermée par les Occupants, de photographies de Raoul Ubac à Bruxelles (L’expérience souveraine) et publie en 1943 le texte complet de René Magritte ou Les images défendues. Sous le pseudonyme de Paul Lecharantais il préface en janvier 1944 une nouvelle exposition de Magritte critiquée par les collaborateurs du nazisme. En 1945 Nougé participe à l’exposition “Surréalisme” organisée par la galerie des éditions La Boétie de Bruxelles puis, en 1946, fait paraître La Conférence de Charleroi et, sous le titre Élémentaires une préface pour l’exposition de Magritte (“le surréalisme en plein soleil”) à la galerie Dietrich.

Paul Nougé meurt à bruxelles le 6 novembre 1967.

Bibliographie

  • Histoire de ne pas rire, Les Lèvres nues, Bruxelles, 1956; L’Âge d’homme, Lausanne, 1980.
  • L’Expérience continue, Les Lèvres nues, Bruxelles, 1966; L’Âge d’homme, Lausanne, 1981.
  • Journal (1941-1950), Les Lèvres nues, Bruxelles, 1968; Didier Devillez Editeur, Bruxelles, 1995.
  • A partir de 1973 de nombreux textes inédits de Nougé sont publiés par Tom Gutt dans “Le Vocatif”.
  • Des mots à la rumeur publique, Lausanne, L’Âge d’homme, 1983.
  • Erotiques, Didier Devillez éditeur, Bruxelles, 1994.
  • Journal 1941-1950, Didier Devillez éditeur, Bruxelles, 1995.
  • Quelques lettres, Didier Devillez éditeur, Bruxelles, 1995.
  • Paul Nougé, René Magritte, Le catalogue Samuel, préface de Tom Gutt, Bruxelles, Didier Devillez, 1996.
  • René Magritte (in extenso), Didier Devillez éditeur, Bruxelles, 1997.
  • Fragments, Didier Devillez éditeur, Bruxelles, 1997.
  • La Musique est dangereuse, écrits autour de la musique, rassemblés et présentés par Robert Wangermée, Didier Devillez éditeur, Bruxelles, 2001.

 

Ouvrages sur Paul Nougé :

  • Michel, Geneviève. Paul Nougé : La poésie au coeur de la révolution. Bruxelles : P. Lang, 2011. (Documents pour l’Histoire des Francophonies-Europe ; 19). ISBN 978-90-5201-618-4.

Textes

Le perroquet de ma voisine

Le perroquet de ma voisine
mange une branche de persil
et la phono de mon voisin
vient d’écraser la queue du chien;

le malheur pleut sur notre ville.

Commentaires

Le public, même lettré, n’a pris connaissance de l’oeuvre de Paul Nougé que quelques mois avant sa mort, de sorte que ce surréaliste de la première heure est devenu une sorte de père tranquille et rigoureux du mouvement, en Belgique.  Moins passionné et tragique qu’Achille Chavée, qui demeure l’écorché vif du groupe, il est exemplaire _ bien que trop systématique, par endroits _ du surréalisme belge en poésie, tel qu’il convient de le définir désormais à travers lui: moins féru qu’un France du rêve libérateur, moins sentimental, moins joueur, mais plus sérieusement exploité et toujours conscient du sabotage dadaïste qu’il porte en soi; de surcroît, Paul Nougé est prodigue en cette spécialité du coin: le proverbe surréaliste, sans queue ni tête, absurde, aberrant et même terrorisant.  Ce partisan de la folie verbale en manquait un peu.  C’est un Saint-Juste massif.

Editions Traces Bruxelles 1987 “La poésie francophone de Belgique”

Sur Nougé  [modifier]

 : Source utilisée pour la rédaction de l’article

André Souris, Paul Nougé et ses complices dans “Entretiens sur le surréalisme”, sous la direction de Ferdinand Alquié, Mouton, Paris-La Haye, 1968.

Christian Bussy, Anthologie du surréalisme en Belgique, Paris, Gallimard,1972.

Marcel Mariën, L’activité surréaliste en Belgique (1924-1950), Bruxelles, Lebeer-Hossmann, 1979.

René Magritte et le surréalisme en Belgique, Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique, Bruxelles, 1982.

Le mouvement surréaliste à Bruxelles et en Wallonie (1924-1947), Paris, Centre Culturel Wallonie Bruxelles, 1988.

Olivier Smolders, Paul Nougé, Ecriture et caractère. A l’école de la ruse, Labor, Bruxelles, 1995.

Christine de Naeyer, Paul Nougé et la photographie, Bruxelles, Didier Devillez, 1995.

Irène, Scut, Magritte & C°, Bruxelles, Musée Royaux des Beaux-Arts de Belgique, 1996, 558 p.

Dominique Combe, Rhétorique de Paul Nougé, dans “Europe”, “Les surréalistes belges”, n° 912, Paris, avril 2005, p.51-62

Jean-Pierre Verheggen, Nougé au quotidien, dans “Europe”, “Les surréalistes belges”, n° 912, Paris, avril 2005, p.91-93

Xavier Canonne, Le surréalisme en Belgique, 1924-2000, Fonds Mercator, Bruxelles, 2006 (ISBN 90-6153-659-6); Actes Sud, Paris, 2007, 352 p (ISBN 9782742772094)