ELAN Jacques

Biographie

Né à Tertre, le 2 juillet 1905 ; décédé à Celles-Lez-Tournai, le 19 mars 1958.
Autodidacte, il ne vint à la poésie qu'après un long stage dans la littérature dialecticale.

Bibliographie

  • Les vents perdus, Unimuse, 1954.
  • Algues et bruyères, Unimuse, 1955.
  • L'Almanach du berger, Unimuse, 1957.
  • L'Archet brisé, Unimuse, 1958.

Textes

Tu ne sais point

Tu ne sais point, ma soeur, le songe des platanes,
Les horizons secrets des brumes en charpie,
La mousse et l'Edelweiss aux flanc des nostalgies,
Le phare éclaboussant les ombres océanes.

Ma soeur, tu ne sais point l'éclat des utopies,
La plainte de bouvreuil quand l'alpage se fane,
Le sang de mes soleils sur le sable profane,
Le jeu des colibris qu'une sirène épie.

Tu ne sais point, ma soeur, le nid des mes colombes,
La branche escarpolète où chante une mésange,
La voile qui se gonfle au souffle de mes anges.

Ma soeur, tu ne sais point le désaroi des tombes,
Lorsque les feux follets des nuits désausées
S'en viennent pour prier en mules de rosée.

Tu sais

Tu sais pourtant le sel des larmes refoulées,
Le rire et les ébats des ondines fluettes,
La paix et la ferveur des oraisons muettes,
l'encens et la résine à l'fheure des flambées.

Tu sais les pas amis crissant sur la cendrée,
Tu sais l'enfant qui rit dans sa blanche couchette,
Lorsqu'un ange a posé, au creux de ses fossettes,
Le matinal baisé cueilli dans la rosée.

Tu sais l'angoisse aussi des longues agonies,
Tu sais la tombe ouverte et l'absoute chagrine,
Tu sais tous les obits des heures assassines.

Ma soeur tu sais cela que le poète ignore :
L'écho si lourd des cris de tant de zizanies
Et les fllambeaux sanglants aux poings nus de l'aurore.

extraits de Algues et Bruyères

Commentaires

"... Quelle existence fut plus cruellement tronquée que la sienne ! A peine connaissait-il enfin, avec vingt ans de retard, la paix du coeur et l'épanouissement des dons, qu'il devait abandonner sa compagne, sa plume, ses amis, sa pauvre vie et se rendre en pleine lucidité, à l'appel de la poussière et du silence. Cependant, le peu qu'il reste de lui, en un mot " unimuse " , un recueil de soixante-six poèmes : L'Archet brisé, suffisent, pensons-nous, à le sauver de l'oubli "

Robert-Lucien Geeraert, La Revue Nationale, mars 1964, p. 78