HENNART Marcel

Biographie

Marcel Hennart, de nationalité belge, est né à Dieppe (France) le 3 août 1918. Il passa sa petite enfance à Amiens. Transplanté à Bruxelles quelques années plus tard, il y passa une jeunesse solitaire, timide, proche de la Nature (forêt et jardin). Durant toute sa vie professionnelle, il exerça le métier de bibliothécaire au Ministère de l’Éducation nationale. La biographie de Marcel Hennart est celle d’une vie tranquille. Un grand amour constant de la poésie la traverse. Cet amour constant de la poésie l’amena à s’intéresser à la poésie d’autrui, à écrire bon nombre de chroniques, de critiques de livres, ainsi qu’à traduire des poètes espagnols ou latino-américains, en passant par Atahualpa Yupanqui et son enthousiasme pour les peuples indiens. Marcel Hennart est décédé à Bruxelles le 13 novembre 2005.   Extrait de Dossiers L, Eric Brogniet.  

Bibliographie

 

  •  Le chant du double, Jarnac, La Tour de Feu, [s.d.].
  • Les étangs morts, Le Nénuphar, 1948.
  • Mais je vous dis que je vis, La Tour de Feu.
  • Les chants du double, La Tour de Feu.
  •  Un peu de terre aux lèvres, Paris, Points et Contrepoints, 1951.
  •  La terre aux yeux de ciel, Basse-Yutz, Le Courrier de poésie, 1952. Illustration de Luc Devot.
  •  Miroir multiple, Malines, C.E.L.F., 1955. Prix InterFrance 1955.
  •  Le silence d’un nom, Malines, C.E.L.F., 1960.
  •  La voix de l’herbe, Paris, André Silvaire, 1961.
  •  Dimensions de l’eau, Rodez, Jean Subervie, 1965. Prix Ilarie Voronca 1964.
  •  Pierre de la nuit, Bruxelles, P.A.F., 1967. Prix P.A.F. 1965. Préface de Robert Sabatier.
  •  Mer intérieure, Paris, Chambelland, 1970.
  •  Clartés minérales, Poèmes d’Espagne, Paris, Chambelland, 1974.
  •  Abeilles éblouies. Poèmes ardennais, Limoges (Mortemart), Rougerie, 1975. Prix Louis Guillaume 1973.
  •  Nouveaux poèmes d’Espagne, Bruxelles, H. Fagne, 1976.
  •  Les marées de l’aube, Ma Bretagne, Limoges (Mortemart), Rougerie, 1978. Illustrations d’Aubin Pasque.
  •  Les enchantements de la Manche, Limoges (Mortemart), Rougerie, 1980.
  •  Je pluriel et singulier, Limoges (Mortemart), Rougerie, 1983. Prix Claude Sernet 1984.
  •  Pensées de sable, Limoges (Mortemart), Rougerie, 1985.
  •  Mémoire de la lumière, Limoges (Mortemart), Rougerie, 1986.
  •  La porte de verre, Limoges (Mortemart), Rougerie, 1989.
  •  Le temps éteint = Tiempo apagado, Limoges (Mortemart), Rougerie, 1993. Version bilingue français-espagnol, avec trad. de Renata Duran.
  •  De tout un rien, Neuilly-le-Bisson, Gravos Press, 1993. Coll. , Le Bibelot; 36. Dessins à la plume de Louis Collet.
  •  L’aventure d’un souffle, Limoges (Mortemart), Rougerie, 1996.
  •  Ange, salut, Namur, in Revue Sources, numéro 18, février 1997.
  •  Les trois diamants de l’impossible couronne, inédit, en préparation.
  • A Contre mort, Mortemart : Rougerie, 2005.

Nombreuses traductions de recueils de poèmes, en particulier de l’espagnol.

Prix littéraires:

  • Prix Interfrance pour Miroir multiple, 1955.
  • Prix Ilarie Voronca des Journées de Rodez pour Dimensions de l'eau, 1954.
  • Prix Van Lerberghe de la Maison de la Poésie à Pais, pour l'ensemble de son oeuvre, 1967.
  • Prix Guillaume du Poème en prose pour Abeilles éblouies, 1973.
  • Prix Claude Sernet des Journées de Rodez pour Je pluriel et singulier, 1984.
A consulter sur l'auteur:   L'Arche, n°22, Bruxelles, 1974. Jean-Luc Wauthier, Douze miroirs pour entrer en poésie, Marcinelle: Institut européen interuniversitaire de l'action sociale, 1980. Revue Vérités, Hors série, Amay, Maison de la poésie, 1981. Marcel Hennart, par Raymond Deschamps, in Anne-Marie Trekker et Jean-Pierre Vander Straeten, Cent auteurs, Bruxelles, Éditions de la Francité, 1982. Dossier Marcel Hennart, Bruxelles, La fleur en papier doré, 1983. Jacques Demaude, Portrait d'auteur: Marcel Hennart, In Lecture, nov.-déc. 1984, n°22. Liliane Wouters, Alain Bosquet, La poésie francophone de Belgique: 1903-1926. Bruxelles, Académie royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique, 1993. Tome 3.

 

Textes

Pour tant de jours où j’errais sous les marronniers        de la ville, Pour tant de jours grignotés par les besognes de        serf, Sans un mot, sans un amour qui transfigure ma        peine, Pour tant d’inutiles regards et ce jeu des refus où mon cœur se déchire, je viens vers toi, ô ma bonne eau toute calme, ô ma bonne eau douce et lisse ainsi qu’une lame, ô ma bonne eau prodigue aussi de mort et brillante ainsi qu’un regard et plus profonde d’être pareille au vide des cieux.                                         ***     Etre la feuille où s’attardent les doigts du soleil, être la mousse où s’attardent les doigts de la pluie et ne pas prendre pour soi la blanche lumière, et ne pas prendre pour soi la fraîcheur d’une eau !   Mon Dieu, donne-moi d’être comme la plante, d’être        l’absent, d’aimer le monde en sa beauté non touchée : que mon bonheur soit un rayon que ne saisissent        mes mains !   Je veux être les yeux, être l’amour, caresser les fougères                        plus amicales qu’un corps de femme et me sentir mourir                        comme un brin d’herbe fanée parmi les feuilles mortes du bois.                                         ***     Fais le silence, ô corps, cilice du seul dieu. Deviens pareil, ô corps, à la torche qui brûle. Que la flamme t’habite, et te ronge, et t’annule ! Qu’elle plonge en ta chair ses racines de feu !   Deviens pareil au cri qui se perd dans les cieux, Nuage ou bien fumée aux mille tentacules ! Embrasse l’infini de la nuit incrédule, Et que naisse l’Amour, océan, de tes yeux !   Fais le silence, ô corps, vieil abîme insondable Où se perdent les pas de notre âme impalpable : Où se perdent les chœurs des archanges déçus.   Que le sang coule, comme une douce prière ! Que les yeux ostensoir, soient le chant des vertus De l’inutile église où lamente la Terre !                                    Les Etangs Morts       B 117   Longs quais de rêves morts mon royaume interdit Qu’un serpent de fumée arrache à mon regard, Cimetière des trains aux fantômes maudits Glissant comme des pleurs aux joues de mon        brouillard.   Rails de clarté filant sous les maigres buissons Et vieux wagons perclus de rouille aux ventres creux, Gazomètres du soir tours des vaines chansons, Guérite aux aiguilleurs nid de béton aux cieux.   Ainsi ma force et mon seul bien en cet enfer, scories de chants lancées un jour au front de Dieu, Dans la plainte des roues souvenir de feu clair Au rythme monotone des fourgons à bœufs.                                   Les aubes blessées       A ma mère.   Où vais-je ainsi, blotti dans ma fatigue comme un manteau de brume si froid à mes épaules ? A quelle frontière du monde, soudain si près de toi, évoqué-je ta voix, mouette enfuie vers de tièdes étangs bordés de saules ? Serait-ce que mon souffle allégé s’habitue à l’air subtil de la planète ? Serais-je comme une proue heurtant de nuit les rochers d’une rade ignorée, pour que ton sourire s’éveille sur ta lèvre effacée et que mes pas frôlent ainsi, tout au fond du sommeil, les languides iris de ta rive glacée ?                                         ***

Commentaires

   « Tour à tour cruel et tendre, sensuel et tourmenté, si proche de la nature qu’il en ressent en lui-même les mouvements les plus profonds des saisons, il traduit, dans une prose nette, dont le rythme est très éloigné de celui du vers mais existe en soi et porte le chant très haut, des impressions ténues, finement nuancées, des sentiments fortement pensés et , plus allusif que descriptif, le poète nous émeut en nous communiquant pudiquement une confidence à peine chuchotée à travers les plantes, les oiseaux, les paysages, et ses poèmes construits savamment, ont la rigueur et le trait incisif de l’eau-forte sans pour autant qu’une aura de mystère n’enveloppe de prolongements plus lointains la précision de ses tableaux. »                                                            Jean Pourtal de Ladevèze, Mercure de France        Ces poèmes en prose ne traitent que d’objets palpables, et des plus humbles : brin d’herbe, caillou, grain de sable, goutte de rosée. Mais le poète voit au-delà des choses et découvre que le plus intime caillou est « riche d’un monde ». Ce panthéisme simple et vibrant s’exprime à mots pesés ; ce refus de la contrainte du vers n’est que le choix d’une autre rigueur, sobre, mais riche dans sa concision comme une peinture chinoise.                                                              Les Lettres, Paris        Le titre de votre livre dit tout : vous entendez la voix de l’herbe et en vous lisant on apprend à écouter grand. En ce dimanche, vous m’avez donné le bonheur d’écouter loin, loin dans le monde de jadis.    Vous avez fait votre métier de poète…                                                             Extrait d’une lettre de Gaston Bachelard