FEYAERTS Pascal

Biographie

Pascal Feyaerts vit dans le Hainaut où il exerce le métier de bibliothécaire et a écrit plusieurs recueils de poésie (Acanthe et Coudrier) et un recueil de nouvelles (Chloé des Lys). Membre du Cercle de la Rotonde entre 2002 et 2007 et du Grenier Jane Tony par après, il passe, en 2009, dans l’anthologie La Nouvelle poésie française de Belgique. L’année 2010 le voit finaliser un spectacle musico-poétique avec la violoniste et compositrice Marielle Vancamp: Sur un nuage. « J’aime la cohérence et la justesse. Il y a chez moi une esthétique du questionnement et de l’ouverture et je vois souvent les choses par le prisme de l’oxymore. C’est en reliant entre elles des réalités très séparées ou surprenantes que l’on arrive à créer ce je ne sais quoi qui nous parle… Par des associations d’images ou d’idées, j’interroge l’existence dans sa globalité sans jamais tirer de conclusion et cette interrogation devient à elle seule un objet d’esthétique», déclare-t-il à Sylvie Godefroid dans un article paru début 2012. Pour lui, le poète se doit de créer de la transcendance. Pascal Feyaerts est membre de l’AEB et de l’AREAW et expose parfois ses dessins essentiellement au fusain.

Bibliographie

Collaboration régulière aux revues littéraires
  • Le Spantole
  • Traversées
  • La pensée wallonne
  • Les Élytres du Hanneton
  • Bleu d’Encre
  • Microbe
  • Le Journal des poètes
  • Recours au poème
Bibliographie
  • Claustrophobie ou les Rues de Pandémonium, postface de Jean Dumortier, poésies, Namur, éditions de l’Acanthe, 2001.
  • Résonance (anthologie du Cercle de la Rotonde), collectif, Bruxelles, éditions Mémor, 2006.
  • La nouvelle poésie française de Belgique, anthologie, Châtelineau, éditions Le Taillis Pré, 2009.
  • L’Amour en Lettre Capitale, préface de Louis Mathoux, illustrations de Véronique Laurent et Fred Van Campenhout, Mont-Saint-Guibert, éditions Le Coudrier, 2012.
  • Nouvelles en Quête d'(h)auteur, préface de Éric Dejaeger, nouvelles, Barry, éditions Chloé des Lys, 2012.
  • D’Ils et d’Ailes, préface de Éric Allard, illustrations de Derry Turla, poésies, Mont-Saint-Guibert, éditions Le Coudrier, 2014.
  • Le Miroir aux Allumettes, préface de Anne-Marie Derèse, illustrations de Frédérique Longrée, poésies, Mont-Saint-Guibert, éditions Le Coudrier, 2016.
  • QuintessenCiel, préface de Patrick Devaux, illustrations de Michel Van Den Bogaerde, Mont-Saint-Guibert, éditions Le Coudrier, 2018.
  • Aspérités, Préface Jean-Michel Aubevert, Illustrations de Catherine Berael, Mont-Saint-Guibert, éditions Le Coudrier, 2020.
  • Locataire, préface de Philippe Leuckx, Illustration de Derry Turla, Mont-Saint-Guibert, éditions Le Coudrier, 2022.
  • Patience de l’infime, préface de Anne-Marielle Wilwerth, Illustrations de l’auteur, Mont-Saint-Guibert, éditions Le Coudrier, 2023.

Textes

Je me suis assis à côté d’une fontaine. L’eau y était claire, jouissive et l’air était bleu qui se donnait à moi. J’existais, et, elle aussi. Bruyamment, elle m’avait invité à la détente. Seules sous l’air bleu et près de l’eau qui vibrait nos solitudes s’épousaient. Elle coulait claire et limpide aussi incompréhensible qu’un poème de Mallarmé, et cependant si éclatante dans son rythme justifié par la beauté. Trouvant mes abords fréquentables, elle me traversait pourtant sans me voir et je ne la comprenais pas : je n’en avais pas besoin. Je l’aimais parce qu’elle coulait là sous moi et remplissait mon ombre qui la buvait.

Extrait d’Aspérités

 

Rêver n’est jamais qu’un mot commençant et terminant par la même lettre et qui lu à l’envers s’avère totalement identique, l’accent circonflexe en moins. Palindrome me direz-vous. Exact vous répondrai-je tout en vous tendant le mot et en gardant le chapeau !

Extrait d’Aspérités

 

Rien ne déborde des trottoirs

Si ce n’est l’illusion de marcher

L’immobilité s’empare des carrefours

Et toutes les rues nous ressemblent

Nous nous déplaçons en nous-mêmes

Toujours plus intimes et plus lointains

Extrait d’Aspérités

 

C’est sous une équerre de lune qu’elle nous invite à partager son petit lotissement d’ombre.  On la dirait sortie d’une peinture d’Egon Schiele. Elle est heureuse cependant et ses traits, un rien quinconces, débordent d’inanité construite.  Fragile jusqu’à l’impossible et fuyante au possible pour qui veut la saisir, elle est mal dans ses baskets et pourtant droite dans ses gestes qui se posent toujours juste où il pleut.

Extrait D’Ils et d’Ailes

 

Faut-il rendre le champagne à ses bulles, à Hippocrate son serment et ses larmes à un chagrin qui en a bien besoin ?  Ou tant qu’à faire céder le ciel à ses anges et s’intéresser aux nuages pour jauger la distance qui sépare un havre de ma souffrance ?  La question est : Faut-il ?

Extrait de Claustrophobie ou les Rues de Pandémonium

 

Si l’on vous dit que demain est un autre calembour, ça vous fait rire…  Si l’on vous demande vos papiers, vous prétendez ne pas vous connaître…  Avez-vous également conscience qu’à l’heure où il vous faudrait dîner vous ne vous nourrissez que de poèmes ?  Qui êtes-vous et pourquoi vos miroirs ont-ils des mots si amers ?

Extrait de Claustrophobie ou les Rues de Pandémonium

 

Le vent habite d’autres naufrages, toujours.  S’alimente de carnages, pense-t-on, différents du nôtre. On le croit ailleurs et c’est ici qu’on le surprend : l’œil qui ne connaît pas encore sa poussière peut commencer à trembler !  Il sème la tempête dans nos têtes et laisse nos pensées pour ce qu’elles ont parfois de vide.  Le vent se joue de nous comme il le fait des nuages.

Extrait de Claustrophobie ou les Rues de Pandémonium

Commentaires

Pascal Feyaerts publie fin 2001, Claustrophobie ou les Rues de Pandémonium, un recueil de poèmes en prose. Il explique ainsi ce titre dans une note : «curieux titre il est vrai, qui attire autant qu’il rebute : d’aucuns craignant d’y découvrir un surplus de noirceur, oubliant bien vite que c’est à la lumière que l’ombre doit d’être dessinée et non l’inverse.  Ce recueil je l’ai voulu plus touchant que sombre, presque naïf comme le regard d’un enfant sur le point de naître et porté par ses promesses ; je m’y accouche au fil des pages et m’étonne presque de me voir venir en mots.  J’ausculte le monde, rêvant aussi de ciel, alors que le ciel n’est plus de nos jours qu’un petit bout de météorologie et possède ce curieux besoin d’accorder la quête du mystique à la rhétorique de l’esthète.  N’y a-t-il point de paradis sans idoles et à quoi bon s’atteler à ne construire que des ruines? ».  Un univers de chambres étroites dessinant, à force d’interstices, une ouverture, ou plutôt, selon un thème cher à l’auteur, un horizon. Il y use d’un style original, à la fois moqueur et lyrique, tantôt dans la retenue, tantôt dans l’épanchement, au bord du vertige et pourtant lucide… La recherche esthétique de Pascal Feyaerts est fervente, sans concession semble-t-il.  Avec l’idéal des jeunes âmes, il déclare : « ce n’est pas tant l’œuvre qui se doit d’être belle mais le comportement qui l’a instruite. Une sorte de synthèse entre l’idée, le mouvement et la vie de l’auteur ».

Marie-Clotilde Roose (Sur Claustrophobie ou les Rues de Pandémonium)

 

La fée Classique s’est-elle penchée sur le berceau de Pascal Feyaerts à sa naissance ? A la lecture de ces cinq nouvelles, on peut facilement le penser…  Le style de Pascal, recherché, travaillé, coloré, riche, parsemé, de tournures à l’ancienne, n’en est pour autant ni prétentieux ni maniéré. Il sent bon le passé comme un meuble centenaire peut éclairer un intérieur résolument contemporain… Pascal n’impose rien, il offre à celui qui le lit la possibilité de conclure par lui-même. Fameux cadeau, que de permettre au lecteur de rêver !

Éric Dejaeger (sur Nouvelles en quête d’(h)auteur)

 

Des « lèvres cousues au silence » à ce « ciel rajeuni depuis ton hiver », on mesure combien l’attachement à la personne disparue éveille à une poésie, simple, dense, à ce bel hommage, en dépit de l’absence, en dépit du chagrin, avec de belles fulgurances lyriques qui sont le blason de l’authenticité :

Sais-tu que

c’est l’oiseau qui a inventé le ciel ? (p.28)

Le poète qui « écrit pour ne pas désapprendre » sait qu’il use du poème pour s’épancher, pour ravir à la douleur sa part nocive, entêtante, pour en donner quelque chose de pur, comme l’enfant songe à offrir sa plus belle âme.

Le poète « creuse la page » pour la tombe qui s’ouvre.

Le poète nous dit que « la terre parle bien plus haut que ses racines », dans cette quintessence du titre qui élève le ciel à la mesure de l’amour maternel.

Philippe Leuckx (sur QuintessenCiel)