ELSKAMP Max

Biographie

(Anvers, 1862-1931)

Max Elskamp est un poète francophone né de père flamand et de mère wallonne, fondateur à Anvers du musée du Folklore. Il trouve sa voie lyrique dans les mélodies populaires, le folklore et les légendes du pays flamand. Ses poèmes retrouvent le rythme, les images et la concision des litanies, des complaintes et des chansons de toile qui disent le goût et le raffinement d'un auteur qui pratique un langue archaïsante. Il illustre bien souvent de ses propres gravures sur bois des recueils à tirage fort limité.

Bibliographie

  • Dominical. Bruxelles : P. Lacomblez, 1892.
  • Salutations dont d'angéliques. Bruxelles : P. Lacomblez, 1893.
  • En symbole vers l'apostolat. Bruxelles : P. Lacomblez, 1895.
  • Six chansons de pauvre homme pour célébrer la semaine de Flandres. Bruxelles : P. Lacomblez, 1895.
  • Enluminures. Paysages, heures, vies,  chansons, grotesques. Bruxelles : P. Lacomblez, 1898.
  • La louange de la vie. Paris : Société du mercure de France, 1898.
  • Les commentaires et l'idéographie du jeu de loto dans les Flandres. Anvers : A. De Tavernier, 1914.
  • La chanson de la rue Saint-Paul. Anvers : J-E Buschmann, 1922.
  • Chansons désabusées. Bruxelles : G van Oest et Cie, 1922.
  • Maya. Anvers : J-E Buschmann, 1923.
  • Sous les tentes de l'exode. Bruxelles : Les éditions R. Sand, 1923.
  • Les délectations moroses. Bruxelles : G van Oest et Cie, 1923.
  • Chansons d'armures. Anvers : J-E Buschmann, 1923.
  • Remembrances. Anvers : J-E Buschmann, 1924.
  • Aegri somnia. Bruxelles : Librairie nationale d'art et d'histoire, 1933.
  • Les fleurs vertes. Bruxelles : Nouvelle Société d'éditions, 1934.
  • Les joies blondes. Bruxelles : Nouvelle Société d'éditions, 1934.
  • Huit chansons reverdies dont quatre pleurent et quatre rient. Bruxelles : Editions du Cercle d'art, 1942.
  • Oeuvres complètes. Paris : Seghers, 1967.
  • Les rythmes de la vie : lecture d'enluminures. Bruxelles : J. Antoine, 1978.
  • Chansons et enluminures. Bruxelles : J. Antoine, 1980.

 

  • Max Elskamp. Essai, par Jean de Bosschère. Paris : Bibliothèque de l'Occident, 1914. 

Textes

En le refuge un peu perdu

En le refuge un peu perdu
De cette ville de la mer,
C'est vous ici mes jours vécus
Pendant les mois de cette guerre,

Jours d'exil à profils fermés,
Et, comme les peines subies,
Qu'on croit après plutôt rêvés,
Qu'ayant eu place dans la vie.

Or ils furent, car les voici,
Prenez-les comme je les donne,
De haine et tout d'amour aussi,
Suivant l'heure mauvaise ou bonne;

Puis saison passant dans les mois,
De soleil ou pluie, monotones,
Lors d'été, d'hivers ou d'automne,
Jours qui furent comme on les a,

Mais surtout tristes en leur somme,
Prenez-les comme les voilà:
Temps de guerre pour tous les hommes,
Dies irae, dies illa.

Commentaires

Max Elskamp est sans doute, avec Verhaeren et Michaux, le poète le plus incontestable qui ait vu le jour en Belgique.  Il demeur aussi le plus exaltant aujourd'hui, malgré les faiblesses et les répétitions, à la fin de sa vie.  Plus que tout autre, il a su faire des hantises de son temps une sorte de litanie universelle, qui le dépasse.  Au sein du symbolisme, qu'il soit belge ou français, il a l'insigne mérite de fuir le maniérisme, alors qu'il ne s'interdit pas une langue à lui, et rien qu'à lui, qui par instants se sait archaïque.  Ce qu'on peut reprocher à Henri de Régnier ou à Stéphane Mallarmé, à savoir trop de contorsions, on ne saurait que les accepter chez Elskamp car son inspiration n'est pas celle d'un intellectuel irrécupérable ni d'un poète de salon.

La poésie est celle d'un homme seul, qui dit sa foi et les nostalgies de celle-ci: cette simplicité _ qui n'empêche pas l'enluminure savante _ qui manque autour de lui, où fleurissent jusqu'à l'encombrement les théories, les expériences, les artifices.  Lui extorque au langage un parti pris qui très vite devient une nécessité.  Humble, il l'est sans ostentation: ni les croisades de Verhaeren, ni les silences théâtraux de Maeterlinck.  Il dit aussi sa ville, pleinement: les troubles de la chair, les voyages sur place, les petites gens qui cachent leurs vices et leurs souffrances, les inutiles voyages hors de soi et hord de l'Escaut.  Le drame personnel est exprimé avec pudeur, comme si le chant seul était capable de conjurer des atteintes de l'einterminable maladie.  Dirions-nous: une simplicité aussi chantante que tordue, et qui donne une sonorité à sa voix, à nulle autre comparable?

Editions Traces Bruxelles 1985 "La poésie francophone de Belgique"