Né à Bruxelles (Saint-Gilles) le 2 mai 1913, décédé en avril 2009.
Fernand Verhesen obtient sa licence en philosophie et lettres à l'Université libre de Bruxelles et le diplôme d'études françaises supérieures à Besançon. Il travaille à Madrid (1934-1935) et découvre les manuscrits de dix des autos sacramentales de Calderón (une étude partielle parait en 1953). Lecteur et chargé de cours de langue et littérature espagnoles à l'Université libre de Bruxelles (1938 à 1948), il traduit les Poésies lyriques de Lope de Vega (avec Edmond Vandercammen, 1951) et engage une considérable activité d'introducteur de la poésie espagnole et hispano-américaine contemporaine, au triple titre de traducteur, de présentateur et d'éditeur ; il s'explique sur sa pratique de la traduction poétique dans Les Machinations de l'ambiguïté, texte repris ainsi que des études sur Ramon Jiménez, Vallejo, Paz, Juarroz, Cerrato, Diaz-Casanueva et Guillén dans l'ensemble de ses Propositions (1994).
Outre les anthologies qu'il a traduites (Garcia-Prada, Paz), ou confectionnées (Poètes d'Espagne et d'Amérique latine, 1960 ; Six poètes, 1962 ; Poésie vivante en Argentine, 1962 ; De l'incidence des pierres, 1966), des traductions isolées dans des revues ou des anthologies plus générales (La poésie libéro-américaine, 1956 ; Voix vivantes de la poésie hispano-américaine, 1960), il a contribué à révéler des poètes comme Huidobro (Altaigle, 1957, Le Citoyen de l'oubli, La Poésie est un attentat céleste), Carrera Andrade (Les Armes de la lumière, 1953), Juarroz (Poésie verticale, 1962-1993), Vallejo (Poèmes, 1981), Diaz-Casanueva (Le Chant de la conjuration, 1971, L'Oiseau Dunga), Gerbasi (Poèmes, 1968), Pizarnik (Où l'avide environne, 1974), sans oublier Felipe (La Hache, 1948), Silva-Estrada (Approches, 1975, Poèmes), del Cabral (Saveur d'ombre, 1978), Cerrato (Paroles dans le miroir, 1989), Tenca (Mémorial du regard, 1989), et plus sporadiquement, Borges, Alonso, Hernàndez, Aguirre... Esprit curieux et fidèle, Verhesen débusque au Chili l'œuvre ignorée de Unduraga mais aussi en France celle de Maurice Blanchard, le plus grand méconnu de ce temps.
Fondateur des Cahiers nouveaux de France et de Belgique (1939), il y publie intégralement les Mémoires d'Adam d'Albert-Birot, alors oublié. Soucieux d'une critique indépendante et rigoureuse, il crée le Centre international d'études poétiques (1954) et lance son Courrier (1955). Souvent chargé de présenter ou d'enseigner (à l'Université Columbia de New York) la poésie française d'hier et d'aujourd'hui, il en trace un panorama clairvoyant dans Voies et voix et de la poésie française (1960) et en compose plusieurs anthologies, sans préjudice d'études approfondies sur ses amis Vandercammen (avec Élie Willaime, 1969), della Faille, ou le peintre-graveur Mels, et d'une masse de chroniques, réflexions ou comptes rendus confiés à quantité de revues.
La pénétration qui caractérise cette activité critique autant que la justesse sensible des traductions, et jusqu'à leur orientation, sont liées, dans l'unité de l'homme, à la personnalité du poète. Poète d'extrême exigence dont l'œuvre éditée, pour représentative, n'en est pas moins fragmentaire. Dans un premier temps, Verhesen publie Fontaine aux mensonges (1939), Le Temps caché (1943) et Passage de la terre (1940) où il dit, en vers parfois très imagés et dans des tons proches de Jouve, les temps noirs, la peur d'un monde ceinturé d'armes ; mais on y sent aussi le besoin d'une ouverture, d'un univers libre pour toutes les joies, orientation qui se confirmera après la tourmente, et une fois l'aube accordée, dans Voir la nuit et Le Jour naturel (1947).
Suit un silence apparent, magistralement rompu en 1970 par Franchir la nuit, puis Les Clartés mitoyennes (1978) et L'Archée (1981), trois livres qui se répondent et approfondissent la formulation d'une poésie dynamique, à la fois libre et fidèle à l'expérience sans cesse renouvelée du rapport entre l'homme et le monde.
Fernand Verhesen a été élu à l'Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique le 31 mars 1973.