NAMUR Yves

Biographie

Yves Namur est né à Namur en 1952. Médecin et éditeur (Le Taillis Pré), il est aussi l’auteur d’une trentaine d’ouvrages.

Il est le lauréat de nombreux prix littéraires parmi lesquels, les Prix Charles Plisnier, Jean Malrieu, La Biennale Robert Goffin, Louise Labé (2001), le Prix Maurice Carême (2003) ainsi que le Prix Tristan Tzara (2004) et le Prix du Parlement de la Communauté française (2005) pour Les ennuagements du coeur (éd. Lettres vives). Il est membre de l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique et membre correspondant de l’Académie européenne de poésie.

Bibliographie

·         Soleil à l’échafaud, poèmes, La Dryade, Virton, 1971.

·         Sur le sable, le poignard,poèmes, 1972, hors commerce.

·         Aux champs des écoliers,essai, Pierre Rochette, Bruxelles, 1973.

·         Meule de pierre,poèmes, Atelier la Soif étanche, Liège, 1975.

·         De mémoire inférieure, poèmes, Art et Poésie, Corbigny, 1975.

·         Papier journal pour myope et saxophone,poèmes, Le Dé bleu, Chaillé-­sous-les-Ormeaux, 1975.

·         Lampes/Langue du borgne,poèmes, Atelier la Soif étanche, Liège, 1976.

·         Des ossements, poèmes, avec une préface d’André Miguel, Atelier la Soif étanche, Liège, 1976.

·         À l’entre-deux,poèmes, Fond de la Ville, Awan-Aywaille, 1977, gravures de Christian Bizeul.

·         Le toucher, le poème, poèmes, La Main courante, La Souterraine (Creuse), 1984, dessin de Gilbert Laloux.

·         Le voyage, l’obscène, poèmes, L’Arbre à paroles, Amay, 1984, sept dessins de Cécile Miguel.

·         Saint-Aubin-de-Luigné, un village en Anjou, ses vins, ses vieilles demeures,essai, Académie du goût et de J’esprit culinaire, Tournai, 1986.

·         L’auberge à manger le temps, poèmes gourmands, Académie du goût et de J’esprit culinaire, Tournai, 1987, interventions graphiques de Yolande Damien.

·         L’amante, nouvelles, L’Impatiente, La Ferté-Milon, 1990.

·         Fragments traversés en quelques nuits d’arbres et confuses, poèmes, La Main courante, La Souterraine (Creuse), 1990, intervention graphique de Rémy Pénard.

·         Fourrures de fourmis,poèmes, L’Impatiente, La Ferté-Milon, 1990.

·         Ce long bavardage, poèmes, L’Arbre à paroles, Amay, 1990.

·         Le voyage en amont de (   ) vide, poèmes, L’Arbre à paroles, Amay, 1990, Réédité au Talus d’approche, Mons, 1995.

·         L’oiseau et l’effacement du jour, poèmes, Cahiers Froissart, Valenciennes, 1990.

·         Trente-trois poèmes pour une petite cuisine bleue, poèmes, L’Arbre, La Ferté-Milon, 1991.

·         La parole oubliée, poèmes, Le Charbon blanc, Paris, 1991.

·         Lettres à une autre,poèmes, La Bruyère, Paris, 1991.

·         De fines bandelettes ou le domaine de l’oiseleur, poèmes, Le Charbon blanc, Paris, 1991.

·         Fragments de l’inachevée, poèmes, Les Éperonniers, Bruxelles, 1992, traduit en allemand sous le titre Paroles de rien, dessins de Jacques Lacomblez, Verlag im Wald, Rimbach, 1996.

·         Le livre des sept portes, poèmes, Lettres vives, Paris, 1994. Traduit en allemand: Das Buch der sieben Pforten, avec trois dessins d’André Zaumseil, Verlag Jutta Legueil, Stuttgart, 1995, traduit en hongrois, Á hét kapu könyve, Magyar Naplo Könyvek, Budapest, 1998, traduit en roumain, Cartea celor ÅŸapte porÅ£i, Libra, Bucarest, 2005.

·         Le regard est le nom de l’arbre ou le poème,poèmes, Les Moires, Paris, 1996.

·         Poésie française de Belgique, une lecture des poètes nés après 1945, anthologie, choix et présentation d’Yves Namur, Sud, Marseille, 1996.

·         Une parole dans les failles, préface de Philippe Jones. Dix dessins de Jean-Yves Bocher, poèmes, Phi, Luxembourg, 1997.

·         Sept figures d’une répétition, poèmes, Édition bibliophile, Aux dépens de l’artiste, Colfontaine, 1998, avec huit interventions graphiques de Nadine Fiévet.

·         Figures du très obscur,poèmes, Phi, en coédition avec Écrits des Forges, Luxembourg-Québec, 2000, sept encres de Gabriel Belgeonne. Traduit en portugais, Figuras do muito obscuro, avec une préface de Nuno Judice, Cavalo de ferro, Lisbonne, 2005.

·         A l’épreuve de la lumière,poèmes, Édition bibliophile, avec sept peintures originales de Jean-Luc Herman, La Séranne, Paris, 2000.

·         Le siècle des femmes, anthologie avec Liliane Wouters, Les Éperonniers, Bruxelles-Luxembourg, 2000, collection Passé-Présent, en coédition avec Phi.

·         Le livre des apparences,poèmes, Lettres Vives, Paris, 200l.

·         La petite cuisine bleue,poèmes, avec des illustrations de Claire Lesbros et une préface de Pierre Halen, Phi, en coédition avec Les Écrits des Forges, Luxembourg-Québec, 2002.

·         L’immobilité verte, poèmes, Édition bibliophile, avec dix sérigraphies de Jean-Luc Herman, Le Zéphyr, Paris, 2002.

·         Le regard de l’éclaircie, poèmes, Édition bibliophile, avec des peintures de Jean-Pierre Thomas, Vice-Versa, Paris, 2002.

·         Les ennuagements du cœur, poèmes, Lettres Vives, Paris, 2004.

·         Poètes aujourd’hui – Un panorama de la poésie francophone de Belgique, avec Yves Namur, Le Taillis Pré/Le Noroît, Châtelineau/Québec, 2007.

·         Un oiseau s’est posé sur tes lèvres, 2007.

·         La nouvelle poésie française de Belgique, Le Taillis Pré, Châtelineau, 2009.

·         La tristesse du figuier, Lettres Vives, 2012. (Terre de Poésie). Prix Mallarmé 2012.

·         Un poème avant les commencements, Le Taillis Pré/Le Noroît, 2013.

·         Ce que j’ai peut-être fait, Lettres Vives, 2013.

·         Creuse-nous, Éditions de la Margeride, 2013. Gravures sur bois de Robert Lobet.

·         Les poètes du Taillis Pré. Une anthologie partisane, Le Taillis Pré, 2014.

·         Les lèvres et la soif : élégies, Castellare di Casinca, Lettres Vives, 2016.

·         Sept pas dans la lumière, aesth., 2003.

·         La pluie, avec Jacques Ancet, Editions Méridianes, 2019.

 

À consulter :

 

·         “Autour de Namur”, Amay, revue L’Arbre à paroles, automne 2009 ; n° 145.  “Un nom de ville qui est aussi le patronyme d’un poète qui compte aujourd’hui dans le paysage des lettres françaises de Belgique. Non parce qu’il a collectionné les prix, mais parce qu’Yves Namur poursuit une belle démarche spirituelle en quête de sens : pour en donner à la vie ou, tout simplement, jouir d’eux et donner à partager cette jouissance. Il convenait de leur rendre hommage (…). Au poète qui a goûté au plaisir d’associer son nom à la ville en conviant, dans une amicale conspiration, des auteurs nés ou vivant à Namur ou ses environs. Puis de Philippe Lekeuche à Yves Broussard, des poètes amis pour présenter Yves Namur et son oeuvre, études et regards attentifs, de précieux inédits….” (extrait de la quatrième de couverture).  Etudes et lectures critiques de Francis Chenot, Philippe Lekeuche, André Miguel, Philippe Jones, Jean Royer, Eric Brogniet, Réginald Gaillard, Jalel El Gharbi, Jacques Crickillon, Gaspard Hons et Yves Broussard. Six poèmes inédits de l’auteur, suivis de poèmes de Fabien Abrassart, Eric Brogniet, Alain Dantinne, Théophile de Giraud, André Doms, Marc Dugardin, Nicolas Grégoire, Roland Ladrière, Philippe Lekeuche et Vincent Tholomé. Choix de poèmes personnels.

Textes

Cette rose
Nous fut donnée pour la soif
Et l’éclair.
Mais nous l’avons tant de fois laissée
Sur le rebord de la fenêtre,
Nous l’avons
Ô combien de fois abandonnée à elle-même,
Au poème et à la folle,
Qu’on ne sait plus vraiment aujourd’hui,
Etait-elle rose dans la rose
Ou montagne sur la montagne ?
Cette rose fut tant appelée
Qu’elle en oublia même le poids de l’abeille
Et celui de la première rosée,
Qu’elle en oublia la pluie,
L’odeur du cheval et la forme des poèmes.
Elle en oublia jusqu’au sens même des mots,
Les mots les plus simples et les plus ordinaires,
Ceux dont on rêve et ceux que l’on pleure.
Elle oublia aussi tous ceux dont elle portait encore
Le cœur rouge et les respirations,
Elle en oublia tout de tout.
Parce que tout cela, dit-elle,
Le poème, la colère, les larmes et même la tristesse du ciel,
Tout cela n’est réponse à rien.
La rose
Et le promeneur fatigué sont là
Qui écoutent le merle
Et les solitudes noires du pré.
L’un et l’autre sont assis
Au bord de l’herbe, au bord de la pensée,
Tout au bord du vide.
L’un et l’autre,
Comme autant de cristaux et de cendres
Qui se souviendraient encore de l’étoile et de l’errant,
L’un et l’autre regardent le monde
Et cette douleur
Cachée dans la bouche des hommes.
(pour Ferry et Jacques Crickillon)
 Ce matin,
Une rose s’est ouverte au grand vide,
S’est vidée
De son sang noir,
De tout son sang, de ses robes
Et de ses désirs d’abeilles.
Une rose
S’est dressée vers l’étoile et la douleur,
Une rose vide
S’est ainsi ouverte au lointain
Et
Aux regards de l’autre.
Combien de roses sont-elles
À marcher encore dans le grand pré
Et la solitude ?
Combien sont-elles,
Roses venues de mai
Ou des lointaines terres blanches,
Combien sont-elles,
Qui ne seront jamais tout à fait ouvertes,
Qui ne seront jamais que silences, demi-mots
Ou douleurs ?
Combien sont-elles
Qui se tournent ainsi vers les ruines
Et les vides d’un homme ?
Qu’y a-t-il dans le regard de l’abeille ?
Qu’y a-t-il
Que l’homme ne connaisse déjà ?
Peut-être une maison sans toit,
Peut-être une chaise sans pieds,
Sans voix et sans gestes,
Peut-être une pierre sans histoires,
Sans poids et sans aucune consistance,
Peut-être un regret
Ou quelques mots inutiles et beaux,
Peut-être
Y a-t-il de tout cela dans l’œil de l’abeille,
Et peut-être aussi une larme
Et un poème inachevé encore ?
Une voix d’or se soulève
Comme le firent naguère la poussière et les mots légers.
La voilà qui s’absente maintenant d’elle-même
Et marche avec les oiseaux au-dessus du mot vert,
Au-dessus du grand pré, au-delà de l’air.
Une voix marche vers un dieu obscur
Ou une forêt de riens.
Une voix marche
Que rien ni personne ne saurait désormais arrêter,
Tant le vert est immense, tant le poème reste
Ouvert.
Quelle maison
Pourrait tout à la fois contenir les larmes,
Les silences et toutes les formes physiques du vert ?
Et quelle autre maison,
Maison de poète, de roi ou d’esclave blanc,
Quelle autre pourrait-elle aussi se vider de tout cela,
De toutes ces larmes,
Des formes et des silences qui encombrent la journée
Et les poèmes à écrire ?
Quelle maison, je vous le demande,
Quelle maison pourrait entrer maintenant dans ce poème ?
(Poèmes extraits de : Les ennuagements du cœur, Lettres Vives, Paris, 2004).
Yves NAMUR

Commentaires

« À pas feutrés, sur les voies de l’indicible, fils spirituel de quelques grands poètes de ce monde, Yves Namur poursuit sa quête personnelle et s’impose de plus en plus comme une des voix les plus sûres de notre poésie contemporaine. » Le Mensuel littéraire et poétique, 1994.
« Yves Namur, avec beaucoup d’économie et de maîtrise, se place dans la lignée spiritualiste de René Daumal et Edmond Jabès. » Le Figaro Littéraire, 1994.
« Dans ces poèmes, on découvre une pensée tourne vers le vide, le rien, la mort… Ecriture de la présence et de l’absence, tentative pour nommer ce qui se situe au-delà du nommable, pour atteindre l’essence des choses… Pareille recherche ne serait-elle donc pas celle du livre, l’œuvre grandiose dont rêvait Mallarmé ? » La Nouvelle Revue Française, Gallimard, 1995.
« Depuis son premier recueil, Yves Namur poursuit une interrogation intense, presque sacrée. Tournant le dos à une explication rationnelle du monde, le poète sonde le silence à l’écoute de la mémoire inférieure… » Littérature Belge de langue française, 1999.
 
« Yves Namur est un poète du vertige. De la restriction, face à l’excès. De l’aller droit et clair, face au laisser-aller. Sa parole tourne autour du peu : « Le peu est la seule chose/qui puisse nous grandir. » Leçon de lucidité, leçon de modestie. Mais non leçon de morale. Cette poésie se défend de prêcher : elle creuse, elle harcèle, elle interroge… Sa sagesse est décantation ; Elle nous illumine et nous désaltère en même temps. » Europe, 2000.
« Yves Namur est par excellence le poète de la quête obstinée du Grand-Œuvre mallarméen. » Poésie I / Vagabondages, Paris, 2001.
« Le Livre des apparences, une sorte de traité du questionnement radical, qui fait penser aux tentatives les plus poussées de Petre Handke dans le même sens, celui d’une volonté de table rase absolue. On dirait que Namur veut tout décaper, pour voir surgir ce qui, de ce grand évidemment, peut naître. » Le Soir, 2001.
« C’est dans la mouvance de Roger Munier et Roberto Juarroz que le poète Yves Namur inscrit sa quête patiente de l’essence des choses, et de l’inespéré de toute vie, inaccessible sans doute au vivant : l’être. Nous le savons, tout nous échappe, et plus nous avançons vers la lumière, plus l’obscurité s’accroît. Mais comment faire autrement ? Rimbaud déjà, bien avant lui, et combien de mystiques se sont brûlés les ailes dans cette quête du Graal ? Le mérite de Namur, dans « Figures du très obscur », est de persister dans ce chemin qui peut-être ne mène nulle part, mais conduit à un questionnement incessant qui le garde de toute approximation, de toute réponse, et trouve dans la langue épurée du poème des échos d’une belle richesse. Et, c’est ainsi qu’Orphée nous garde. » La Nouvelle Revue Française, Gallimard, 2001.
« Yves Namur nous démontre excellemment, comme naguère Follain, que cuisine et poésie peuvent faire très bon ménage. Ses poèmes sont tout pleins d’odeur d’auberge, de saveurs légères ou confites. Leurs vers aérés comme une pâte qui lève préservent suffisamment d’inconnu ou d’insaisissable pour que la maison gourmande soit aussi demeure rêveuse de poésie. » La Nouvelle Revue Française, Gallimard, 2003.