Décès de Marie-Claire d’Orbaix “La tendresse et la lucidité C’est un déchirement pour ceux qui la lisaient comme pour ceux qui la connaissaient. Marie-Claire d’Orbaix a quitté ce monde peu après avoir atteint ses 70 ans. Elle n’avait jamais, dans la maladie qui a pris ses derniers mois, renoncé à deux qualités dont l’alliage rare était un peu sa marque: la tendresse et la lucidité. Elle était avant tout poète. Non pas prodigue, mais généreuse: elle a publié sept recueils. On dirait qu’entre «La Source perdue», qui date de 1948, et «Noyau de feu», qui date de 1987, la poésie a été sa manière de baliser sa vie et d’en exprimer l’essence. Fille du poète Désiré-Joseph d’Orbaix (dont elle gardera le pseudonyme), elle a sûrement voulu continuer ce qui était un peu son héritage, mais elle a très vite acquis son autonomie créatrice. Sans chercher une nouveauté technique à tout prix, elle a trouvé sa voie: celle d’une femme qui connaît l’amour, puis qui perd le compagnon de sa vie; celle d’une mère qui connaît la perte d’un enfant, puis le bonheur d’en avoir d’autres. Celle, enfin, d’une femme qui regarde l’existence, l’exprime et l’aime avec une merveilleuse et féconde sérénité. On pourrait parler d’elle en alignant ses titres. Elle était partie de «La Source perdue» à la recherche de «Traces de nous-mêmes». Elle savait que la poésie est «Érosion du silence», même dans une «Maison vide», et que le poète garde toujours en lui un «Noyau de feu». Cette poésie reste pure, comme offerte, à travers des textes souvent brefs, mais qui parlent longtemps en nous. Comme l’a dit un jour Jacques De Decker, c’est l’économie au plus haut de son frémissement. C’est aussi la simplicité au plus haut de son intensité, comme dans tel poème où, marchant sur un parquet, elle pense aux arbres, à la forêt couchée d’où ce bois est venu. Voici quelques jours, ses amis avaient voulu lui offrir un choix de ses poèmes. Le Grenier Jane Tony et les Élytres du hanneton rassemblaient une bonne quarantaine de pages puisées dans tous ses recueils. Marie-Claire l’avait vu avec joie. Elle savait tout de son destin achevé, mais l’ensemble était le chant intact. Elle l’avait signé pour ses amis d’une plume aussi harmonieuse et claire qu’autrefois. J’en cite quelques lignes qui disent tout: .. Dire oui à la pluie à l’ombre, à l’onde, dire oui, comme les fleurs [du cerisier qui restent blanches dans la nuit…”
Sion, Georges. Décès de Marie-Claire d’Orbaix [en ligne]. In : Le soir, 3 décembre 1990 [consulté le 01/02/12]. Disponible sur : archives.lesoir.be/deces-de-marie-claire-d-orbaix-la-tendresse-et-la-lucid_t-19901203-Z03D0M.html