Jean Glineur, né à Binche le 29 mai 1906, mourut à Bruxelles le 31 mai 1969 ; il est donc le contemporain absolu d’un autre poète hennuyer, le surréaliste Achille Chavée. Issu d’une famille bourgeoise, aisée et cultivée, il fit ses études à Binche, puis à l’Institut Saint-Louis à Bruxelles et à l’U.C.L. où il s’intéresse autant à la médecine (il se spécialisera plus tard dans la gestion hospitalière) qu’à la vie estudiantine, aux cercles littéraires ou la philosophie (il décroche un diplôme, inattendu, de bachelier en philosophie thomiste en 1926) ; mais il poursuivait en fait des études de droit, qu’il interrompit, reprit à l’Université de Liège pour les achever au Jury central en 1934. C’est que la poésie l’avait intensément sollicité dès 1923, qu’il avait participé à la vie de plusieurs jeunes revues (dont les Cahiers de la Jeunesse catholique et La nouvelle Equipe), qu’il avait même fondé sa propre revue à Charleroi, Le Soupirail (six numéro en 1928-29) : il s’y montrait accueillant aux esthétiques nouvelles, notamment au surréalisme, saluant le jeune Eluard, présentant l’œuvre picturale de Magritte, Eemans, Frits Van Den Berghe, publiant des poèmes de Verboom, Mesens, commentant Nougé ou les jeunes compositeurs français (les « Six ») et belges (Quinet, Souris, etc.). L’estime que valut à la revue cet esprit d’ouverture ne put cependant la sauver des difficultés matérielles. L’existence du poète aussi devint plus difficile : la mort de sa mère, encore jeune ; un premier mariage (1930) malheureux ; la nécessité de prendre un emploi à la Commission d’Assistance Publique de Bruxelles (où il fit d’ailleurs toute sa carrière) et de le doubler de charges supplémentaires (l’enseignement, entre autres.) Dans ce climat d’échec et de tensions, son activité poétique se restreignit peu à peu et il s’éloigna aussi pour de bon de son éducation catholique comme de la foi, tout en demeurant profondément tolérant. Il fit la campagne en 1946, José De Causemaker, qu’il épousa en 1951. Sa vie s’équilibre, son activité professionnelle se développe heureusement : chargé de cours à l’U.L.B., il rédige nombre d’ouvrages juridiques. Dans ses dernières années, Glineur voulut relancer son travail poétique, en faisant plus appel à l’expérience vitale qu’aux feux de l’imagination, mais le destin ne lui permit pas et seuls demeurent quelques rares poèmes qui ne peuvent rendre compte de son projet mais redisent la tendresse et l’amour qui n’avaient pas cessé de nourrir l’existence de l’homme et du poète.