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CARAQUE
Mât balloté au coeur mystérieux des rêves
Battant pavillon clair des carènes d'Ulysse
A loisir, à plaisir, de haut en bas je glisse
De l'arête des mers aux bords mouillés des grèves.
Barque battue aux flots blessés de mes poèmes,
Aux roulis du ressac des espoirs engourdis
Vais-je bercer encor mes trésors engloutis
A ras bord des couplets de mes chants en trirème.
Quel banc de sable arqué offre à mes vers oblongs
Leurs rimes pour qu'y meure ou l'amour ou la femme
Et qu'y chante à nouveau comme s'aiguise l'âme
Ta peau d'ombre et de courbe au flux moelleux et blond.
Fronton lisse du ventre à la chute lovée,
Balustre au double flanc brisé en ton sillon,
Tes jambes et ton buste ont creusé leur vallon
Où mon ombre s'allonge en poses enfiévrées.
O femme, coquillage sur fond de velours nuit,
Plage du soir et ciel où s'accrochent mes jours
Quel étrange destin a noué mes amours
A ton île de chair, à tes lèvres de fruit.
Paré d'imaginaire et de ses artifices
A ton temple je viens sacrifier mes vers
Et je souris à Dieu qui m'a créé trouvère
De ta tendresse nue et qui m'a fait complice
Aux confins de ton corps, de ses rocs, de ses creux
Et de tant de grandeur et d'aussi graves jeux.
extrait de Or et Silex