DOMBRET Olivier

Biographie

Né à Liège en 1980, Olivier Dombret ressent dès l’enfance le besoin de créer. À 18 ans, il décide d’étudier le sanskrit à l’Université de Liège, tout en explorant divers champs d’expression artistique. Il abandonne ses études 3 ans plus tard afin de poursuivre ses recherches sur la thématique du Corps, ce qui l’amène à travailler durant deux ans sur divers projets de modification corporelle dans le milieu du tatouage et du piercing. Il assouvit ensuite son besoin de voyager et se consacre essentiellement à l’écriture et à la musique. Écrivain-poète, performer et musicien, il vit actuellement entre l’Espagne et la Belgique. Depuis 2004, il collabore régulièrement aux activités de la Troupe Poétique Nomade de Maelström Réévolution, ce qui lui a notamment permis de présenter son travail à travers l’Europe ainsi qu’aux USA.

Bibliographie

Publications

  • “Journal d’un jeune branleur”, Maelström Éditions, 2006 (finaliste du Prix Indications 2007).
  • “L’Empire d’Occident / The Western Empire”, Maelström Éditions, 2008. (Bookleg).
  • “Ghost Words”, Maelström Éditions, 2011. (Bookleg).
  • “Dansent les ombres”, L’Arbre à paroles, 2013.
  • “Notre mère la montagne”, L’Arbre à paroles, 2015. (iF).

Traductions

  • “Fast Speaking Woman”, Anne Waldman, Maelström Éditions, 2008 (Traductions de Marianne Costa, Pierre Guéry, Frédérique Longrée et Olivier Dombret).

Textes

(Extrait de “Dansent les ombres”, L’Arbre à Paroles, Collection POM, Amay, 2013)

Les Ténèbres sont le Ventre de la Nuit, grosses d’Ombres nombreuses et fragiles. Grosses des jours qu’il faudra nommer. Grosses de la Lumière à venir. Le Temps n’existe que dans le sablier.

Tout ce qui grogne. Dans les entrailles de la Ville. Tout ce qui rampe. Remplit le vide. Tout ce qui remue dans le Ventre. Avalé. Le Ventre de la Ville. Le Ventre du Monde. Tout ce qui grimpe et s’accroche aux côtes. Cathédrale thoracique. Tout ce qui tousse. Est toussé. Tout ce qui afflue et reflue. Tout ce qui remonte le long de la gorge de la Ville. Régurgité. Tout ce qui cogne contre les dents. Les dents de la Ville. Les dents du Monde. Dans la bouche de la Ville. Sur la langue de la Ville. La langue du Monde. De la Ville. Et du Monde. Encore. Tout ce qui traverse le Monde. Et la Ville. Tout ce qui traverse la Nuit.

Tout ce qui est sale et usé. Égaré. Abandonné le long des voies mortes.

Ce qui s’est perdu dans la Forêt.
Crie.
Pleure parfois.
A longtemps appelé.
Jamais la Nuit.
Jamais la Nuit, donc, n’a connu ton visage.
Ni ton nom.
Ni le nom de ton père.
Ni reconnu ta voix.
Ni la voix de ton père.
Ni ces lentes prières par l’Arbre chantées.
Celles de ton père.

C’est le Temps. Le temps perdu. Le temps qui se perd. Les minutes molles. Immobiles. Simples, finalement. Et toujours le Temps. Parce que c’est l’Ennui. L’Ennui qui commande au Temps. L’Ennui qui commande au Temps qui commande à l’Ennui. Et l’erreur qui survient, parfois. De temps en temps. Découvre un autre chemin. Qu’il faut emprunter. Ce soir. Et raconter autre chose. Un peu plus lentement. Différent. Parce que c’est le Temps. Le Temps qui commande à l’Ennui. Le Temps qui commande à l’Ennui qui commande au Temps.

Regarde au-delà des visages.
Et vois ce qui s’y cache.
Si tu as peur, ferme les yeux.
Mais vois.

***

(Extrait de “Dansent les ombres”, L’Arbre à Paroles, Collection POM, Amay, 2013)

Tout ce qui naît. Et se meut. Tendu. Se tord. Ce qui se dévêtit et abandonne la froide tunique de la Nuit. Tout ce qui quitte son refuge et se met en marche. Nu, habité par la Lumière du Jour nouveau. C’est la douce chaleur des corps jeunes à la peau dorée. C’est l’attraction. C’est le long baiser de l’Océan. C’est l’œuvre salée de l’Aurore. C’est l’Appel.

C’est la Faim. Celle qui désire. Intensément. Murmure bestial. C’est le Ventre qu’il faut nourrir. C’est le Cœur qui pompe. Encore plus vite. Le Cœur pourpre. Gorgé de vie. Gros comme le poing. Le Cœur solaire. Astre rayonnant au creux de la poitrine. Sous les côtes. Bourgeonne. Irradie. C’est le Corps qui tremble. Et s’anime. C’est la chair qui éclate. Viandes éveillées. Fleur sanguine.

Et l’Ombre s’allonge.
Serpente.
Profonde.
Révèle d’autres chemins.
Des voies anciennes.
Nombreuses.
Oubliées.
Autrefois empruntées par d’inconstants pèlerins.
C’est le chant clair de l’oiseau.
C’est le souffle pressant qui s’attarde.
C’est la prière discrète du Vent.

Tout ce qui va. Et vient. C’est la molle caresse de la marée. Une étreinte d’écume. Et le sable accueille l’offrande que la Mer a tendrement déposé. C’est la pierre jetée au loin. Celle qui jamais ne revient. Reste pourtant l’empreinte laissée. Peu à peu effacée. Délicat vestige des heures passées. Tout ce qui disparaît. C’est la lente agonie de l’Été. Une menace végétale et colorée. Et l’odeur douceâtre qui hante le sentier.

Et l’île que j’étais alors,
aujourd’hui continent,
sème encore quelquefois
d’invisibles fragments.