Disparus
père et mère
sous la pierre
plus de coupable
plus de silence
Disparus
pierre
sur les abois
sur les visages
je te regarde
non distance
non rupture
Disparus
Extrait de “Une neige peinte de pas”
*
Dans le tomber de l’air
La fraîcheur des premiers jours était l’immense innocence
face à la clarté nue du monde. demain sans écho, ne rudoyait
pas le présent non plus qu’hier oublié. la raison souriait
encore, elle qui plus tard portera le masque de fer et les dents
d’acier. l’errance faisait de nous les hôtes d’une terre toujours
tiède. Nous étions de partout assoiffés de nécessités. Le verbe
naissant tenait sa juste place entre le silence et l’ombre de nos pas.
Libre de son nom, l’arbre nous occupait la journée entière, nous
échangions nos sangs en plein jour. Dans notre paume
la pierre palpitait. Nous n’étions occupés que de vivre, nos
prises n’excédant pas aujourd’hui, nous restions libres, adossés
à l’air. Nos morts n’étant pas pleurés, nos regards restaient
circulaires.
En mémoire de l’hôte, ce trois juillet mil neuf cent
quatre-vingt-neuf.
Debout se draper de l’évidence : les soleils de midi
n’exhument que des blessures.
Chercheur d’un éclat de silence probant, l’éclair médité
aiguise la fuite prolongeant dans le cri apaisé l’hommage
fraternel.
Nous avons approché l’hirondelle au visage impatient : la
foudre recueillie entre nos mains nouées.
Effleurée, elle a fermé les yeux.
Extraits de : “Durer”
*
La main qui se tend ne touche rien
comme si le mur reculait
comme si traverser l’air n’était rien
traverser
ce miroir sans fond
ce par-delà visible intouchable
comme si sans visage l’oubli
brillait jusqu’à cet espace effacé
jusqu’à ce teint de rose évanoui
dans la durée diluée
ce face à face où tremble
trop tôt ou trop tard
ce visage à nulle voix qui se traverse
ni réponse
ni apaisement
qu’est-ce
qui s’efface et sans cesse revient
comme une absence de fin
ce fond sans fond dernière certitude
cet évanouissement
qui emporte vers ce qui toujours
RecommenceLaquelle de ces paroles
est la plus proche
parole qui ne revient jamais
parole dérisoire au fond du vivre
une toux sèche au bord du vent
parole ivre dans sa gangue
présente et ailleurs
qui dit n’importe quoi
rayonnant
dans l’éboulis des jours
inouïe
sur un appui d’air
présente et perdure
parole
telle une brassée d’air frais
qui délivre de soi s’éparpillant
d’ivresse
jusqu’aux plus sombres des mots
parole neutre
qui va jaillir
Extrait de : “L’Oubli, l’attente”