CLOES Philippe

Biographie

Auteur et plasticien, Philippe Cloes (1978) passe d’expositions en lectures ou performances. Entre la Belgique, la France ou encore le Portugal. Le rapport premier et animal que l’homme entretient avec lui même et son environnement interpelle sans cesse l’artiste, tant dans son travail plastique que poétique. Entre masse et individu. Un travail d’écriture partagé depuis plusieurs années sous différentes formes: performances, lectures, projets musicaux, installations, dans des revues poétiques et éditions collectives telles Matière à poésie, La bafouille incontinente, Sous l’écorce (Tétras Lyre, 2007), etc.
En 2008, paraît aux éditions Tétras Lyre Quand il ne restera que nos jambes (coll. Ouï-Lyre) avec la collaboration de Michel Barzin (photos) et Didier Laloy (accordéon diatonique).

Brièvement :

2008-2009 :

– Plusieurs lectures collectives dans le cadre du vingtième anniversaire des éditions Tétras Lyre (Bruxelles, Liège, Paris).

2008 :

septembre :

– Exposition à la galerie « Autre Dimension » à Charneux (Belgique).
– Parution aux éditions Tetras Lyre de Quand il ne restera que nos jambes. Un recueil et un CD (mise en voix accompagnée de Didier Laloy).

Mai – Octobre :
– KUKUK « changement de temps »(Belgique / Allemagne). Renseignements: www.kukukandergrenze.org.

2007 :

Décembre :

– « le DSM en invention » de décembre ’07 à février’08, tournée d’expositions collectives (Ludovic Demarche, Pascale Barret, Vincent Beekman…) à Bruxelles (B), Leuze-en-Hainaut (B) et liège (B).
– Collaboration (écriture-lecture) avec Sophie Halin (danse contemporaine).

Novembre :

– Dans le cadre de « Y’a pas d’lez’Arts »,exposition individuelle au Centre Culturel de Amay (Belgique).
– A partir de cette période, début d’une serie d’expositions itinérantes (principalement en région bruxelloise et en Flandre) par le biais de l’agence « Little Van Gogh s.a. ». Trois séries de dix toiles chacune sont visibles en permanence sur le site www.littlevangogh.com).

Septembre :

– « Au tour de Jacques Izoard », édition collective avec notamment : Dominique Massaut, Jaques Mercier, Timotéo Sergoï, Robert Schaus, Selçuk Mutlu, Karel Logist, Caroline Lamarche, Hilde Keteleer, Paul de Troy, Jan Baetens…

Avril :

– Lectures avec plusieurs auteurs francophones et neerlandophones dans le cadre du festival « Passa Porta » à Bruxelles.

2006 :

Octobre :

– Paris 9ème (France), expo à la galerie « Delta ».
– Présentation de « EGOïSTE! » (electro-acoustique-video lectureinstallation) lors du festival « Enfanfare » (Liège). Proposé au public à cette occasion avec Didier Laloy (accordéon diatonique) et Miguel Ortiz (guitare électrique).

Juillet :

– Première de « EGOïSTE! » (son-video-lecture-installation), présenté lors du 60ème « Festival d’Avignon » et du 20ème anniversaire du « Centre Européen de la Poésie d’Avignon ».

Mai :

– « Rood is niet groen » au Cultuur Centrum Villa Basta, Houthalen Helchteren (Belgique).

2005 :

Octobre :

– Durant tout le mois, « Les avisés » (installation-son-video) est présentée au « Centre Européen de la Poésie d’Avignon », dans le cadre du onzième « Parcours d’art ».
– Paris 9ème, expo à la galerie « Delta ».

Juillet :

– Exposition collective à Vinon-sur-Verdon (13) (France) avec Phil Billen, Dominique Filée, Sylvie Derumier.

2004 :

Octobre et novembre :

– Participation dans le cadre de « Exposiçoa internacional de artes plasticas », Vendas Novas (Portugal).
– Participation au neuvième « Salon des Arts de Laudun – L’ardoise » à Avignon.

Août :

– Exposition dans le cadre des événements “Art in progress” à Gent.

Mars :

– Exposition collective en soutien avec l’association « Le monde selon les femmes, 10 ans » au centre Flagey de Bruxelles.
– Participation à l’événement “Ithaka’12 re-framed 2004” organisé à Leuven (Belgique).

2003 :

– Après un passage devant plusieurs jurys dans le cadre de « Année 2003, Simenon aux pays de Liège », participation à une exposition collective au Théâtre du Trianon, Pavillon de Flore, à Liège. Cette même exposition se déplacera partiellement à l’hôtel « Sofitel » de Versailles (France) durant tout le mois de juillet 2003. Le travail présenté sera repris lors des deux manifestations ainsi que dans l’édition 2003 d’un calendrier édité par les éditions de l’Union Culturelle Wallonne à cette occasion.
– Parution d’un calendrier individuel pour l’année 2003 (6 pages) à la demande d’une société privée. Distribué dans le Benelux et en France.

Depuis 2000 : présence régulière dans le paysage culturel liégeois :

– Avec le collectif « Le laboratoire », participation à plusieurs événements, notamment l’opération « Y a pas d’léz Art », dont la réalisation de trois panneaux. Ces derniers sont tenus en exposition permanente (extérieure) à Engis (Belgique).
Les projets réalisés par le collectif ont été soutenus par la Ville de Liège et son Service des affaires culturelles, par les pouvoirs locaux, ainsi que plusieurs entreprises privées.
– Régulières participations à des évènements littéraires (performances,slam, nuits de la poésie, revues poétique, éditions collective …).
– Participations aux « Journées d’émois, marathon artistique» d’Ans (Belgique) (éditions 2003, 2004 et 2005, 2006 et 2007).
– En 2002, dépôt d’une oeuvre dans le cadre d’une vente aux enchères organisée au profit du projet “2mille2degréscelcius” au Musée de l’art différentié de Liège.
– Entre 2000 et 2004, plusieurs participations aux expositions collectives de la galerie « Orpheu » à Liège.
– En novembre 2006, vente aux enchères lors de la soirée de soutien aux sans-papiers organisée au Théâtre de la Place.

Bibliographie

Quelques expositions:

« Y’a pas de lezArt »(B), « Ithaka’12 » à Leuven (B), « Changement de temps » à Hauset (Al,B), la galerie « Delta » à Paris (F), le « Parcours d’art d’Avignon » (F), « Art in progress » à De Pinte (B), Villa Basta à Houthalen –Helchteren (B)…

Principaux travaux :

En 2005 : « Les avisés », une installation multidisciplinaire présentée notamment lors du onzième « Parcours d’Art d’Avignon », réalisée avec la complicité de Fred Eggen (paysage sonore) et Vincent Delecloz (vidéo) donnera naissance 10 mois plus tard à « EGOISTE! » une expérience scénique présentée au public dans le cadre du 60ème Festival d’Avignon.
Une aventure qui, en plus de Fred Eggen, Vincent Delecloz et Dominique Massaut, a reçu la contribution de Miguel Ortiz (guitare) et Didier Laloy (accordéon diatonique).

En 2008, paraît aux éditions Tétras Lyre « Quand il ne restera que nos jambes », un recueil accompagné d’un CD (mise en voix accompagnée de Didier Laloy) avec la collaboration de Michel Barzin (photos).

Une double participation à la biennale frontalière d’art contemporain « Changement de temps » à Raeren-Hauset (B /All), puisque sont présentés une installation et un set musico-poétique (avec Robert Schaus) ayant tous deux pour titre … « Quand il ne nous restera que nos jambes ».

Textes

EGOÏSTE! (prologue du spectacle EGOÏSTE !, 2006)

Je suis un égoïste.
On me l’a souvent dit, je suis un égoïste. C’est comme ça qu’on me définit. Aussi, souvent je me demande ce que je fous là, dans cette boîte, dans quel départ, dans quel foutoir. Cette boîte, qui me tâtonne et me protège autant qu’elle m’étouffe. Cette boîte, je crois que c’est moi… C’est probablement ça, je suis ma propre boîte et c’est très bien comme ça. C’est essentiel. C’est essentiel cette odeur de renfermé, cet odeur de périmé, ce goût de sur que je garde dans le creux de la bouche. C’est essentiel ce moisi, cette humidité sur les murs. Sans ces murs où je me cogne, où je m’érafle, Sans tout cela, je n’aurais jamais su que j’étais enfermé…enfermé de l’intérieur avec la clef sur la porte, renfermé par moi même. Sans cela, je n’aurais jamais eu envie de m’échapper, de me sevrer en toute et de toute simplicité, de là où tout est facilité, où tout est fatalité (nostalgique), où toute absurdité nous est mâchée et recommandée d’avance.

Je suis un égoïste.
Puis il y a les autres, les fous, les incendiés volontaires, les charognes, les Alice, les je, les tu, les on et les autres pronoms menteurs. En sont-ils devenus par manque d’issue, par trop d’essais, de faux départs, par trop de retard à « être », par trop d’adaptation…la même que celle d’un condamné à sa cellule.
Lorsqu’ils jettent l’encre, qu’un morceau lucide les lâche, ils se referment, et dehors, on dit que c’est normal et qu’ils ont toujours été comme ça…
Peut-être ces séquestrés d’eux-mêmes seraient et sont probablement différents lorsqu’ils rencontrent l’ouverture. Je voudrais être partout, nulle part… Je suis avec cette impression de parler de quelque chose dont on parle depuis longtemps… dont on parle vainement.
On nous mâche toujours la même merde, on s’assied toujours aussi consciencieusement sur nos certitudes, on pète toujours aussi bien dans nos pantalons de jeunesse raccommodés de raison… On aura préféré oublier, vieillir nos têtes, se reprendre et se dire qu’on a plus «intelligent à faire».
Et je le dis haut et fort, même s’il se peut qu’un jour et, je l’espère loin, je serais au regret de l’avoir écrit. Je fouille tant bien que mal pour survivre à tout, à moi.

Je suis un égoïste, à l’envers comme à l’encontre de moi… Un égoïste qui, à tellement jouer l’absent, est carrément parti. C’est sans me demander où je vais que je déambule entre les lignes où, autant écœuré qu’admiratif ou craintif, je pisse, comme tout les animaux encore sauvages.
A ce moment-là je ne suis plus qu’à ma propre merci, à mon propre salut, comme tout autre que le moule déforme.
On ne garde pas son existence pour soi, on n’entretient pas son existence comme un patrimoine ou un placement. Une existence, ça se pense, ça s’esquisse, ça se vit, ça se mange, ça se défèque, ça se dégueule. Puis ça s’écoule dans la mémoire des rigoles avec les pluies bouillonnantes venues des corniches et des visages, dont certaines transpercent encore les bottillons trop bien vernis.

Si peu ce mot soit-il en ce sens, alors oui, je suis un égoïste. J’assume et me consume avec tout ce que cela implique.
Sans même vouloir ce qu’il en restera de moi.

Cher vous tous,

En espérant que pour vous tout va bien. Je vous écris du chagrin des hommes où le soleil brille et les journées sont bien remplies, les filles sont jolies. Pour nous donc tout va bien.
Hier nous sommes allés promener dans les grands espaces. C’était très amusant. Mein kampft gourou sautait sans cesse et toujours plus dans les vagues, tout heureux de voir qu’il volait presqu’au dessus, comme lorsqu’il était jeune. Presque trop heureux.

Par contre, aujourd’hui à chaque heure, dans la salle des « fumisteries » au fond près du radiateur, les rats rient nerveux quand le surveillant s’approche pour leur faire souhaiter les vœux au chien qu’on a recueillit et qui pleure toutes les nuits après ses contemporains, ne sachant pas qu’ils sont montés dans le dernier train.

La journée, pendant que les émissaires débroussaillent les rancunes en foutant la trique à des moineaux mal lunés, nous, déguisés comme des pipos en congés et persuadés de redorer nos blasons d’enthousiasme, on nargue les vaches du pré d’en face en s’étalant dans les gobelets.

Les jours de canicule, pour nous éviter de trop respirer par la bouche, vu que le laissez-passer des cirrus a expiré, les pronoms menteurs nous débouchent les naseaux avec des relents d’ammoniaque. Quelques alvéoles frictionnent le cuir odorant du cochon-nettoyeur armé au polonium 210. D’ailleurs, il n’a plus froid aux poumons pour grimper sur les clinkers des terrasses et mater le contour du cratère en hurlant aux automates qui traversent pour aller repeindre leurs barreaux à la feuille d’or: « Donnez du leste ou j’tire sur tout ce qui pousse! ». Alors il ouvre sa bombonne et saute dans la conduite où gît la carcasse du singe bleu.

Pour ce qu’il reste de vertige je me date et vous relate: Mes restes d’unités.
Je vous laisse la maturité, celle là…

Plus de fractions, de raisons, de dividendes. Ici la maison brûle et meurt de ses cendres.

Pour ce qu’il reste de vertige je me tâte à coups de latte: Mes tests de fiertés.
Je vous laisse la maturité, celle là…qui nous fera le cul gras.

Je vous laisse…pour ce qu’ils sontJe vous délaisse… pour ce qu’ils font.

Mais rassurez-vous, je garde mon sourire crétin, preuve que tout va bien

Je vous écris bientôt d’autres nouvelles, portez-vous bien.

Parmi les heureux, votre imbécile.

L’ici (L’internat)

Dans cette ambiance de kot, de renfermé
… de trop étroit
Là où il faudra comme le précédent,
se sentir chez soi

Arpenter l’ennui des couloirs,
des radiateurs maigres,
du froid en sortant des douches

Dans ce frigide et rectiligne
Dans cet « ici ».
Eté comme hiver
Dehors comme dedans
La même voix
La même loi

Pour certains de ceux-là,
Dehors ou dedans n’existe plus…
Ce sera quand même « ici »
Dehors ou dedans
Dans ce trop petit, à ne rien foutre
Que de s’emmerder
De long en large
De marches en fonds

Dans cet « ici »
Derrière le même raz des bols,
On boit en cachette…
On joue au basket…
On s’échange des livres de cul…

Dans ce frigide et rectiligne
Dans cet « ici »
Posé comme un vaisseau
d’une autre époque
Ecrasé, abandonné
Déclaré sans suite

Rafistolé par le temps
Le passage et l’ennui,
D’autres et de certains
De quelques uns

Autrement dit « ceux-là »

Texte : Philippe Cloes / musique, voix : Thomas Willem / arrangements, mixages : Danniel Willem / enregistré et mixé en mars 2004 aux studios Willem à Seraing.

Commentaires

  • Chronique par Philippe Leuckx :

La poésie multiple

Philippe Cloes, Quand il ne restera que nos jambes, Tétras Lyre, Par Ouï-Lyre, Musique de Didier Laloy et images de Michel Barzin, 2008

Huit longs poèmes nerveux, découpés, déchiquetés, pleins d’enjambements, de jambes, de pas, d’éllipses, de prises, de reprises, de riffs, de pulsions, de pulsations, de signifiants s’appelant, se rejetant, s’accouplant…
De quoi ça parle ? Cette musique poème de Cloes ? Je parle comme ZAZIE.
Ca gicle de partouze ? Ca gicle !
” Des mots s’aiguillent ” dit-il. Bien dit.
” L’os limé corrige l’aplomb “. Le plasticien en lui parle. Ca parle comme dit l’autre Jacques. Là quand ça parle.
” Des courts ampères s’emballent ”
” Allons ! Pressons le pas ”
” Le souffle de l’ivre te saoûle ”
Phillipe Cloes, ouvre, clôt,.Il dit. Il marche. Il écrit. Des poèmes. Des pulsations. Des poèmes. Des pulsations.
Comme je vous disais…
Cloes ira loin.
À lire. À écouter.

  • Chroniques par G. Massart :

Le dimanche 28 septembre 2008, l’artiste Philippe Cloes était l’invité de KuKuK (kunst und Kultur am Köpfchen – www.kukukandergren.org).
Philippe Cloes est exposant sur le parcours artistique ” Changaement de temps ” ; un parcours qui se profile sur le tracé de la frontière germano-belge jusqu’au 19 octobre 2008.
Le thème des frontières ne cesse d’interpeller l’artiste et ses talents cherchent à les matérialiser.
Cette fois, c’est au travers des mots qu’il a tenté de s’approprier la thématique et a présenté un set musico-poétique – “Quand il ne restera que nos jambes ” – en s’alliant la complicité de deux musiciens Marie Jockin (violon), Michael Gillon (guitares) ainsi que celle du poète Robert Schaus. Les textes de ce dernier s’imbriquaient subtilement en écho à ceux de Philippe Cloes.

Quand il ne restera que nos jambes

Philippe Cloes ” marche large ” …

Tel un étalon débridé, il se lance au galop éperdu à la conquête des frontières ; celles qui se présentent, celles qu’il se met, celles qu’il veut dépasser à tout prix, en long, en large, horizontalement, verticalement, en épaisseur, en profondeur. Il s’y frotte, s’y cogne, s’y heurte, s’y écorche.
Dans cette course folle, il s’essouffle, piétine, perd pieds …
Comment canaliser et donner corps à cette énergie créatrice en effervescence ?
Philippe Cloes trouve réponse partielle à cette question brûlane pas l’expression artistique picturale ou plastique.
Et puis viennent ces mots qui, ” malgré lui ” , le submergent, l’accablent.
Des mots qui disent sa peur de l’immobile, de ce qui pourrait le figer, le cataloguer.
Des mots qui disent sa quête frénétique de ce qui enfin le rassemblera.

– Philippe Cloes choisit de  ” marcher large ” …

Ses enjambées aux antipodes ne l’éloignent – elles pas justement de ce qu’il cherche avec nostalgie profonde ?

On ressort essoufflé de cette soirée poétique, un peu comme si on avait parcouru un marathon où chaque pas, chaque mots nous mèe, tout comme l’auteur peut-être, un peu plus proche de nous-mêmes…

” Quand il ne restera que nos jambes ” …il nous restera le goût d’explorer encore d’autres chemins…