sa
Génitif non-possessif
Lève la tête, lève les yeux.
J'ai mis mes mains sur tes épaules,
tes bras glissent au long de toi;
ne fige pas ce beau sourire;
soyons graves comme jadis,
dans la chambre étroite et profonde
où la chaleur était poussière.
Songe que nous sommes hier,
songe que nous sommes demain,
qu'entre nos corps gît le présent,
que chaque pas le diminue,
qu'un linge ôté, c'est l'avenir
qui s'effrite à ta gorge nue...
Dans le cas de Benoît Braun, il faut savoir lire au-délà des pirouettes, des gymnastiques, des exercices verbaux, tels qu'on peut les trouver chez ses prédécesseurs, Jean Pellerin, Paul-Jean Toulet ou Jean Cocteau. Cette belle et virtuose désinvolture cache un sentiment de précarité, qui apparaît au détour d'une politesse ou d'un air de fête à la Watteau. La perfection formelle met de la pudeur dans une matière où, révérence parler, rien n'est plus poignant que l'art de farder ses blessures. Ce genre de dandysme est aujourd'hui démodé. Benoît Braun sait le faire revivre, douloureux et souriant.
Editions Traces, Bruxelles "La poésie francophone de Belgique (1903-1926)