sa BIELIAVSKY Tatiana - Maison de la poésie et de la langue française de Namur

BIELIAVSKY Tatiana

Portrait de BIELIAVSKY Tatiana

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Biographie

Née à Bruxelles, à la veille de la seconde guerre mondiale, Tatiana Bieliavsky est issue d’une famille d’intellectuels russes déracinés par la révolution. Depuis sa plus tendre enfance, elle s’est régulièrement produite dans des groupes russes de théâtre, danse, chant où dans sa langue maternelle, elle a interprété les oeuvres d’auteurs classiques tels que Anton Tchekhov, Alexandre Pouchkine, Michail Lermontov, Nadejda Teffi… Formée à l’École du Théâtre belge, elle obtient en 1978 un diplôme d’Art dramatique qui la pousse, pendant de longues années, sur les planches du théâtre francophone du pays. Aujourd’hui, l’écriture fait courir sa plume sur quantité de pages blanches. La poésie, elle en a fait sa planche de salut!

Bibliographie

  • Rythmes, Éditions Baudelaire, Lyon, 2010.

Textes

Sibérie   À travers la vitre du train, Plaqué sur le carreau, Le nez ! Jamais ne les avait tant vus Par centaines et centaines, Défilements de bouleaux et sapins alignés S’embrassant à s’étouffer Dans le vent permanent des plateaux herbacés, S’alignant sans fin dans les campagnes boisées, Traversées par des chemins touffus, Parcourant plaines marécageuses.     Régions montagneuses aux parures féeriques, Bois aux robes argentées-métalliques, À chasubles de velours caressants, Arbres vacillant en rythmes parfaits Rappelant les eaux apaisantes d’un lac, D’une rivière aux vaguelettes chouinantes.   Nez plaqué sur le carreau ! Défilez “zecs” sibériens Malheureux sacrifiés Au milieu du pays de la férocité Par la seule volonté du dictateur Complètement cinglé, Alors que le monde entier Percevait les cris désespérés de vos voix apeurées, Mais… personne pour les entendre Au travers d’un carreau barbouillé.   Vasques dégorgeantes d’humus, Êtes-vous les déchets de ces pertes humaines ? Plaines aux fleurs sauvages éparpillées Aux jaunes et bleus insolents, Êtes-vous le reste des cendres du condamné ? Bourreaux, où sont les urnes ? Salauds !   Sapins, bouleaux, Garants, gardiens de ces tombes invisibles, Recouvrez du manteau de votre beauté Le boulot salopé du satané, Crime dépassant l’entente, Injustice organisée, Puant ce sol entaché du sang du passé Dont aujourd’hui, il faut parler.   Arbres aux racines puissantes, Recouvrez de votre sciure bienfaisante Les aïeuls malmenés, Retenez aux coeurs de vos forêts, Les secrets de ces hommes avides de liberté. Durant les hivers arides, Balayez le travail de la main assassine. Bouleaux, sapins sibériens Aux creux des vallées chagrines, D’où émerge un siècle de souffrance, Serrez-vous à étouffer, arbres adorés Témoins de tant d’horreur.   Sous l’ombre de vos couronnes, Sachez qu’au travers du carreau cassé, Incrustées sur ce sol sacré, Des centaines et des centaines, De gerbes gisent Recouvrant les cercueils d’un demi-million De morts-vivant qui hurlent À travers la vitre du train sifflant Arrestations ! Arrestations ! De la patrie, trahisons ! Les emmenant en steppe qui gronde Où respire la Sibérie profonde D’où personne ne revient !     Tandis que repassent devant le train Aux abords des campagnes, Par centaines et centaines, Des maisons bien rangées, Des bouleaux et sapins alignés. Pleines d’espoir, Des mains tendues se rejoignent Mais il est trop tard ! À perte de vue, regorgent du sol blessé Les coups du couard incriminé !

Commentaires

Rythmes, Éditions Baudelaire, Lyon, 2010.

Écriture vive pour ce recueil de vers qui véhiculent le tragique de l’existence, de la naissance à la mort, chantés au travers des événements d’une vie.

L’auteur y relate inévitablement son histoire intime, son regard personnel à saisir la vie, enfin y aborde l’histoire de tout un chacun.

« Rythmes » vous entraîne dans la poésie libre, narrée sous forme de « Nouvelles », de « Tableaux ».

Vers qui glissés dans l’oreille étonnent, dérangent, rendent conscient, évoquent l’absurde, arrangent la pensée de l’interlocuteur abordé.

Évitement du « Je «  souvent volontaire, laissant le passage à l’ »Autre » recherchant sa propre vérité, son identité.

Pas à pas, une sorte de confession se dévoile dans le thème du poème en prose qui vous engloutit entièrement dans la réflexion, faisant appel à votre besoin du moment, à votre inspiration, vous amenant enfin, vers la sortie de votre choix.

« Rythmes » révèle la poésie que tous nous portons en nous : les mots envahissent le coeur, se transportent au centre de l’âme. Images, rêves, sentiments constituent l’élément principal de sa texture qui ne demande qu’à être explorée. Le but ultime de l’auteur est d’atteindre le beau, la pureté, porter un regard juste sur son propre soi, sur la société. « Rythmes » refuges de liberté, de paix, de lumière, la poétesse y célèbre la Vie, sa Vie qu’elle tente de partager avec ceux qui voudront bien la lire, la découvrir, l’aimer.