sa PLISNIER Charles - Maison de la poésie et de la langue française de Namur

PLISNIER Charles

Biographie

Charles Plisnier (Ghlin 1896-1952)

Plisnier se lance corps et âme dans la littérature après avoir été exclu du parti communiste en 1928 pour « déviation trotskyste ». Toute son œuvre est traversée de personnages militants, les uns aveuglés par la foi politique, les autres connaissant la désillusion abyssale. Son cheminement intérieur étant aussi religieux, il prône une religion non dogmatique.

Il avait commencé l’expérience de l’écriture et du militantisme en fondant, dès 1919, une revue littéraire et politique ; « Haro » et, plus tard, un hebdomadaire résolument engagé : « Communisme ».

Son ouvrage le plus célèbre est un recueil de nouvelles Faux passeports, première œuvre non française à recevoir le prix Goncourt en 1937. Cette année-là également, Charles Plisnier est reçu à l’Académie de langue et de littérature françaises.

C’est un écrivain prolixe. Il a laissé plusieurs romans – fleuve comptant chacun plusieurs volumes : Mariages (1936), Meurtres (1931-1941), Mères (1946-1948).

Si l’on ajoute une pièce de théâtre, une série de plaquettes de poésie et plusieurs essais, on réunit près d’une quarantaine de titres.

Bibliographie

  • Voix entendues, Mons, Société nouvelle, 1913.
  • L’enfant qui fut déçu, Bruxelles, Flamberge, 1913.
  • Eve aux sept visages, Bruxelles, L’Aurore, 1919.
  • La Guerre des hommes, Paris, Maison française d’éditions, 1920.
  • Elégies sans les anges, H.C., 1922.
  • Prière aux mains coupées, Paris, les Ecrivais réunis, 1931.
  • Histoire sainte, Paris, Le Tambourin, 1931.
  • L’Enfant aux stigmates, Bruxelles, Labor, 1933.
  • Fertilité du désert, Bruxelles, Cahier du journal des Poètes, 1933.
  • Odes pour retrouver des hommes, Bruxelles, Eglantine, 1935.
  • Babel, Bruxelles, Cahier du journal des Poètes, 1935.
  • Périple, Bruxelles, Labor, 1936.
  • Sel de la terre, Bruxelles, Cahier du journal des Poètes, 1936.
  • Sacre, Bruxelles, Cahiers des Poètes Catholiques, 1938.
  • Testament, Beyrouth, Revue Phenicia, 1939.
  • Ave Genitrix, Fribourg, Librairie de l’Université, 1943.
  • Choix de poèmes, Paris, Ed., Universitaires, 1957.
  • Oeuvre poétique, Paris-Bruxelles, Nahtan-Labor, 1979.
  • Entre l’évangile et la révolution, Bruxelles, Labor, 1988.
  • Oeuvres poétiques complètes, Tome 3, Académie Royale de langue et de littérature françaises de Belgique, 2000.

Textes

J’ai trop aimé le mot navire

J’ai trop aimé le mot navie.

On ne guérit pas de ce mal.

Les ballots d’Insulinde les barriques du Natal
cette odeur de riche et mouvant capital.
Les docks couverts rendent un soir d’Iliade.
Les pieds son là près des anneaux
au seuil des entrepôts et des arsenaux.
Il passe toujour un nègre qui s’embarque.
Les cales sèches où luisent
les panses d’acier et de minimum,
les coups de marteaux les chants désordonnés des hommes.
La résonance de la mer proche
où les paquets de sel du vent
frappent les hommes qui s’embauchent.
J’aurais été quelqu’un près des chambres de chauffe
qui compare l’aiguille du manomètre à son coeur.
J’aurais été quelqu’un dans les cordages

qui n’a plus de pensée ni d’âge
mais seulement un coprs traverssé de nuages.
J’aurais été quelqu’un de sage.
Brooklyn.  La Corne d’Or.  Yokohama.
Je feuillète des Etudes Economiques
des albums d’images.
La vieille chanson berce le coeur des petits hommes.
Ils vont les mains dans les poches au bord des eaux.
Il y a derrière eux la maison où sont
les dossiers et les tomes
au chaud.

Il y a ceux d’ici dont le visage est beau.

On reste là les pieds près des anneaux.

Commentaires

Un des grands romanciers de la gauche trahie, dans l’immédiate avant-guerre, proche par plusieurs aspects aussi bien de Jean-Richard Bloch que de Jean Cassou, de Paul Nizan que de Roger Vaillant, Charles Plisnier ne semble pas avoir attiré suffisamment l’attention sur ses poèmes. Il en a écrit de véhéments et de robustes, qui traduisent fort bien son évolution, de militant de gauche qui va se tourner vers le christianisme. Qu’il parle de revendication sociale, d’amour ou de foi, il est un superbe excitateur et un homme de passion, qu’on peut rapprocher d’un André Salmon quand il parle de la Révolution Russe, ou d’Aragon, en d’autres circonstances. En plus de ses engouements lyriques, on goûtera ses poèmes en prose, parmi les plus denses de son temps. À ce genre difficile et qui vieillit vite, il a donné ses titres de noblesse nerveuse.

La poésie francophone de Belgique, Éditions Traces Bruxelles, 1987.