MELOT DU DY Robert

Biographie

Mélot du Dy, né à Bruxelles en 1891, mort à Rixensart en 1956, fut un poète et un prosateur estimé. Trente ans après son décès, Jean Tordeur souligne dans une de ses chroniques de L’air des lettres, publiée en juillet 1987 : « Mélot du Dy, qui fut l’un de nos poètes les plus originaux de la première moitié de ce siècle, [est] très injustement oublié aujourd’hui » et il ajoute « Est-il vain d’espérer […] la résolution de rééditer un poète dont la rare maîtrise de la langue, le charme vivace, la retenue pudique, la légèreté cristalline nimbée d’émotion, surprendraient heureusement et raviraient sans doute maints nouveaux lecteurs ? »

C’est à cette question, qui comporte au départ des arguments de grande justesse, qu’il s’agit de répondre. Outre les qualités majeures déjà énoncées, Mélot du Dy fut un amoureux de la vie, de la femme, de la poésie. C’est là, peut-être, sa sainte trinité. L’amour se déclare dès sa jeunesse, dans L’Idole portative en 1919 (premier recueil dont la trace sera gardée dans le Choix de poésies que le poète a composé avant sa mort et qui parut aux Éditions Universitaires à Paris en 1960, à l’initiative de Roger Bodart) ; il y réclame « le doux rêve d’être deux entre quatre murs », mais dans le couple, la femme est une femme et non la femme.

Bibliographie

  • Printemps, Bruxelles, Larcier, 1910
  • Butin fragile, Id., 1912
  • L’Idole portative, Bruxelles, Cahiers Indépendants, 1919
  • Le Sot l’y laisse, Bruxelles, Expansion Belge, 1920
  • Mythologies, Id., 1921
  • Diableries, Id., 1922
  • Hommeries, Paris, N.R.F., 1924
  • Amours, Id., 1929
  • A l’amie dormante, Paris, Denoël, 1935
  • Signes de vie, Id., 1936
  • Lucile, Bruxelles, Cahiers du Journal des Poètes, 1936
  • Jeu d’Ombres, Paris, Denoël, 1937
  • Choix de poésies, Paris, Ed. Universitaires, 1960
  • Les rimes des réthoriqueurs, principes et exemples nouveaux, Musumeci Editeur, 1987.

Textes

Souffrir seul est divin

Souffrir seul est divin; souffir à deux, plus sombre!
Un pénible miroir ne reflète qu’une ombre
Quand ma douleur se voit dans la douleur d’autrui.
Ce visage embué qui ressemble à l’ennui,
Ce n’est plus toi, ma fille en larmes, ni moi-même:
Laisse-moi souffrir seul encore; et si je t’aime
Plus qu’il n’est défendu sans mystère d’aimer,
Laisse-moi de ma seule image me blâmer,
Défaire,déjouer cet Homme sans mystère
Qui de sa créature épris, de se chimère

Se sachant à la fois la perdre et l’obtenir,
Se plaît (se mirant dans tes pleurs) à te punir.

Commentaires

Robert Mélot du Dy est le parfait artisan d’un genre mineur et agréable, en vogue dans les années 20 et 30, où pour s’opposer au surréalisme, les poètes se rangeaient soit derrière Paul Valéry, soit derrière Jean Cocteau.  Mélot du Dy préfère le voisinage de l’école fantaisiste, aujourd’hui négligée.  S’il n’a pas la densité de Paul-Jean Toulet ni la verve goguenarde _ un peu trop _ de Tristan Derême, il se compare favorablement au gentil Jean-Marc Bernard et au doux Jean Pellerin.  On le relit avec plaisir et on trouve que ses poèmes ont l’élégance des objets art-déco.  A bien chercher, on peut aussi voir sous la virtuosité de cet esthère une émotion toute tremblante.

“La poésie francophone de Belgique”. Bruxelles : Traces, 1987.