HOEX Corinne

Biographie

Corinne Hoex est née à Uccle (Bruxelles), le 13 juillet 1946. Licenciée en Histoire de l’Art et Archéologie de l’Université Libre de Bruxelles, elle a travaillé comme enseignante, documentaliste et chargée de recherches. Elle est l’auteur de plusieurs études relatives aux arts et traditions populaires. Depuis une quinzaine d’années, elle se consacre à l’écriture de fictions. Elle a publié principalement des romans et de la poésie.

Bibliographie

ROMANS

  • Le Grand Menu, L’Olivier, 2001, réédition Les Impressions Nouvelles, 2010.
  • Ma Robe n’est pas froissée, Les Impressions Nouvelles, 2008.
  • Décidément je t’assassine, Les Impressions Nouvelles, 2010.
  • Le Ravissement des femmes, Grasset, 2012.
  • Valets de nuit, Les Impressions Nouvelles, 2015.

FANTAISIE EN PROSE

  • Décollations, L’Âge d’Homme, 2014.

POÉSIE

  • Cendres, Esperluète, 2002 (avec des encres de Bernard Villers).
  • Contre Jour, Le Cormier, 2009 (avec des vignettes de Frank Vantournhout).
  • La Nuit, la mer, Didier Devillez, 2009 (avec des encres de Camille De Taeye).
  • Juin, Le Cormier, 2011.
  • N.Y., La Margeride, 2011 (avec des variations typographiques de Robert Lobet).
  • Rouge au bord du fleuve, Bruno Doucey, 2012.
  • Le Murmure de la terre, La Margeride, 2012 (avec des gravures sur bois de Robert Lobet).
  • L’Autre Côté de l’ombre, Tétras Lyre, 2012 (avec des fusains d’Alexandre Hollan).
  • Celles d’avant, Le Cormier, 2013.
  • Matin, La Margeride, 2013 (avec des encres de Robert Lobet).
  • Jadis vivait ici, L’Âge d’Homme, 2015.
  • Les Mots arrachés, Tétras Lyre, 2015 (avec des gravures de Véronique Goossens).
  • Oripeaux, La Margeride, 2015 (avec des estampes de Robert Lobet).

ŒUVRES TRADUITES

  • Ma robe n’est pas froissée, traduction bulgare par Todorka Mineva, Éditions Altera, 2014.
  • Le Grand Menu, traduction bulgare par Todorka Mineva, Éditions SONM, Collection Se souvenir au féminin, 2015.
  • Cendres, traduction russe par Ivan Riabtchii, Slovo Prosvity, n°22, juin 2010, et traduction bulgare par Krassimir Kavaldjiev, Biblioskop, 2012.
  • Contre Jour, traduction bulgare par Krassimir Kavaldjiev, Panorama (revue éditée par l’Union des traducteurs bulgares), n°5, 2011.
  • L’Autre Côté de l’ombre, traduction russe par Ivan Riabtchii, préface par Ivan Riabtchii et Dmytro Tchystiak, Mova ta istoriya (almanach), Kiev, 2013.

PUBLICATIONS SCIENTIFIQUES

  • Saint Monon. Vie. Culte. Iconographie, Éditions Vaillant-Carmanne, Liège, 1972 (Extrait des Enquêtes du Musée de la Vie Wallonne, Tome XIII).
  • Enquête sur le culte et l’iconographie de sainte Brigide d’Irlande en Wallonie dans Document de Travail du Centre d’Etude des Arts, Traditions et Parlers Populaires, Institut de Sociologie de l’Université Libre de Bruxelles, 1973.
  • Les Pèlerinages de sainte Brigide en Wallonie. Analyse systématique dans Document de Travail du Centre d’Etude des Arts, Traditions et Parlers populaires, Institut de Sociologie de l’Université Libre de Bruxelles, 1973.
  • Saint Walhère. Culte. Vie. Iconographie, Éditions Duculot, Collection Wallonie, Art et Histoire, Gembloux, 1974.
  • Nombreux articles sur les arts et traditions populaires publiés en revues, notamment dans L’Ethnie Française, revue de la Fondation Charles Plisnier.

LIVRES D’ARTISTES

  • La Mer, la nuit, Éditions Æncrages, 2008 (avec des aquarelles de Colette Deblé).
  • Les Nageuses, Cahiers de Peauésie de l’Adour, 2009 (avec des aquarelles de Colette Deblé).
  • L’Hirondelle, Fête du Livre d’artiste de Forcalquier, Association Forcalquier des Livres, octobre 2010.
  • Room Service, Livre pauvre, 2013 (collection Feuillets entre-bâillés, six exemplaires, avec des aquarelles de Roger Dewint).
  • Baisers d’escargot, Livre pauvre, 2013 (collection Médaillons, six exemplaires, avec des aquarelles de Roger Dewint).
  • Ma belle Amazonie. Songeries de crocodile, Livre pauvre, 2013 (collection Médaillons, trois exemplaires, avec des aquarelles de Roger Dewint).
  • Ma fiévreuse Amazonie. Délices de piranhas, Livre pauvre, 2013 (collection Médaillons, trois exemplaires, avec des aquarelles de Roger Dewint).
  • Ma songeuse Amazonie. Rêveries de lamantin, Livre pauvre, 2013 (collection Médaillons, trois exemplaires, avec des aquarelles de Roger Dewint).
  • Ma bondissante Amazonie. Taquineries de singes, Livre pauvre, 2013 (collection Médaillons, trois exemplaires, avec des aquarelles de Roger Dewint).
  • Ma sombre Amazonie. Méfiances de toucan, Livre pauvre, 2013 (collection Médaillons, trois exemplaires, avec des aquarelles de Roger Dewint).
  • Ma troublante Amazonie. Tendresses de caméléon, Livre pauvre, 2013 (collection Médaillons, trois exemplaires, avec des aquarelles de Roger Dewint).
  • Ma fervente Amazonie. Sorcelleries de crapaud, Livre pauvre, 2014 (collection Médaillons, trois exemplaires, avec des aquarelles de Roger Dewint).
  • Ma frôleuse Amazonie. Voluptés d’anaconda, Livre pauvre, 2014 (collection Médaillons, trois exemplaires, avec des aquarelles de Roger Dewint).
  • Ma caressante Amazonie. Chatteries de jaguar, Livre pauvre, 2014 (collection Médaillons, trois exemplaires, avec des aquarelles de Roger Dewint).
  • Mon ombrageuse Amazonie. Énigmatiques crocodiles, Livre pauvre, 2014 (collection Médaillons, trois exemplaires, avec des aquarelles de Roger Dewint).
  • Mon enivrante Amazonie. Ivresses bourdonnantes, Livre pauvre, 2014 (collection Médaillons, trois exemplaires, avec des aquarelles de Roger Dewint).
  • Ma ténébreuse Amazonie. Mignardises de mygales, Livre pauvre, 2014 (collection Médaillons, trois exemplaires, avec des aquarelles de Roger Dewint).
  • Instruments éprouvés, Livre pauvre, 2014 (collection Médaillons, quatre exemplaires, avec des aquarelles de Roger Dewint).
  • Les Vraies Valeurs, Livre pauvre, 2015 (collection L’Âme et la danse, quatre exemplaires, avec des encres de Jacques Jauniaux).
  • La Belle Plume fait le bel oiseau, Livre pauvre, 2015 (collection L’Espace du dedans, quatre exemplaires, avec des gouaches de Jacques Riby).

ŒUVRES CINÉMATOGRAPHIQUES ET MUSICALES

  • Perspective, texte du court métrage DV réal. par Kris Carlier, 2003, 23’.
  • Cendres, livret de la composition pour chœur à deux voix mixtes, de Michel Fourgon, créée en 2006 par l’Ensemble vocal Mnémosyne (dir. Paul Delbeuck), 1’59”.
  • En décalage, textes du DVD réal. par Annick Blavier, Éditions La Trame, 2007.
  • Le Tracé s’envole, livret de la composition pour chœur et orchestre de Michel Fourgon, commandée par l’Orchestre Philarmonique de Liège, dans le cadre de son cinquantième anniversaire, et créée à Liège (Salle Philarmonique) le 10 juin 2011 par L’Orchestre Philarmonique de Liège (dir. Pascal Rophé) et le Chœur de Chambre de Namur (dir. Leonardo Garcia Alarcon), 15’08”.
  • Le Tracé s’envole, CD Michel Fourgon, Filigranes, Cypres Records, 2014.
  • Marguerite et Jeanne, texte du film de Claude François consacré au tableau de Théo Van Rysselberghe, Les Sœurs du peintre Schlobach, 2013, 5’.

OUVRAGES COLLECTIFS

  • L’Horizon de la mer dans Quatorze portraits d’horizon, Belgacom, Rapport annuel 2001 (avec des photos de Jean-Dominique Burton).
  • Nous sommes loin dans Compartiment auteurs, SNCB-Foire du Livre de Bruxelles, 2002.
  • Le Grand Menu dans Équivalences. Éros dans le texte, ISTI, 2003.
  • La Transparence du ciel et le silence de la terre dans Frontière, Éditions La Trame, 2003.
  • Des fourmis dans les jambes dans Démocratie, j’écris ton nom, Éditions Couleur Livres, 2004.
  • Les Grands Arbres dans Souvenirs de La Moutte, ACEMI, 2005.
  • La Jeune Fille dans La Visite est terminée, Éditions La Trame, 2006.
  • Dialogue et croissance, SNCB, Rapport annuel 2007.
  • Les Douceurs du jour dans Compartiment auteurs, SNCB-Foire du Livre de Bruxelles, 2008.
  • L’Île dans Écrivains du monde pour Haïti, Éditions du Banc d’Arguin, 2010.
  • Héger 69 dans ULB, une fiction vivante, ULB, 2010.
  • Bookby Brussels, L’Aventure d’un livre à Bruxelles, n°1, 2010.
  • Le monde appartient aux femmes, épisodes 2 et 7, Bela, février 2011.
  • Fil dans Dis-moi dix mots qui nous relient, Semaine de la langue française et de la Francophonie, mars 2011.
  • Chantiers, Centre culturel du Brabant wallon, automne 2011.
  • Baisers d’escargot dans exposition Escargots à gogo, Daily-Bul&C°, 27 janvier au 29 avril 2012.
  • Tango dans Métissage, Anthologie de l’Arbre à paroles, 2012.
  • Petite musique de nuit dans Petites musiques de nuit, Le Grand Miroir, La Renaissance du livre, 2012.
  • Le Bord du monde dans Bords de mondes. Martine Cornil, Maelström, 2012.
  • Cinq francs d’amour dans Jacques Stephen Alexis, Intersections, n°1, coédition CEC et Indications, numéro spécial, 2013.
  • Matin dans Momento Nudo, Anthologie de l’Arbre à paroles, 2013.
  • Pas grave dans Écrivains francophones de Belgique, numéro spécial de la revue Panorama, dirigé par Krassimir Kavaldjiev, traduction bulgare par Todorka Mineva, Bulgarie, 2013.
  • Jour, Les Midis de la Poésie, 2014.
  • Les Anges rouges dans Au cœur des arts, Anthologie du Printemps des Poètes, 2014.
  • Madame Gerstel dans Un jour une librairie. Les Licornes obliques, La Licorne, 2014.
  • La Nuit, Ce silence et Le Revers de la médaille dans La Poésie française de Belgique. Une lecture parmi d’autres, anthologie par Yves Namur, Recours au poème, 2015.

TEXTES LITTÉRAIRES EN REVUES

  • Un chromosome de différence dans Chemins de Traverse, bulletin trimestriel de l’ITAS (Institut Européen de Recherches Transpersonnelles et de Hautes Etudes en Sciences de l’Homme) et de l’ATB (Association Transpersonnelle Belge), n° 32, avril 1995.
  • Peut-être pour te voir dans Corps à corps, hors série, 1996.
  • Prions dans Marginales, n°241, printemps 2001.
  • Barbe et les feux de Dieu dans Marginales, n°244, hiver 2001.
  • Knapkoeken et knubbelkensvlaaien dans Marginales, n°247, automne 2002.
  • Room Service dans Je t’aime, question d’époque, Revue de l’Université de Bruxelles, 2002.
  • Dans le jardin dans Bon à Tirer, n°4, février 2002.
  • Des voiliers glissent en silence dans Marginales, n°252, hiver 2003.
  • Invitation dans Voulez-vous partir avec moi ?, Revue de l’Université de Bruxelles, 2003.
  • Les Peupliers dans Vu d’Ici, n°11, printemps 2003.
  • Le Repas froid dans Marginales, n°253, printemps 2004.
  • Je n’existais que par toi dans Bon à tirer, n°58, décembre 2006.
  • La Petite Musique de nuit dans Marginales, n°261, printemps 2006.
  • Inaccessible dans Marginales, n°262, été 2006.
  • Emmenez-moi au Walhalla dans Marginales, n°267, automne 2007.
  • Frondaisons dans Métaphysique de la mode, Revue de l’Université de Bruxelles, 2008.
  • Pas grave dans La Semaine Médicale, n°447, été 2008.
  • Wonderbra ! Wonderworld ! dans Marginales, n°270-271, été-automne 2008.
  • Le Temps et les perles dans Le Non-Dit, n°80-81, septembre 2008.
  • Un muscle dans Bon à tirer, n°97, décembre 2008.
  • La Visiteuse dans Bon à tirer, n°113, août 2009.
  • Faire saigner une pierre dans Marginales, n°274, hiver 2009.
  • Outremer dans Sources, 2010.
  • Nuit ouverte et L’inconnu dans L’Arbre à paroles, n°146, hiver 2009-2010.
  • Ravissez-moi ! dans Non, pas ce soir, n°1, mai 2010.
  • Instants de grâce, les tulipes dans Gaël, juin 2010.
  • Chanson du nez de la Débutante dans Marginales, n°276, automne 2010.
  • Les Douceurs du jour dans Bruxelles/Moscou, Meet, n°14, novembre 2010.
  • N.Y. dans Graine de Sable, n°8, décembre 2010.
  • Ressourcée et Rongeuse dans Femmes, je vous aime, Revue de l’Université de Bruxelles (revue Ah !), n° 11, décembre 2010.
  • Comme tartine et boterham dans Marginales, n°277, hiver 2010-2011.
  • La Petite Reine dans Marginales, n°279, été 2011.
  • Mon Amazonie dans Marginales, n°280, automne 2011.
  • L’Hirondelle dans Traversées, n°64, hiver 2011-2012.
  • Pas grave dans Marginales, n°283, été 2012.
  • Quand on aime, on ne compte pas dans Marginales, n°284, automne 2012.
  • Le Grisbi dans Marginales, n°285, hiver 2013.
  • La Sainte Famille dans Marginales, n°286, printemps 2013.
  • Qui es-tu ? dans Le Non-Dit, n°100, septembre 2013.
  • Le Géographe dans Marginales, n°287, automne 2013.
  • Ma deuxième langue dans Les Feuillets de corde, n°12, octobre-décembre 2013.
  • Le Commissaire Maigret dans Cahiers Simenon, n°27, 2013.
  • Les Hivers dans Marginales, n°288, printemps 2014.
  • La Pieuvre morte dans Nos Lettres, n°15, mars 2015.
  • Ombres chinoises dans Nos Lettres, n°16, juin 2015.
  • Les Petites Fouines dans Marginales, n°290, été 2015.

PRIX LITTÉRAIRES

Pour Le Grand Menu (L’Olivier, 2001, rééd. Les Impressions Nouvelles, 2010) :

  • Prix Littéraire 2001 des Amis des Bibliothèques de la Ville de Bruxelles,
  • Prix Littéraire Soroptimist 2002 de la Romancière Francophone,
  • Finaliste du Prix des Cinq Continents de la Francophonie 2001, du Prix Victor Rossel 2001, du Prix Rossel des Jeunes 2001 et du Prix des Lycéens 2003.

Pour Ma robe n’est pas froissée (Les Impressions Nouvelles, 2008) :

  • Prix Indications du Jeune Critique 2008,
  • Prix Emma Martin 2008 de l’Association des Écrivains Belges de Langue Française,
  • Prix Gauchez-Philippot 2010,
  • Finaliste du Prix des Cinq Continents de la Francophonie 2008, du Prix Littéraire 2008 du Parlement de la Communauté française de Belgique, du Prix Marcel Thiry 2008, du Prix Victor Rossel 2008, du Prix Rossel des Jeunes 2008 et du Prix des Lycéens 2009.

Pour Décidément je t’assassine (Les Impressions Nouvelles, 2010) :

  • Prix Marcel Thiry 2010,
  • Finaliste du Prix Emile Bernheim du roman 2010, du Prix Rossel des Jeunes 2010 et du Prix des Lycéens 2011.

Pour Contre Jour (Le Cormier, 2009) :

  • Prix Delaby-Mourmaux 2010 de l’Association des Écrivains Belges de Langue Française,
  • Finaliste du Prix Marcel Thiry 2009.

Pour Rouge au bord du fleuve (Bruno Doucey, 2012) :

  • Finaliste du Prix PoésYvelines des collégiens 2012-2013.

Pour l’ensemble de son œuvre :

  • Prix Félix Denayer 2012 de l’Académie Royale de Langue et de Littérature Françaises de Belgique.

Textes

Il neige.
Des flocons frôlent le monde.
Il neige
comme on plonge dans le noir.

Le murmure
de la neige
qui tombe sur la neige
et éclôt en fondant.

Un instant
le désir
de voler à rebours.
La terreur de la boue.

La neige.
Ne pas la saisir.
Ou la perdre.

Brûlure
de braises
blanches.
Il suffit d’un flocon
au visage

Extraits de Cendres

*

aujourd’hui
encore
tu es assis
devant la fenêtre
dos au jardin
à contre-jour

tout l’après-midi
dans la nuit
des tentures

creusé
comme une flûte
pour le vent
et si pesant
dans ton fauteuil

tu es devenu
le visage
du chapiteau
de Tournus
le démon de pierre
qui te ressemble

plus rien
n’obéit
au besoin
de bruit

Extraits de Contre Jour

À feuilleter virtuellement ici.

Commentaires

EXTRAITS DE PRESSE
Archéologue de formation, Corinne Hoex devait, lors de ses stages de fouille, manier la truelle comme le chirurgien son scalpel : avec virtuosité et tout en délicatesse pour ne pas érafler le tesson belgo-romain, non sans une mâle vigueur pour dégager les racines. (…) De nos jours, ce genre de parcours étant devenu un lieu commun de l’industrie du livre féminin, les librairies regorgent de ces autofictions, pitoyables thérapies d’où suinte l’ennui. Grâces en soient rendues à Vénus Victrix, Corinne Hoex est poète jusqu’au bout des ongles —qu’elle a bien acérés. Chez cet écrivain, nulle complaisance mais la lucidité sans faille de l’analyste, qui fait songer au Mars de F. Zorn. Quant à la langue, ciselée et ponctuée avec grâce, elle transcrit de façon percutante l’enfer quotidien d’une héroïne couturée de cicatrices. Corinne Hoex écrit comme on sabre, avec une rage froide et ce qu’il faut de saine jubilation. Bref, elle s’impose avec une grâce qui balaie le désespoir.
Christopher Gérard, Quolibets. Journal de lectures, Éditions L’Âge d’homme, 2013.
Une œuvre romanesque qui vient d’atteindre un nouveau stade  dans sa maturation, un travail poétique qui lui aussi s’affirme dans l’originalité et la maîtrise : sur ces deux plans, Corinne Hoex s’affirme comme une figure  majeure de notre littérature.
Après plusieurs récits qui relevaient d’une sorte d’aggiornamento familial, et qui avaient  été inaugurés, il y a douze ans, avec Le grand menu dont l’évidente maîtrise  n’avait échappé à l’attention de personne, ont suivi deux récits qui poursuivent la chronique presque clinique de ce qui tient de la psychose collective, Ma robe n’est pas froissée et Décidément je t’assassine, constituant ainsi un triptyque d’une rare homogénéité.
La parution, l’an passé, du Ravissement des femmes (chez Grasset), a ouvert une nouvelle voie dans une œuvre placée sous le signe de la lucidité sans concessions. Ce roman dont l’acidité satirique n’est pas absente tient de la description de mœurs et du constat d’un malaise idéologique dans notre société désenchantée. Il préfigure d’autres développements dans une œuvre dont l’épanouissement donne plaisir à voir, y compris sur le plan poétique. La parution toute récente, au Cormier, du recueil Celles d’avant vient de l’illustrer.
Jacques De Decker, Site de l’Académie Royale de Langue et de Littérature Françaises de Belgique, à propos de la remise (le 16 mars 2013) du Prix Félix Denayer 2012.
1.            Le Grand Menu
Roman
Éditions de L’Olivier, 2001
Éditions Les Impressions Nouvelles, 2010
127 pages
Prix Littéraire des Amis des Bibliothèques de la Ville de Bruxelles 2001
Prix  Soroptimist de la Romancière Francophone 2002
Prix des Lycéens 2003 de la Magie des mots
Finaliste du Prix Rossel 2001, du Prix Rossel des Jeunes 2001, du Prix des Cinq Continents de la Francophonie 2001  
Une enfance du malaise, de l’enfouissement obligé. Tout cela rendu sans apitoiement, avec une remarquable rigueur, sans jugement, car la chose observée (ainsi des discours de la mère) se juge d’elle-même. Voilà qui nous change des attendrissements faciles sur l’enfance. Un roman captivant par son inconfort moral autant que par la sûreté de son écriture.
Jacques Crickillon,Lectures, novembre 2001
Tex Avery débarque chez Folcoche. Corinne Hoex écrit sur le ton sage de la gamine en jupe écossaise, socquettes et souliers vernis, qui aurait caché sous ses plis un bâton de dynamite. Tex Avery débarque chez Folcoche. Elle énonce, avec la docilité d’enfant bien élevée, ce qui se donne à voir dans cette famille. Acide et féroce. Ici pas de taloche ou presque, c’est à coup d’une effarante normalité que la bonne bourgeoisie belge de l’Expo 58 tue dans l’œuf. La narratrice a réchappé à l’asphyxie mentale, à la coupe au page de sa personnalité, et à sa bobine encadrée dans une assiette en étain posée sur le feu ouvert en cuivre repoussé. Mais pareil abrutissement se paye un jour. Voilà qui est fait et bien fait. Pas de grand déballage, juste un menu bien dosé, terrible, drôle dès lors qu’on a la certitude que cette petite fille hurlant en silence s’échappera un jour, attendra son heure pour aimer tout ce que détestaient ses parents et que jamais elle ne portera de mules à pompons de cygne.
Sophie Creuz, L’Écho, 3 avril 2001
La naissance racontée comme un massacre. Les premiers regards vécus comme un tremblement de terre. Les balbutiements dans la vie qui s’apparentent à de la stratégie guerrière. C’est la vie racontée par une petite fille. L’innocence n’existe pas, le bonheur n’a pas de nom. Il y a juste la cruauté et puis la douleur, inexplicable mais bien réelle.
Ce premier roman de Corinne Hoex, qui s’avère experte en exploration humaine – âmes et tripes – est un coup de poing au ventre. Un livre de cri, de pleurs, de rage, de solitude. Un livre incandescent écrit par le diable. Chaque mot résonne comme une explosion, chaque phrase porte la torture de n’être pas aimée.
Martine Laval, Télérama, 3 mars 2001
Un magnifique premier roman à se glacer les sangs, celui qui résonne sous les tempes de cette enfant, seule au beau milieu de ses parents, à appréhender le monde au travers de leur seul regard, à vivre au rythme souverain de leur impérialisme alimentaire, vestimentaire ou éducatif. À travers la malsaine dynamique d’un couple d’adultes narcissiques, égoïstes et cruels, Corinne Hoex dresse un terrible portrait de famille où se résume, entre autres, tout le désarroi des enfants uniques.
Sandrine Mossiat, Kiosque, mars 2001
***
2.            Cendres
Poésie
Dessins de Bernard Villers
Éditions Espeluète, 2002
Traduction ukrainienne par Ivan Riabtchii, Slovo Prosvity, n°22, juin 2010.
Traduction bulgare par Krassimir Kavaldjiev, Biblioskop, 2012.
Bien sûr, nous le savions déjà après Le Grand Menu, Corinne Hoex est un grand écrivain, l’un de nos meilleurs écrivains. Dans ses poèmes que voici, se révèle une remarquable économie de moyens : des mots rares — non pas dans le sens de « recherchés », mais de « peu nombreux », soigneusement pesés, soigneusement choisis. Et chacun porte son poids de matérialité, son poids d’humain, et les deux, insensiblement, insidieusement, se mêlent et se confondent. Là où d’autres ont besoin de dix pages ou de cinq recueils, Corinne Hoex réunit en quelques vers, comme au creux de deux mains tendues, la neige, la pluie, la lune, l’amour, la mort, l’absence… Et ce qui vient d’être dit aussitôt s’efface, sous les dessins de Bernard Villers. Ainsi en va-t-il de notre passage, et de ses traces.
Le murmure/ de la neige/ qui tombe sur la neige/ et éclôt en fondant (…) Un jour/ je me retourne/ et il n’y a personne./ Quelqu’un s’est éloigné/ qui marchait/ près de moi.
Des cristaux de la poésie la plus pure, sans recherche, sans afféterie : les mots dans toute leur nudité, notre destin d’hommes en sa simplicité première.
Joseph Bodson, Le Reflet de chez nous, n°398, septembre 2002
Cendres, cosigné Corinne Hoex (auteure du remarqué Grand Menu) et Bernard Villers, peintre, sérigraphe, éditeur. On retrouve la poétique écriture de Corinne Hoex dans sa forme la plus nue. Sur chaque page, quelques lignes qui trouvent leur écho, presque simultané, dans les traces de Bernard Villers. Mot et graphisme se soutiennent, se répondent en une musique du verbe et de l’œil.
Ella, Marie Claire, mai 2002 
Quelques mois après nous avoir offert Le Grand Menu, qui fit sensation, Corinne Hoex nous revient avec une poignée de poèmes intitulée Cendres. C’est d’une légèreté et d’une gravité confondantes. Cela s’ouvre au cours d’un hiver où chaque flocon de neige aurait de l’importance. Ne laissant qu’avec le temps la cendre retomber. Celle d’un être aimé. On ne saura jamais qui. Un compagnon, un frère ? Cela pourrait être un père. On ne sait. Quelle importance ?
Est-ce cynique, s’interroge Marie-Claire Blais, de vouloir l’accomplissement d’une danse entre tous ces êtres séparés qu’une même crainte unit ? Et Corinne Hoex de répondre : Là où il ne s’agit plus / de gagner / ou de perdre / là / je sais / que nous sommes ensemble.
Pierre Mertens,Le Soir, 13 mars 2002 (extrait)
***
3.            Ma robe n’est pas froissée
Roman
Éditions Les Impressions Nouvelles, 2008
111 pages
Prix Emma Martin 2008
Prix Indications du Jeune Critique 2008
Prix des lycéens 2009 du Roman dont on ne sort pas indemne
Prix Gauchez-Philippot 2010
Finaliste du Prix Rossel, du Prix Rossel des Jeunes, du Prix Marcel Thiry, du Prix du Parlement et du Prix des Cinq Continents de la Francophonie
Corinne Hoex est un de nos plus grands écrivains et il suffit, pour s’en convaincre, de lire son époustouflant petit ouvrage intitulé Ma robe n’est pas froissée, paru l’année dernière aux Impressions Nouvelles à Bruxelles. En trois parties distinctes, elle y fait le récit, sur un ton acéré et badin, des violences subies au quotidien par une petite fille devenant grande (…). Le style de l’auteur, à mi-chemin entre le détachement de l’étranger camusien et l’ironie flaubertienne, s’épanouit en flèches du Parthe décochées à la fin des chapitres tenant eux-mêmes en quelques lignes. (…) Cette brièveté de forme n’exclut en rien l’ampleur des constats et la profondeur de l’effroi qu’ils suscitent. 
Bernard Delcord, Lire est un plaisir, Homelit (Radio Nostalgie) et Livre de bord (Liberty TV) octobre 2009
Corinne Hoex (…) y fait, de ses souvenirs, une oeuvre. Et de la progression de ses images, une tragédie. Antique, mine de rien, avec les scènes taillées au scalpel des théâtres grecs. Tout y est, la mort et l’amour, et l’aventure qui consiste à les reconnaître du même temps qu’on les vit. Quand la vie est déjà la mort. Quand le quotidien sent déjà l’éternel recommencement.
Luc Norin, La Libre Belgique, 2 juin 2009
En des phrases courtes, par petites touches, l’auteur nous plonge dans le drame des enfants non voulus, niés. Des scènes bouleversantes, où l’on sent que cette douleur ne s’éteindra jamais. Une mère indifférente, un père cynique. Et la houle de la mer du Nord en seul compagnonnage.
Nicole Debarre, Le Carnet et les Instants, février-mars 2009
Des phrases courtes, factuelles, désespérées, d’une implacable sobriété. (…) L’auteur décortique, dissèque les ambiguïtés des personnages. (…) Un style dépouillé, une narration fragmentée, ramènent le tragique à un constat banal et ne le rendent que davantage poignant.
Dominique Aguessy, La Revue générale, n°10, octobre 2008 & Nos Lettres, n°11, novembre 2008
Corinne Hoex, c’est une voix, une voix qui écrit, une voix qui parle, une voix qui choisit les mots comme on choisit une épice ou un parfum. Corinne Hoex c’est une attention de chaque instant à ce que les mots qu’elle choisit expriment exactement l’émotion ressentie. Corinne Hoex c’est une orfèvre qui pèse la sonorité de la phrase sur une balance dont les plateaux sont la poésie et la vérité.
Edmond Morrel, La Semaine médicale, n°447, 26 juin 2008
Ce serait abusif de dire qu’on lit Corinne Hoex avec plaisir. On la lit avec effroi (…). Sa marque de fabrique, c’est, à l’instar des tragiques grecs, d’inspirer la terreur et la pitié. Pourtant, ici, pas un mot plus haut que l’autre. (…) Tout est précis, mesuré, glacé et silencieux. Ce qu’elle nous peint, ce sont des situations de domination, comme beaucoup d’enfants en éprouvent, dans le silence imposé, dans la prétention effroyable à la normalité de l’obéissance, la fascination pour le maître, le parent qui ordonne, qui, en toute bonne conscience, impose sa loi arbitraire et fasciste.
Henri Raczymow, Regards, juin 2008
Corinne Hoex le dit elle-même à la page 98 de son terrifiant récit : ce n’est pas un conte de fées. Le décor a pourtant le charme un peu tarte d’un Martine à la plage : les années soixante, la mer, une grand maison, une famille bourgeoise. Mais, si les premières pages sont belles et tristes, la suite sera un cauchemar. Pur et simple. (…) Corinne Hoex écrit peu mais elle écrit fort et profond. Corinne Hoex n’écrit pas long, mais elle écrit essentiel. Un peu comme si sa vie en dépendait.
Thomas Gunzig, Elle Belgique, juin 2008
Roman étonnant que ce second opus de Corinne Hoex. D’une sobriété exemplaire, qui n’en accentue que davantage les forces, la dureté, la violence. (…) Un livre court, mais qu’il faut prendre le temps de lire. Pour savourer l’écriture et pour percevoir, sous l’apparence lisse d’une robe sage, les images terribles et les tourments des relations humaines – sans lesquelles, cependant, nous ne serions que des pierres.
Vincent Engel, Victoire, 3 mai 2008
Avec ses mots à elle, Corinne Hoex découpe le gigot du dimanche au couteau électrique. Que reste-t-il de tout cela ? Rien, même pas une vieille photo de sa jeunesse. Ce petit livre cruel n’incline pas à l’optimisme. Il est implacable. Comme un film très court. Et qui pourtant n’en finit pas.
François Cérésa, Le Figaro Madame, 9 février 2008
Précise et d’autant plus accablante, la phrase est disposée à l’équerre, taillée au cordeau, sans aucune faute de goût : un habit de lumière pour raconter le plus obscur. Du Bazin pétrifiant. Les fruits de Ma robe n’est pas froissée justifient les promesses des fleurs de Cendres (Esperluète Éditions), des poèmes superbement épurés. On n’ose lâcher ce récit âpre, contondant, lacéré, tout d’amertume et de charme vénéneux, cette écriture qui frôle l’échine et lui arrache des tressaillements troubles.
Marc-Émile Baronheid, Elle Belgique, février 2008
Corinne Hoex, dans Ma robe n’est pas froissée, formule la crudité sans pardon de l’éveil à l’amour lorsqu’il est dévasté. Viol ordinaire. Découverte de soi par-delà le châtiment d’exister. Rouge enfer de la haine puérile. « Sans pardon » ? Ce n’est pas sûr. Car une secrète compassion s’insinue au tréfonds de cette partition pourtant implacable.
Pierre Mertens, Le Soir, 11 janvier 2008
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4.            Contre Jour
 
Poésie
Vignettes de Frank Vantournhout
Éditions Le Cormier, 2009
16 x 16 cm
64 pages
Prix Delaby-Mourmaux 2010 de l’Association des Écrivains Belges de Langue Française
Finaliste du Prix Marcel Thiry 2009
Traduction bulgare par Krassimir Kavaldjiev, revue Panorama, Union des traducteurs bulgares, n°5, 2011
Procédant par touches de noir, de blanc et de couleurs, cette poésie est limpide et lumineuse. Il ne faut pas glisser trop vite sur ces vers apparemment simples, et leur forte découpe : l’absence quasi totale de figures rhétoriques n’empêche pas, mais au contraire autorise, une poésie visuelle sans description, une poésie empathique sans pathos.
Il n’est pas si fréquent qu’un romancier – une romancière – atteigne une telle originalité et une telle unité poétiques, a fortiori quand sa diction paraît se distinguer si nettement du ton romanesque. Mais gageons qu’une expérience d’écriture a forcément nourri l’autre.
Gérald Purnelle, Culture, Université de Liège, 24 février 2012 (extrait)
Corinne Hoex dans un livre en forme de carré parfait nous donne en quatre parties placées à l’enseigne d’un carré, l’approche d’un être, maître de la forme, de la couleur, du silence, de la lumière. Un signe suffit écrit ce maître dans la citation reprise en fin de la méditation poétique, silencieuse et affectueuse : maître de la modestie, être précieux, sage et Bouddha s’effaçant dans le bleu infini. Corinne lui parle : tu n’appartiens / qu’à ce bleu / qui te brûle.
Comment parler d’une confidence, comment partager ce lieu du regard, de la présence lumineuse de celui qui se confond avec la maîtrise et la sagesse. Assis à contre-jour devant la fenêtre ouvrant sur un jardin, il attend et entend le silence qui a pris la place de la lumière. Est-il déjà entré dans le point invisible (…) là où le noir se troue.
Il est proche du visage du chapiteau de Tournus, de la sainte Anne gardienne du bleu.
Dans l’atelier des toiles inachevées, dans le jardin la pluie tombe, tu es / dans chaque goutte
« Pas un mot de trop (…). Juste un peu trop peu » écrivait-il dans un travail en forme de miettes. Il attend, toujours lui : un sphinx / dans son fauteuil / veille / sur ses énigmes
 
Cette nuit dans ta tête tu as peint une nouvelle toile. L’ultime, celle d’un seul carré, celle portant déjà un silence de source. Il y a dans sa chambre intérieure, celle des masques, du noir et du goudron de la nuit descendu en lui.
La poétesse nous confie un secret, celui du mystère de l’évidence, du silence que lui n’a jamais cessé de dire. Il rejoint l’aurore, suivi par la merveilleuse Corinne : tu touches / l’horizon / où se sont éloignés // les bâtisseurs / de cathédrales. Merci chère amie d’avoir confié à tes poèmes le souvenir d’un des hommes des plus exquis resté présent dans ma mémoire : Jo Delahaut.
Gaspard Hons, Le Mensuel Littéraire et Poétique, n°365, avril 2009
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5.            Décidément je t’assassine
 
Roman
143 pages
Éditions Les Impressions Nouvelles, 2010
Prix Marcel Thiry 2010
Prix des lycéens 2011 du Roman doux-amer
Finaliste du Prix Emile Bernheim du roman 2010
Finaliste du Prix Rossel des Jeunes 2010
Un récit terrible qui, à travers des propos nus, des mots secs, des phrases cruelles, des sentiments violents et des émotions contenues, peut déranger, voire ébranler par une lucidité glaçante et une vérité bouleversante.
Cette mère dans la lignée de Rose ( La fille démantelée de Jacqueline Harpman), Madame Lepic (Poil de carotte de Jules Renard), Folcoche (Vipère au poing d’Hervé Bazin), nous fait voir combien il est difficile de se délivrer d’une relation faite de rendez-vous manqués même après la mort.
Sophie Duesberg, Kaïros, Bulletin de liaison trimestriel de l’Association Pluraliste de Soins palliatifs de la Région de Bruxelles Capitale ASBL, n°49, décembre, janvier, février 2012-2013
Dans ce roman d’une grande maturité transparaît une tonalité tout en contraste, et l’ironie (…), à l’image du titre, se situe plutôt entre exaspération, culpabilité et amertume. La langue est simple, directe, plus ciselée que jamais. Extrêmement efficace.
Anne-Laure Hick, Culture (Université de Liège), décembre 2010
Un récit bouleversant, servi par le grand talent de Marie-Christine Barrault, familière de l’œuvre de Corinne Hoex. 
Le Marathon des mots, dossier de presse, octobre 2010
On vous a déjà dit tout le bien que l’on pense de Décidément je t’assassine, le dernier récit de notre compatriote Corinne Hoex, qui retrace l’agonie d’une mère, fière et impitoyable, jusqu’au bout du bout. Nul doute que, lu par Marie-Christine Barrault, ce texte infiniment sensible prendra des résonances plus poignantes encore. 
Myriam Berghe, Femmes d’aujourd’hui, octobre 2010
Tour d’argent. Corinne Hoex possède la grâce d’un grand chef : elle fouette un sujet douloureux – l’agonie et la mort d’une mère – pour en faire une émulsion presque légère, tout en ciselant la langue avec maestria. On n’en attendait pas moins de l’auteure du Grand Menu (récemment réédité aux Impressions Nouvelles). L’ensemble de son oeuvre romanesque et poétique mérite bien trois toques. 
Myriam Berghe, Femmes d’aujourd’hui, le 28 juillet 2010
Au nom de la mère, de la fille et de l’esprit frappeur. En trois sets, Corinne Hoex a joué la partie de l’enfance, de l’adolescence, de la vie adulte. Game over. (…) Rien ici d’inutile, une accumulation de faits économes, classés, répertoriés pour inventaire. Mais par-dessous, en contrebande, serpente la vie, l’humour de Corinne Hoex, sa chaleur, son intelligence, sa gourmandise (…) Ce roman met en scène des personnages dignes de Danse de mort de Strindberg ou d’un Ingmar Bergman dont on aurait ôté les cris et les chuchotements. Ici, tout s’est joué en coulisses. (…) Corinne Hoex entre, sur des patins, dans cette existence, elle relève la grâce d’une branche de magnolia contre la vitre, capte les gestes, les corps, l’espace infranchissable. L’émotion naît de ces ratés, du non-dit, et là seul est le sensible, dans le regard porté sur ce qui n’est pas, et dans l’excuse d’une fille d’être si peu appropriée à sa parentèle. Le dialogue à une voix, adressé à la disparue, met encore la mère au centre, sans relâche, il consigne, ne dit qu’à peine l’attente, enfin, un « nous » qui ne vient pas. 
Sophie Creuz, L’écho, 12 juin 2010
Autant le dire d’emblée, au-delà de l’intérêt du propos, c’est véritablement l’écriture qui inscrit Corinne Hoex comme une des voix les plus percutantes de nos lettres belges : diamantaire et bouleversante. (…) Encore une fois, comme dans ses deux précédents romans, Corinne Hoex explore magistralement la violence dans les rapports parents-enfants. Un livre dont la brièveté révèle un travail d’écriture de grand dépouillement pour arriver jusqu’à l’épure, celle de la plus précise sentence, celle qui fait résonner en nous son écho bouleversant. Car il faut lire le texte à voix haute pour en entendre toute la secouante force expressive.
Éric Brucher, Antipode, avril 2010
On y retrouve les qualités d’écriture qui sont la marque de Corinne Hoex : l’extrême sobriété, la pudeur, la suggestion. (…) C’est écrit comme un constat, sans le moindre commentaire. C’est impitoyable de justesse, de talent.
Henri Raczymow, Regards, avril 2010
Corinne Hoex est un des vrais talents que compte la littérature belge d’aujourd’hui. Avec une plume acérée, elle traque, en peu de mots, l’univers familial dans toute sa complexité qu’elle convoque à table depuis son premier roman Le grand menu jusqu’au lit d’hôpital qui est le décor du dernier livre qui vient de paraître : Décidément je t’assassine (Impressions Nouvelles). Une mère qui ignore tout de l’affection communément acquise entre mère et fille rejette tous les gestes d’offrande de sa fille en même temps qu’elle exige sa présence. Une partition époustouflante sur la fidélité filiale et un réel bonheur de lecture.
Pascale Tison, Par Ouï-dire, 31 mars 2010
Des mots. Secs. Nets. Rugueux. Qui montrent, appellent, interpellent. Des phrases cruelles, implacables. On est dans le trait sans bavure. Rien de trop. Juste l’essentiel. L’émotion est là, pourtant. Mais retenue. La nudité du propos ne parvient pas à écarter la violence des sentiments. Ceux que l’on tend. Ceux que l’on guette. Ceux que l’on tait ou a tus trop longtemps. C’est un livre terrible, troublant sous la glace et brûlant comme un alcool fort. On ne peut qu’en être ébranlé.
Monique Verdussen, La Libre, 29 mars 2010 (lire l’article)
Ce qui bouleverse dans ce roman, c’est l’absence de lyrisme, de romantisme, de pathos. L’écriture n’est jamais engrossée par un excès quelconque. Pas de graisse dans ce livre. De l’os, rien que de l’os. Le scalpel de l’écrivain légiste a gratté tout le superflu et n’a laissé que le quotidien, les gestes, les objets, les paroles, celles qui sont dites et celles qui ne le sont pas.
Jean-Claude Vantroyen, Le Soir, 26 mars 2010 (lire l’article)
Avec l’efficacité sidérante de l’écriture elliptique dont Hoex est une orfèvre, le lecteur est saisi à la gorge et d’emblée placé au milieu de cet affrontement d’autant plus effroyable qu’il est muet sur l’essentiel. (…) Un très grand roman qui démontre, si besoin était, combien l’écriture peut aller à l’essentiel de l’humain, jusqu’au plus intime, avec la force qui conduit le lecteur à une empathie totale avec les protagonistes de cette tragédie du silence.
Edmond Morrel, Demandez le programme ! – Espace Livres, 24 mars 2010
Le ton est fort. Âpre. Blessé. Il résonne haut, nous prend à la gorge, ne nous lâche plus (…) Un ouvrage sans concession (qui) dissèque l’enfance, compte les failles, les manques, chiffres et photos à l’appui, cris et colères mis en sourdine, le désespoir n’en jaillit que plus fort, Hoex n’use d’aucun effet de pathos et c’est ce qui rend son histoire tellement impressionnante. Pleurer n’est pas émouvoir, l’auteur le sait, et le ton implacable, presque détaché, est bien sa plus grande force. (…) très beau roman, témoin d’une blessure sans appel.
Anne-Michèle Hamesse, Nos Lettres, mars 2010
Liens
Entretien avec Brice Depasse sur LibertyTV
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6.            Juin
 
Poésie
Éditions Le Cormier, 2011
14 x 19 cm
64 pages
20 exemplaires numérotés sur Rives Shetland
480 exemplaires sur Munken Print
Trop souvent, lorsqu’ils accèdent avec bonheur à la prose, les écrivains renient leurs poèmes ou les considèrent à tout le moins comme des péchés de jeunesse. La Belgique est terre de poètes. Alain Bosquet disait qu’elle est le pays où l’on en compte le plus par kilomètre carré. Corinne Hoex est de ceux-là. Ses incursions fructueuses dans le romanesque autofictionnel ne la détournent pas du sillon pourpre du poème, d’autant qu’elle y poursuit le même dialogue diapré. Celle qui entra en écriture en posant le pied dans l’empreinte de sainte Brigide d’Irlande pratique un lyrisme de contention, fruit d’une sensualité soucieuse d’échapper à l’illusion romantique.
Marc Emile Baronheid, BSC News Magazine, n°36, mai 2011
Oh, quelle petite merveille de tendresse, de poésie et de fraîcheur que ce Juin où Corinne Hoex évoque, mezzo voce, ses souvenirs d’enfance en s’adressant à la charmante vieille dame que fut une grand-mère aimante et aimée (…) Et se dessine ainsi pour nous par petites touches impressionnistes, et le portrait d’une grand-mère et celui d’un autrefois cher à sa petite-fille (…) On citerait bien tout le recueil, tellement, je l’ai dit, on est sensible à la beauté des images comme à la tendre fraîcheur des souvenirs dans ce recueil-mémorial.
France Bastia, La Revue Générale, octobre 2011
Corinne Hoex joue avec les mots, les sentiments, les sensations, les souvenirs. Et ça goûte bon les bonbons à la violette et ça sent bon les effluves des confitures qui cuisent. Et ça résonne de « mon cœur de beurre » lancés joyeusement à la fillette. Et ça remue dans le cœur du lecteur qui se prend, nostalgique, à remuer lui-même des souvenirs d’enfance, de peurs soudaines, de paix retrouvée, de complicités, de vie belle. Et c’est bon.
Jean-Claude Vantroyen, Le Soir, 2 août 2011
Pour qui connaît le travail romanesque de Corinne Hoex, il apparaît évident qu’elle se rende à la poésie également tant sa prose résonne d’échos qui font songer à de longs poèmes. Entre pointes aiguisées et lames de fond, entre mères amères et mers aimées, ses explorations de la violence dans les rapports parents-enfants au travers de ses romans Le grand menu, Ma robe n’est pas froissée ou Décidément je t’assassine révèlent un travail d’écriture de grand dépouillement pour arriver jusqu’à l’épure. Et j’aimais parler dans les chroniques que je leur ai consacrées d’une écriture diamantaire autant que bouleversante. Ses romans n’ont-ils jamais été autre chose que de la poésie ? Chaque roman a d’ailleurs comme été suivi d’un recueil. Et si la vraie différence entre prose et poésie semblait alors moins tenir dans le texte lui-même (sa teneur ou son expression) que dans sa disposition de mise en page ? Dans les recueils surtout, chaque mot ou chaque vers vibre davantage, résonne au centre silencieux de la page blanche.
Dans juin, paru en cette fin d’hiver aux éditions Le Cormier, on retrouve sans conteste l’univers de Corinne Hoex : l’interpellation du tutoiement surtout et le sens du détail (ces miettes du réel), ou la thématique de la mère (grand-mère ici). Et puis l’importance des verbes et des noms qui créent cette écriture épurée, certains mots chers (froissé, gagner, jeu de cartes, aiguiser, sans attendre, guetter…), peu d’adjectifs. Mais, au contraire des romans en leur charge ténébreuse de violence, c’est ici comme l’autre face de l’auteure qui se livre – face lumineuse de douceur choyée. On découvre dans ce très printanier juin un regard sensuel et gourmand, fleuri de roses, émerveillé de chaque moment, gonflé d’amour joyeux et serein. Rédigé en hommage à sa grand-mère : juin/c’est toujours juin/quand tu es avec moi – juin/et avec toi/les cerises luisantes/et sous l’arbre/ton rire
Retrouvailles d’une petite fille de huit ans avec sa grand-mère, cœur de beurre comme elle la nomme. Chaque printemps sous les marronniers en fleurs, là où il y a la vie impatiente. Quand le roman disait la violence, le poème dit la douceur et les frémissements, les coussins d’amour et les confitures, ce gros chagrin/contre toi/enfoui, ou sur la corde à linge/le vent à l’intérieur des robes, la merveilleuse torpeur de la sieste, les taches roses qui dansent et le passage de la lumière, les rideaux soulevés par le vent, les étoffes, la soie chiffonnée. La complicité avec la grand-mère, gâteaux partagés, dévotion crémeuse du saint-honoré, ou ma place dans ton littout à l’heure/tu viendras/ronfler avec passion, après l’émerveillement incrédule de l’enfant : tes seins nus/face à moi/comme deux personnes vivantes/qui me regardent
Un recueil qui sent l’essence de violette, le parfum du secret, qui dit avec un dépouillement d’extrême justesse la poésie lumineuse d’une grand-mère bienveillante au soleil de laquelle se dore une enfance réjouie.
Eric Brucher, Radio Antipode, 22 avril 2011
C’est une petite merveille qui m’est arrivée par la poste, c’est une plaquette de poèmes, que Corinne Hoex appelle « Juin ». C’est un livre de beau papier dont il faut, avant d’y entrer, découper les pages au fil du couteau. Dès que c’est fait, mille senteurs s’en exhalent. D’entre ces pages montent le parfum des roses dans le couchant d’été, le sifflement des merles, le ronronnement du chat sous le cerisier, le houhou d’une grand-mère sur le perron de la maison d’enfance.
Ces poèmes-là, de Corinne Hoex, sont des fragments de tendresse, des images qui reviennent du souvenir d’une grand-mère qu’une odeur de confiture de groseilles, soudain, fait ressurgir. Une vraie grand-mère, qui sent la poudre de riz et la violette, qui s’assoupit à l’ombre du jardin sous un chapeau de raphia, qui prépare le goûter, avec gourmandise.
De la rue, à la fenêtre, de la chambre, au parc, Corinne Hoex se souvient des bras blancs et chauds, des pieds gonflés dans les souliers de la vieille dame de ses huit ans, du collier de perles qui roule sous les doigts, des courses complices au salon de thé où l’index plane en trépignant par-dessus le comptoir, choisissant impatient le saint-honoré bientôt englouti, savouré bouchées après bouchées. Dévotion pâtissière, écrit Corinne Hoex, caramel brûlant sur les vallonnements de la crème.
Et pour le dire, elle a des mots qui font saliver ces poèmes. Des poèmes lumineux comme un Renoir, de tendres taches, avec comme toujours, chez Corinne Hoex, cette malice par dessous.
Mais alors que ses romans sur l’enfance ont le mordant terrible, la cruauté glacée de parents affairés, cette petite plaquette de poèmes, cette petite merveille à lire sous la tonnelle, n’est que douceur et cœur de beurre.
Juin est paru aux éditions Le Cormier.
Sophie Creuz, Musiq3, mardi 19 avril 2011
Ce recueil est sans doute le plus beau, à ce jour, le plus touchant et le plus vrai du poète, il est joie d’enfance, émotion pure, il chante une chère présence disparue.
Le talent de Corinne Hoex n’a jamais été aussi éclatant.
Anne-Michèle Hamesse, Nos Lettres, avril 2011
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7.            Rouge au bord du fleuve
 
Poésie
Éditions Bruno Doucey, 2012
Collection Embrasures
12 x 15,5 cm
64 pages
Auteure de textes d’une très grande force, comme les formidables romans Ma robe n’est pas froissée et Décidément je t’assassine parus aux Impressions Nouvelles à Bruxelles, notre compatriote Corinne Hoex est aussi une poétesse d’une exquise délicatesse et son dernier opus en date, Rouge au bord du fleuve paru chez Bruno Doucey à Paris, en apporte une scintillante démonstration tout en nuances et en raffinement.
Bernard Delcord, Lire est un plaisir et Homelit (Radio Nostalgie), 19 mai 2012, ainsi que newsletter et site des Guides Delta, mai 2012, et Revue des Belges d’Afrique Centrale EBENE.
Corinne Hoex est aussi poète. D’une imposante clarté. D’une exigence majeure. On l’a deviné dans le roman, à travers le choix assuré des mots, le suc généreux des adjectifs, les phrases qui cascadent goulûment. Un grand « petit » recueil le confirme. Parus chez un éditeur à suivre attentivement, les textes de Corinne H évoquent le travail du maître verrier par la puissance du souffle, la délicatesse de la torsion, la douceur/douleur du moment où le couteau coupe le cordon ombilical et laisse la lumière s’ébrouer. Écriture de l’intime, cette poésie avance au pas de la secrète évidence.
Marc Emile Baronheid, BSC News, mars 2012
(…) Vient de paraître une nouvelle plaquette, aux éditions Bruno Doucey (décembre 2011). Rouge au bord du fleuve (…) Trente-trois très courtes laisses déploient presque elliptiquement la confrontation de la locutrice avec un fleuve « grondant », par une nuit « belle et terrible », battue par un vent « fou ». La locutrice traverse la peur, avec pour talisman, métaphore et métonymie de la lumière, une écharpe rouge (tu portes l’écharpe rouge / qui sauve la lumière) (…) Il n’est pas si fréquent qu’un romancier – une romancière – atteigne une telle originalité et une telle unité poétiques, a fortiori quand sa diction paraît se distinguer si nettement du ton romanesque. Mais gageons qu’une expérience d’écriture a forcément nourri l’autre.
Gérald Purnelle, Culture, Université de Liège, 24 février 2012 (extrait)
Autre publication et complément de choix, le recueil qui réunit de courts poèmes en une seule évocation qui s’enroule autour d’une île qu’enserrent les bras d’un fleuve puissant. Rien de géographique cependant dans ce dit d’une errance au travers des terres, des eaux, des airs, dans le froid, dans le vent, dans le noir : une incantation qui affronte l’éclat de la mort face à la lune. Seule présence, une voix et cette silhouette à l’écharpe rouge qui sauve la lumière et pourrait bien apprivoiser cette eau d’argent, ce fleuve miroir, l’île et le monde.
Jeannine Paque, Le Carnet et les Instants, n°170, février-mars 2012 (extrait)
Les lecteurs et lectrices de Corinne Hoex savent bien qu’il y a en elle au moins deux écrivains : la romancière qui, soit par autoportrait soit par le jeu de la fiction imaginaire (peu importe, après tout), explore avec rage le monde âpre de l’enfance mutilée, des amours déçues et violentes, des affections impossibles. Le poète Hoex est très différent : dans ce beau recueil, Rouge au bord du fleuve, paru cette année chez Bruno Doucey (dernier maître d’œuvre des malheureusement défuntes Éditions Seghers), elle accompagne, entre rêve et regard, le cours d’un fleuve puissant et de ses berges et le chante avec, à la fois, une très judicieuse économie de moyens et un sens de l’image juste.
Corinne Hoex crée donc, dans ce recueil, un étrange et fertile dialogue entre un objet fragile – le châle rouge qu’elle porte, agité par le vent des berges – et le fleuve puissant. Dialogue entre le féminin et le masculin ? Peut-être. Parcours onirique ? Sans doute. Mais aussi, variations, au sens musical, autour de l’eau qui passe, des îles qu’elle épargne ou épouse, jusqu’à la fusion de l’être-poétique avec le fleuve et la nuit « qui confondent/les terres/les eaux/et les airs. »
Des poèmes volontairement brefs, mais dilatés par le souffle et l’amplitude du regard.
Jean-Luc Wauthier, Texture, Du côté des poètes belges, 26 janvier 2012
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8.            Le Ravissement des femmes
Roman
Éditions Grasset, 2012
200 pages
Dans les romans et les poèmes de l’auteure belge Corinne Hoex, la narratrice est souvent une jeune femme ou une jeune fille exposée à des parents manipulateurs et abuseurs. Pourtant, quand on lui demande quel genre de littérature elle écrit, Corinne Hoex se demande à haute voix : « L’amour, peut-être ? L’attente de l’amour ? »
Corinne Hoex, aux textes libérés comme des âmes et ciselés comme des épitaphes, est une écrivaine qui ouvre en nous nos propres horizons, personnels et familiaux. Certes, la famille qu’elle déplume à grand coups de griffes (limées avec soin) est un gouffre ; mais on prend à la lire un immense plaisir car c’est si bien écrit, et on y palpite jusqu’au fond du ventre, car c’est si juste. Et troublant, que ce soit si juste.
Elle vit entre un coin de parapluie belge et un coin de paradis méditerranéen. Nourrie des atmosphères intimes, grises et venteuses de la mer du Nord, elle a aussi en elle lesvignobles salés et les pinèdes dévalant les collines vers l’eau bleue. Elle dit « en poésie » comme on dit « en Avignon » : avec délicatesse. Elle dit « dans mes romans » : lorsqu’on les a lus, on les pense évidents, et on se rappelle à grand peine l’époque floue où on ne les connaissait pas. Je la rencontre à la lisière de tous ses mondes, et le dialogue est un plaisir : Corinne Hoex aime parler de ses livres. L’écouter n’est pas un dévoilement mais un étoffement supplémentaire, un empiècement que l’on rajoute à une série de textes eux-mêmes découpés comme des bombes miniatures, avec une précision d’orfèvre. Pas de frivolités, ni de bordures dentelées et tant pis si on s’y coupe comme avec du papier trop fin, car on y aura pris goût. (…)
L’abus de pouvoir, de manière plus générale et moins strictement familiale, est aussi la matière première de son dernier roman Le Ravissement des femmes. « Le Père Constantin prend le pouvoir sur des femmes adultes, par la manipulation, plus perversement que le père du Grand Menu, qui est dans la violence de l’autorité parentale. Dans les deux cas, il s’agit d’un abus de pouvoir paternel d’un homme qui bouche tout l’horizon. La petite fille du Grand Menu ne peut pas désirer autre chose. Dans Le Ravissement des femmes, le personnage principal, Elisabeth, se trouve face à un père qu’elle souhaite séduire. Le jeu l’amuse d’abord. Elle croit qu’elle sera l’élue. Elle veut attirer à elle l’homme qui aime Dieu et veut rivaliser avec l’absolu. Elle va très loin dans ce flirt avec la prise de pouvoir, mais très vite elle déchante. »
Sabine Panet, Filiatio, n°11, septembre-octobre 2013.
Le Rossel 2012 : “Autopsie d’un rendez-vous manqué”
La romancière qui nous a peut-être le plus surpris cette année, c’est Corinne Hoex. « Le ravissement des femmes » ouvre une brèche nouvelle dans son parcours. Excellente poète par ailleurs, elle avait jusqu’à présent usé de la prose comme d’une hache qui brise la glace des psychoses familiales. Ici, sur un mode plus léger, elle traite de l’aliénation métaphysique dans une société à la dérive, et d’un étrange avatar de la guerre des sexes, qui ressemble, conformément au vaste formatage des esprits si typique d’aujourd’hui, à l’intoxication mentale qui est la première méthode des tyrannies contemporaines. En d’autres termes, ce livre est plus politique qu’il n’en a l’air.
Jacques De Decker, La Marge, Demandezleprogramme, Espace Livres, 13 novembre 2012
 
Le désordre des êtres est dans l’ordre des choses, s’amusait à répéter Jacques Prévert. Tous les êtres, y compris ceux qui sont dans les ordres ? Que la chose « divertit » au même titre que les êtres ordinaires ? À lire la délicieuse et coquine Corinne, il faut croire que tous nous y sacrifions, hommes autant que femmes forcément, puisque les premiers s’égarent à cause des secondes qui fautent à cause des premiers.
C’est donc l’histoire d’un ecclésiastique qui n’a pas son pareil pour parler de la Présence, du Parfum de l’Être, de l’Embrasement, du Très haut Amour… d’une manière si suave, si accrocheuse, si persuasive que pas une de ses auditrices ne peut résister à son charme liturgique. Y compris la très libre Elisabeth : quarante-cinq ans d’expérience et de détachement progressif des pièges de l’existence. Mais à celui-là elle fera ce qu’il faut pour succomber, parce qu’avec son look de christ il l’intrigue autant qu’il l’indispose, parce qu’il est ardu et enivrant en même temps de faire tomber un homme supérieur, un maître, un gourou, un gourou de scène qui s’y croit, un père total, un Père majuscule. Le père Constantin en personne. On aura peut-être reconnu un de ces orateurs brillants et pénétrants qui ont ce don rare de subjuguer, autant par leur langage que par leur plumage, une salle d’auditrices plus fidèles que les Dames du temps jadis à leur chevalier. Le hic, c’est que l’homme de Dieu possède un verbe qui se fait chair (et cher) à la moindre occasion et ne s’en prive guère, enfilant chacune à sa manière selon le degré d’adoration et de soumission qu’elle manifeste. L’intérêt pour le lecteur du roman est de s’interroger sur la stratégie que le divin orateur va employer pour répondre à la troublante complicité adoptée par l’attirante quadragénère et la faire choir dans son bénitier intime. Nous n’en dirons pas davantage pour ne pas gâter votre ravissement… Le livre est joliment troussé, parfaitement ironique et blasphématoire, partagé en brefs chapitres et menues phrases comme autant d’œillades que le dom Juan des sacristies a l’art de lancer à ses victimes, ses fêlées, ses noyées, ses pom-pom girls religieuses, comme Corinne Hoex les désigne si tendrement… On l’aura compris, si l’auteur fait dans la dentelle sur son écritoire, en revanche elle mélange hardiment et sans beaucoup de nuances les prêtres, les maîtres à penser, les guides spirituels, les animateurs de sesshins, les enseignants de robes et de sectes multiples, les psychothérapeutes, les directeurs de conscience, les exorcistes, les confesseurs, les moines, les laïcs de toutes obédiences, l’engeance au grand complet et fort répandue de nos jours des beaux parleurs, des doctes manipulateurs qui endoctrinent si facilement les sangsues collées à leur autel, divan ou autre zafu.
Constantin est une icône… nous assure Elisabeth. Mais comme lui répond vertement sa mère, toutes les femmes ne sont pas des cruches et plus d’un homme s’efforce d’être normal…
Parole de sage femme qui nous ravit !
Michel Ducobu, Reflets Wallonie-Bruxelles, n°33, juillet-août-septembre 2012
La belle et le gourou. Soumission initiatique d’une belle quadra à un tartuffe qui joue les ascètes. Poète et romancière, la Bruxelloise Corinne Hoex attire l’attention sur sa voix singulière depuis 2001, depuis Le Grand Menu (…) où, avec la lucidité sans faille de l’analyste, elle mettait en scène une enfant trop sage des Sixties, ignorée par une mère à l’indifférence glacée, tyrannisée par un père maniaque et abruti. Dans son dernier roman, Le Ravissement des femmes, elle abandonne ce thème des rapports familiaux pour décrire, non sans humour, les émois d’Elisabeth, quarante-cinq printemps, sans mari ni progéniture, collectionneuse de livres anciens et d’amants éphémères. Nous la suivons d’Arles à Perpignan, alors qu’elle se met à fréquenter Bathilde, Marie-Hélène, Adrienne, toutes toquées du Père Constantin, sophiste mitré au regard d’améthyste et à la voix de bronze, qui n’a pas son pareil pour attirer dans ses rets de (riches) esseulées avides d’illuminations. Un gourou donc, suivi de dociles ménades qui paient cher — et comptant — le privilège de se prendre pour Hildegarde de Bingen tout en suivant des stages de développement personnel aux intitulés prometteurs : La Cime et l’Abîme, L’Extase du Cœur et autres Sources Pérennes. Pourtant vaccinée par une mère anticléricale, Elisabeth ira jusqu’au bout de son « calvaire », jusqu’à une sorte de baptême, disons hétérodoxe. Le style, rapide et sec, bellement ponctué, souligne la cruauté de l’analyse et l’on suit Elisabeth au galop — mais sans grande surprise — dans sa soumission initiatique à l’ascète amateur d’hôtels de charme, de moelleux peignoirs et de soupers fins.
Christopher Gérard, Service Littéraire, juillet-août 2012, et Quolibets. Journal de lectures, Éditions L’Âge d’Homme, février 2013.
Dans le piège.
Lisa comprend-elle ce qui lui arrive ? À 45 ans, elle, si disponible pour la quête de livres rares, d’autographes et d’éditions originales, s’enrôle volontairement dans la cohorte des admiratrices d’un inquiétant gourou. Face au Père Constantin, toutes exhibent « le blanc de leurs yeux vides, cette albumine d’œufs pochés dont se parent les regards qui perçoivent l’invisible ». Lisa n’est pas dupe de cette machine de guerre, ce « mensonge stratégique » qui draine les espoirs en friche. Pourtant elle succombe et son regard sans indulgence ne parvient pas à la préserver du piège. Jusqu’où ?
Jean-Philippe Catinchi, Le Monde des Livres, 13 au 19 juillet 2012
Le pouvoir et les sortilèges
Au sud de Bruxelles, où elle vit depuis plusieurs années, la Belge Corinne Hoex poursuit son exploration de l’inconscient féminin. Elle décortique le pouvoir, l’assujetissement et la possible rébellion. Chevelure rousse, abondante, regard vif, interrogateur, le verbe acéré, l’écrivaine bruxelloise se joue des codes. Elle slalome entre l’intime et l’absolu, conjugue légèreté et densité, s’emballe à l’évocation du Ravissement des femmes, son quatrième roman paru chez Grasset, qui sonde les arcanes de la fascination d’Elisabeth pour un prêtre de charme. Un envoûtement qui peut produire une sorte d’ivresse.
« Ravissement » évoque le rapt, la prédation mais aussi l’extase érotique ou mystique, entre danger et jouissance. Elisabeth, 45 ans, non croyante, rejoint un essaim bourdonnant de femmes recherchant un sens à leur vie dans la présence charismatique du Père Constantin. Elle va suivre le maître spirituel au gré de ses conférences, de couvent en monastère… Electrisée, Elisabeth garde toutefois son regard distancié, ironique. Jusqu’où ira-t-elle dans la fascination? Corinne Hoex poursuit la mise en exergue de la soumission d’êtres vulnérables à une violence, apparemment inoffensive. Elisabeth voit pourtant les choses avec beaucoup plus de légèreté que les narratrices de ses précédents romans. L’auteur mettait alors en scène une adolescente dont l’emprise passait par l’autorité, cette loi des parents qui la coupait du monde extérieur et se substituait au sens. Ici, l’abus de pouvoir passe dans le monde des adultes par la manipulation et la séduction. Corinne Hoex fait preuve d’une précision d’entomologiste. Sa volonté de transcrire la cruelle vérité des femmes en mal de rêve s’accompagne aussi du frémissement du désir d’Elisabeth.
Qui est Elisabeth, à la fois héroïne et narratrice de votre roman ?
Cette femme de défis a comme métier de rechercher des manuscrits exceptionnels pour des antiquaires spécialisés en livres. Un jour, dans un magazine, elle croise le regard bleu du Père Constantin, un prêtre de charme. Immédiatement, l’emprise de ces yeux agit sur elle. Elle s’offre le plaisir d’aller voir en chair et en os ce qui correspond à ce regard. À son arrivée à la première conférence de la « Présence », elle est en face d’un personnage d’un narcissisme absolu. Elle l’entend, elle sent son énergie. Tout est étudié pour prendre pouvoir sur cet auditoire constitué en majeure partie de femmes, qui sont toutes en adoration devant lui comme s’il était Dieu lui-même. Ce gourou se substitue à Dieu, il se présente comme une réponse aux questionnements de ces femmes subjuguées. Il les regarde comme s’il en savait plus sur elles qu’elles n’en savent elles-mêmes. Sous le regard curieux d’Elisabeth, on voit une manipulation décortiquée à mesure du livre.
Elisabeth cherche-t-elle Dieu ou l’Amour ?
Elle est allergique à l’eau bénite, elle se pense à l’abri de tout cela de par sa personnalité plus lucide, plus distante. Mais elle a trouvé dans le Père Constantin un Père majuscule, le sien étant mort depuis dix ans. Elle va se positionner comme toute petite fille vis-à-vis du père. Il y a toujours cela dans l’inconscient de toute femme par rapport à un personnage masculin qui prend une position charismatique, archétypale de père comme c’est le cas de Constantin. Elisabeth veut séduire et savoir jusqu’où elle peut aller trop loin. Elle va le voir avec l’intention de devenir l’élue du Père. Elle veut être aimée de celui qui peut aimer tellement plus grand puisqu’il aime Dieu, l’absolu. Elle décide d’être la maîtresse du maître, pas au plan physique mais moral. Ni l’un ni l’autre ne se donnent vraiment. Il y a un jeu de séduction.
Vous êtes arrivée tard dans la littérature…
Historienne de l’art, j’ai été enseignante, documentaliste, chargée de recherches avec la chance de publier des études sur les arts et traditions populaires de Wallonie. J’ai toujours aimé écrire. Je pensais que, pour partir dans un roman, il me fallait détenir un grand sujet de société. Le déclic s’est fait à partir simplement de ce qui était en moi et que j’ignorais.
Je me suis autorisée à parcourir et explorer des valeurs de l’inconscient, cette partie de l’enfance et ses blessures. On n’est jamais indemne de notre histoire. Rien n’est plus vrai, plus juste que ce que l’on a présenté sous forme de fiction. Je ne sais pas si cela règle quelque chose. Mais il me fallait pointer cela, me le montrer à moi et à mes lecteurs. En retrait, sans faire d’analyse ni de thérapie. La force émotionnelle d’un texte est beaucoup plus grande quand on ne donne pas d’explication. J’essaie de laisser au lecteur son propre espace d’émotions.
Corinne Le Brun, Tageblatt (Luxembourg), 16 juillet 2012
Mystique trip. L’auteure belge Corinne Hoex surfe sur la vague du développement personnel et le hisse au rang d’expérience spirituelle. Voici la confession d’Elisabeth, aimantée par le père Constantin qui n’a rien d’un saint. Un chemin de croix qui mène à soi…
Kerenn Elkaïm, Le Vif-L’Express-Week-end, n°15, 13 avril 2012
Un roman très fin pour un jeu du chat et de la souris peu ordinaire où l’on ne sait pas qui mangera l’autre ni comment tout cela finira. Des pages très drôles, des pages très belles, une alternance de charme et d’ironie, un véritable ravissement.
Serge Cabrol, Encres Vagabondes, 8 avril 2012
Les voies du Seigneur sont sans doute impénétrables. En tout cas, bien Malin est celui qui dira pourquoi il laisse s’agglutiner un essaim de groupies, mystiques et mystifiables à volonté, autour d’un prédicateur aux yeux magnétiques et à la voix grave et caressante. Il s’appelle Constantin, sa prochaine conquête sera Elisabeth, on le sait d’avance, mais il y a toutes les autres qui l’ont précédée et la jalousent déjà, celles qui vont lui succéder et celles qu’on ne fait qu’entrevoir, cheveux au vent dans une décapotable. Corinne Hoex, d’une plume d’une précision chirurgicale et avec l’allégresse vengeresse qu’on imagine provenir de quelques plongées dans le spirituel tendance New Age, crée une réjouissante collection de personnages décoiffants : bigotes dévouées âme et corps, grenouille de bénitier prêtes à tout pour devenir princesses de leur prêtre-gourou si persuasif ; jusqu’à un vieil évêque, crado juste ce qu’il faut et fétichiste des reliques. Comme souvent chez l’auteur, l’héroïne est l’enfant d’une grande bourgeoise, joueuse bridge et de whist (on est dans le meilleur des mondes, maison à Ramatuelle et séminaires dans le Midi), peu encline au contemplatif et qui ne cesse de répéter à son héritière qu’elle va finir par se faire… Baptiser, c’est cela et, pour tout dire, de deux manières, ma foi fort différentes et qui ne laisseront chez Elisabeth aucune extase. Le ravissement des femmes s’arrêtera là, la messe est dite. L’hostie fond un peu vite en bouche, les personnages découpés au scalpel restent en quête d’un miracle mais, pour le coup, Corinne Hoex est éditée chez Grasset et poursuit sa progression. Chacun de ses livres est meilleur que le précédent.
Stève Polus, Wolvendael Magazine, avril 2012
Les tartuffes sont toujours de ce monde. C’est ce que montre Corinne Hoex de la plume si magnifiquement ciselée qu’on lui connaît dans Le ravissement des femmes, tout dernièrement paru chez Grasset. Corinne Hoex, sans doute la plus belle plume de Belgique, en passant chez un des plus grands éditeurs français, ne quitte pas la thématique qu’elle abordait dans ses romans précédents : l’abus de pouvoir dans la relation parents-enfant. Sauf qu’il s’agit ici de paternité spirituelle, et que cet abus de pouvoir est dénoncé avec l’amusement d’une ironie qui en gênera certains, et parfois la dureté délicieusement injuste du pamphlet.
Le titre évoque assez ce qui peut être de l’ordre du rapt, de la prédation, mais aussi de l’extase érotique ou mystique – entre menace et jouissance. Où nous suivons Elisabeth, 45 ans, spécialiste de livres rares,  rejoignant un essaim bourdonnant et adorateur de femmes à la suite d’un Père Constantin au regard mauve et magnétique, « maître » spirituel très charismatique proposant du nord au sud de la France, de couvent en monastère, des stages de spiritualité baptisés La Présence, L’Ultime et l’Intime, L’Embrasement, ou L’Extase du Cœur.
Elisabeth est elle-même vite envoûtée malgré son regard distancié d’ethnographe ironique. Car Constantin est la drogue, la dope de ces femmes seules qui veulent du rêve, cherchent une bouée : toutes ont bricolé leur mirage autour de lui. Constantin, lui, cultive l’ambiguïté de flirts théologiques, exploite à l’envi leur besoin, se prend pour un nabab car, n’est-ce pas, le luxe dédouane de la laideur du monde – et il ne craint pas de se laisser aller à la plus basse goujaterie ou muflerie, aux abus les plus patents. Certaines ont abandonné enfants, mari, famille pour le suivre, ce « père » phantasmé, devenant les vierges (?) inépousées de cet absent magnifique. Et toujours elles paient. Elles paient contre quelques paroles ou pour se croire chacune l’élue. Ou pour un rêve de ravissement sans doute : elles tueraient le bon Dieu pour l’avoir dans leur lit.
Critique ironique des bigoteries et du besoin de guru, de certains errements New Age, et de toutes les tartufferies surtout, enturbannées ou non, cet habit qui trop souvent fait le moine. Dénonciation amusée mais acerbe du spectacle organisé autour de l’idole, entourée de ses courtisanes pas toujours si candides que ça d’ailleurs, ses adoratrices frissonnantes, et en tout cas solvables à merci.
Faut-il dire à nouveau combien l’écriture de Corinne Hoex est un régal de ciselage où chaque mot est choisi avec soin, où chaque phrase, posée avec la plus grande justesse, propose un texte étincelant – tel un minéral. Un délice langagier ravissant l’esprit ou l’oreille – puisqu’il est de ces textes que l’oralité fait davantage encore résonner.
Eric Brucher, Radio Antipode, 16 et 18 mars 2012
Dans une langue épurée, Corinne Hoex pose la question du libre-arbitre et de sa perméabilité.
Michel PaquotTel Me Mag, n°8, mars-avril-mai 2012
À qui perd gagne. La longue parenthèse entre L’Olivier (2001) et Grasset a permis à Corinne Hoex d’affirmer et d’aiguiser des qualités qui l’installent au premier rang des romancières de son pays. Elle fait merveille avec l’histoire de Constantin, éblouissant gourou au regard bleu, à l’égarante dimension mystique. Le fonds de commerce — inépuisable — du beau ténébreux : les femmes accablées de solitude, disposant d’une confortable aisance financière. Sa voix profonde les caresse, son éloquence les hameçonne, sa chevelure romantique leur met le feu aux joues, ses yeux phosphorescents les troublent intensément. Ces dames se disputent la faveur de lui être agréable. Nouvelle venue, Elisabeth, 45 ans, sans entrave d’aucune sorte, est d’abord intriguée par le manège, avant de se sentir subtilement happée par le jeu du Père Constantin, tout de distance savamment calculée, de noli me tangere volontairement porteur des espoirs les plus déraisonnables. Il tutoie ses fidèles. Il leur accorde des entretiens particuliers qui enflamment les fantasmes des condamnées à l’attente. Il promène avec componction sa vanité si bien courtisée.
Constantin adopte avec Elisabeth ce vouvoiement qui instaure la distance en même temps qu’il suggère l’embrasure du désir. Il parvient à la persuader de l’accompagner dans une tournée de conférences, à charge pour elle de choisir et réserver les confortables points de chute d’un possible flirt théologique. À chaque fois qu’apparaîtra la note, Constantin, modestement, détournera les yeux. Entre toutes les femmes de Dieu, il voue un culte particuleir à Sainte Carte Bleue.
Puis il s’invite à Ramatuelle, où Elisabeth possède une superbe propriété secondaire. Pour une lune de miel platonique ? Pour une descente vertigineuse dans l’hypnotisme de la frustration ? Pour une aléatoire danse avec le danger ?
Par cette parabole du ravissement féminin allant nus pieds sur le fil du rasoir, Corinne Hoex donne un roman de maturité, tendu à l’extrême, où l’attente rend la nuit plus obscure, où le moindre mirage d’espoir convoque un noir lumineux. La cavalcade du désir martèle les tempes l’Elisabeth. Tous ses sens espèrent une charge victorieuse emmenée par Grouchy, en même temps qu’ils redoutent l’apparition de Blücher.
Marc Emile Baronheid, BSC News, mars 2012
Une liaison dangereuse. Corinne Hoex publie (…) un roman étonnant, Le ravissement des femmes, qui sort en ce début d’année chez Grasset (…) Le roman relate une étrange histoire de séduction, sous couvert de conversion vertueuse qui provoque chez la séduite toute une série d’effets, de l’extase au plaisir d’une « lune de miel platonique », d’un « flirt théologique ». Si l’on se réfère au sens multiple du mot ravissement, c’est bien d’une telle emprise qu’il s’agit. Rapt, capture, envoûtement, mais aussi charme, plaisir : serait-ce tout simplement le jeu du pouvoir qu’un homme exerce si facilement semble-t-il sur des femmes disponibles et attirées par lui, pour toutes sortes de raisons, ou pour aucune ? Constantin est prêtre, bel homme au regard fascinant et il subjugue, lors de séances de prêche inspirées, des légions de fidèles, féminines pour la plupart. La narratrice, Élisabeth, ou Lisa, comme elle tente de se présenter d’abord, façon de se tenir en retrait, se rend comme par curiosité à une conférence du Père Constantin, qui parlera de La Présence. Cette femme, que n’encombre aucun mari, ni aucune progéniture, a vécu, connu des amants de passage, mais n’a « aucun attachement ». Cette attention qui la pousse vers le prêcheur aux yeux bleu-mauve si troublants sur la photo d’une affiche, relève de son goût pour l’exotisme, mais aussi d’un désir d’entracte et de nouveauté, sinon d’un attrait sensuel. Commence dès lors une aventure hors du commun, que nous livre le récit d’un ravissement, en effet, dont nous suivons toutes les étapes selon un subtil cheminement, quand la progression d’une passion bientôt submergeante semble se confondre avec une ivresse sacrée. Pourtant des à-coups de raison et des regards de plus en plus lucides sur le personnage du séducteur freinent une possible conversion. Face à ces états troublants, une fois encore, chez Corinne Hoex, c’est la perception intime de la narratrice qui domine et oriente la narration. Ce sont les émotions qu’elle éprouve, les questions qu’elle se pose qui intéressent et étonnent, à la mesure de ces effets qu’elle ne soupçonnait pas et qu’elle n’identifie que peu à peu. Il y aurait d’ailleurs du thriller dans cette progression animée qui varie les lieux et les situations.
Corinne Hoex a changé de registre avec ce roman. Elle aborde une problématique nouvelle, sans toutefois rejeter totalement les thèmes de ses récits précédents. Qu’elle traite aujourd’hui d’une préoccupation spirituelle, la question de la foi chez quelqu’un qui en a été tenu éloigné par l’éducation et même par choix, elle recourt au rationnel pour décrire les excès et le ridicule des dévotions exubérantes. Mais cela participe surtout d’un dispositif littéraire car elle concentre l’attention sur une femme parmi les autres. Elle fait de cette aspiration qui anime celle-ci un objet de passion, aveugle ou aveuglée, mais dont elle nous détaille tous les moments de ravissement, même les plus improbables. Certes, l’arrière-fable familiale demeure, discrète ou limitée aux téléphonages maternels, perçant le récit comme des éclats de bon sens, malgré tout.
C’est le quant-à-soi de la narratrice qui touche car il donne lieu à un déploiement de clairvoyance, de critique, d’humour. Voire à un réquisitoire déguisé, contre les prêcheurs, gourous, prophètes, escrocs de tous ordres, peut-être même contre les hommes enfin ! Demeure l’exquise analyse d’une sensibilité féminine qui se dévoile par le menu et surtout dans le registre privilégié de la poésie que célèbrent au final le retour à soi et la pleine jouissance de la nature et de la beauté.
Jeannine Paque, Le Carnet et les Instants, n°170, février-mars 2012
Une belle histoire, qui mûrit lentement sous l’écriture précise et fascinante de Corinne Hoex.
Jean-Claude Vantroyen, Le Soir, 29 février 2012
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9.            L’Autre Côté de l’ombre
 
Fusains d’Alexandre Hollan
Poésie
Éditions Tétras Lyre, 2012
Collection Lettrimage
22 x 22 cm
36 pages
Traduction ukrainienne par Ivan Riabtchii et Dmytro Tchystiak, Mova ta istoria, 2013
Des poèmes courts, accompagnés par des fusains d’Alexandre Hollan (peintre d’origine hongroise vivant aujourd’hui en France, auquel Yves Bonnefoy a consacré une monographie) — à moins que ce ne soient les poèmes qui illustrent les dessins —, ainsi se présente ce très beau recueil publié, avec la qualité qu’on leur connaît, par les éditions Tétras Lyre.
Le recueil est divisé en trois parties qui soulignent un triple mouvement de creusement, de bruissement, d’éveil. En tout, à peine 21 poèmes, très courts : chacun d’eux ne compte que quelques lignes réduites à leur strict minimum, dépourvues de majuscules et de ponctuations, qui dansent au milieu des pages. Absolu dépouillement. Comment ne pas être sensible à ce si peu qui dit tellement, à l’espace infini auquel se confronte si sobrement l’interrogation poétique et, tout simplement, humaine de Corinne Hoex ? Mystique aussi, à mes yeux, j’ose écrire ce mot, car c’est ainsi que j’ai lu ces poèmes, posés devant l’inconnu et l’intime. Face à toi/ jamais/ atteint, voir/ devient/ silence, la nuit/ bruissante/ où tu affleures, dans la nuit/ sans confins/ être une nuit éveillée…
 
Car, à travers cette très grande économie de mots, ils disent l’élan profond de toute vie face au mystère de l’être. La descente dans le sombre mène le lecteur de l’autre côté de l’ombre, de l’autre côté des mots, là où ils ne peuvent que laisser place au silence. L’obscur, le lourd, le plus noir a été traversé : au-delà est le règne du plus lumineux. Et Corinne Hoex est une orfèvre, elle qui cisèle si finement la lame du texte pour pénétrer l’espace le plus vaste qui soit.
Thierry-Pierre Clément, Le Journal des Poètes, 82ème année, n°3, 2013
On connaît les arbres d’Alexandre Hollan (Budapest, 1933). Cette fois, il les associe à la poésie de Corine Hoex. Les frondaisons au fusain qu’il aligne entre les textes sont des sortes d’ombres chinoises.
Ce sont masses noires qui, par des nuances internes de gris et de fugaces espaces de blanc, laissent percer leur obscurité, accéder au regard la lumière d’au-delà les feuilles. Point de minutie du détail. Plutôt un magma feuillu dépossédé de tronc, pourvu de quelques branches détectables presque par intuition mais bien présentes. Le lieu est donc aérien même s’il apparaît d’abord charbonneux.
Une volumineuse présence cache et révèle la lumière d’identique façon que les acci- dents du papier divulguent le mouvement créateur du dessinateur. Car sans doute le paradoxe du sombre est qu’il avive la clarté. Davantage pressentie que présente, celle-ci éclate çà et là laissant supposer qu’au-delà est son royaume. Mais qu’il est nécessaire de franchir l’obstacle pour la mériter. Que l’existence végétale, née de la terre par les racines, attirée vers le ciel par le solaire, constitue cet entre-deux de la vie dans lequel il nous faut nous accommoder d’être vivant quand bien même une absence proche suscite l’espoir d’une présence autre part.
Les vers de l’écrivaine possèdent la complexe simplicité des dessins. Les mots sont directs mais se parent d’obscurité, de mystère à appréhender sous les syllabes, là où « voir / devient / silence », là où ce qui s’esquisse devient certitude, là où il est per- mis d’«être/souffle/et feuillage », car ici le passage du vent, la musique de la respira- tion s’ajoutent à l’aspiration vers ailleurs.
Michel Voiturier, Flux News, n°61, avril-mai-juin 2013
Un livre noir et vibrant, méditatif et frémissant, sous l’épigraphe d’Alexandre Hollan : Descendre dans le sombre, vivre dans le sombre, le lourd. Force contenue. Force qui habite l’intérieur de la forme, patiemment, avec intelligence. Elle attend. 
Francine Ghysen, Le Carnet et les Instants, n°174, décembre 2012-janvier 2013.
Une rencontre, un recueil sensible, Hoex l’écrivain y rencontre Hollan le peintre. Les mots s’égrènent aux côtés des ombres furtives. Ils cherchent l’issue. Entre feuilles et mystères, ils se disent, se déclinent, comme essoufflés, en recherche de lumière. Une véritable communion a lieu entre le dit et le tracé. Le recueil se parcourt au pas d’une promenade haletante à l’ombre des feuillages dessinés par Hollan et des secrets distillés par Hoex. Un précieux équilibre s’établit, entre ombres, lumières et feuillages silencieux. On sent cette aspiration à l’éveil qui se fait désirer. Ce recueil fervent, entre ombres et secrets, se lit dans le silence et touche au plus profond.
Anne-Michèle Hamesse, La lettre de l’AEB, Association des Écrivains belges de langue française, novembre 2012
Sur des dessins d’Alexandre Hollan – mais la préposition n’est pas juste – il faudrait dire peut-être à côté des dessins, ou de l’autre côté; et, comme d’habitude, dans une typographie légère, aérée, où cette ombre, justement, a toute la place, et le loisir, de peu à peu s’étendre et se resserrer. Trois parties, et l’ombre, peu à peu, silencieusement, mange la page, comme ferait une grosse nuée d’orage. Mais c’est plutôt un lent crépuscule, des nappes d’air qui se font ombre, comme d’autres peuvent se faire jour, et il faut prendre comme point de ralliement, si l’on ne veut s’y perdre et s’y noyer, l’épigraphe de Hollan :
 
Descendre dans le sombre, vivre dans le sombre, le lourd. / Force contenue. Force qui habite l’intérieur de la forme, / patiemment, avec intelligence. Elle attend.
Car tout est là, dans l’attente, la tension de ce fil mystérieux, qui, parfois, dans le silence. Laisser s’en aller, laisser glisser. Perdre. Et tout se déroule avec la lenteur, la précaution d’un rituel. Un seul geste manqué, trop brusque, et le charme prend fin.
 
Toi et déjà l’ailleurs, dit-elle. Car c’est un voyage au bout de la nuit, et le fini, l’inconnu ne cessent de s’étranger, de se perdre dans la brume.
Mais à quoi bon reprendre et redire ce qu’elle a dit mieux, ce lent tournoi de l’ombre et de la lumière, où les rôles s’inversent. Tout vient de l’ombre, qui est comme un autre élément, celui que l’on avait oublié, celui d’où la vie germe.
Mais si l’on nous demande un jour d’où nous venons, oserons-nous dire, nous aussi, que nous étions de l’autre côté de l’ombre? Il y faut, encore une fois, de l’audace, et une bien longue patience.
Joseph Bodson, Reflets Wallonie-Bruxelles, n°34, octobre-novembre-décembre 2012 et Site de l’Association Royale des Écrivains et Artistes de Wallonie, octobre 2012
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10.         Celles d’avant
 
Poésie
Éditions Le Cormier, 2013
12,7 x 20,3 cm
64 pages
20 exemplaires numérotés et signés sur Rives Shetland : 50 €
580 exemplaires sur Munken Print : 16 €
Corinne Hoex fait partie de ces écrivains belges francophones qui passent avec un égal bonheur du roman à la poésie. Celles d’avant est un recueil de poèmes – de vrais poèmes, courts, en vers libres très brefs, portés par des anaphores, par des répétitions, par un rythme qui s’impose comme une évidence. Et pourtant, une forme de narration implicite sous-tend l’ensemble : ce recueil de poèmes porte en lui un roman, est enceint d’un roman – à moins, au contraire, qu’il n’en soit l’enfant, le résidu inattendu et secret. Roman virtuel ou roman transcendé, comme on voudra. Toujours est-il que le terme de « recueil », employé jusqu’ici pour désigner cette belle suite de poèmes envoûtants, n’est pas le bon. Il ne s’agit en effet pas d’un assemblage de textes épars, mais bel et bien d’un livre finement construit, agençant de courtes pièces qui renvoient toutes aux mêmes personnages : une petite fille en proie à ses terreurs nocturnes et des femmes adultes incarnant la peur, désignées par diverses expressions comme « les vertueuses », « les visiteuses », « les plus que femmes » ou « les reines mères ». Il s’agit d’une sorte de monologue éclaté, répétitif, immobile, mais le « je » prend ici la forme du « tu », comme si une adulte s’adressait à l’enfant qu’elle a été. En outre, çà et là, le texte devient polyphonique quand sont reproduites, en italiques, des bribes de paroles de « celles d’avant ». Ce dispositif singulier, à la fois subtil et puissant, présente l’avantage de laisser au lecteur une grande liberté et d’ouvrir en lui un espace de rêves oubliés, de souvenirs enfouis ou de fantasmes enfantins.
Laurent Demoulin, Culture (Université de Liège), novembre 2014
http://culture.ulg.ac.be/jcms/prod_1502664/corinne-hoex-celles-davant
« Ogresses » autant que « gaveuses », « divas prédatrices autant que servantes oblatives, elles, les mères (au pluriel universel, hyperbolique, démultiplicateur), font le siège de la chambre où « toi », leur enfant, cherches à leur échapper, finissent par y pénétrer, par « te » pénétrer pour se nourrir de tes substances jusqu’à ce qu’emportées par le vent, elles quittent la place, laissant planer leur ombre entre le monde et « toi », sans autre issue que l’assomption de « ton cœur… brillant et vert » au-dessus de la forêt du rêve. Entre poésie intime et conte fantastique, composé de courtes strophes gravées à la pointe sèche, presque des didascalies, le texte déroule un monologue haletant à la seconde personne, scandé par les criailleries des Érinyes familières. L’écriture aride, fébrile, grinçante, happe le lecteur pour le mettre à l’épreuve de l’hybris maternelle ivre de sollicitude et de récrimination.
Daniel Lequette, Cahier Critique de Poésie, 2014.
Corinne Hoex, aux textes libérés comme des âmes et ciselés comme des épitaphes, est une écrivaine qui ouvre en nous nos propres horizons, personnels et familiaux. Certes, la famille qu’elle déplume à grand coups de griffes (limées avec soin) est un gouffre ; mais on prend à la lire un immense plaisir, car c’est si bien écrit, et on y palpite jusqu’au fond du ventre, car c’est si juste. Et troublant, que ce soit si juste. (…)
 « Pour moi, la poésie est une respiration et une nécessité de questionnement. Une sorte de rencontre, d’ouverture à ce questionnement. En poésie, je suis à l’écoute d’une sensation, d’une émotion, je n’ai pas de projet établi. Et puis viennent des mots, des phrases, et le recueil est bâti sur cette énergie. Dans Celles d’avant, l’hagiographie collective des ancêtres féminins se fonde sur le ressenti vis-à-vis de la mère. Dans Juin, la grand-mère et sa générosité sont presque l’antidote des romans. J’y ai isolé un ressenti fondateur et bienveillant. ». Elle rit : en effet, les mères et grand-mères de ses œuvres sont plus souvent des personnages glaçants et destructeurs que des Mamie Nova. « La poésie est peut-être la sensation de ce qui me questionne dans la vie. Celles d’avant est le fantasme de la présence maternelle : des femmes qui squattent la narratrice, porteuses de restrictions et de messages négatifs, qui viennent comme des spectres et qui prennent possession du personnage principal en lui adressant des messages d’interdit, de mépris, de rejet. »
Sabine Panet, Filiatio, n°11, septembre-octobre 2013.
 
Qui sont-elles, ces femmes d’avant ? D’avant de vivre sa propre vie, sans compresses sur le front, sans contraintes ni consignes insupportables venues d’en haut, infligées par cet avant toujours en veilleuse sur le seuil de nos jours, fils et filles, lointains enfants de génitrices castratrices et fantomatiques.
C’est nous, soufflent-elles sans trêve à nos oreilles exacerbées. Elles connaissent si bien le chemin pour nous harceler, nous grignoter, nous manger nos plaisirs volés, elles sont les toujours pleines, les mains de fer, les reines mères, les incontournables, les gaveuses, les exagérées, celles qui, surgies d’outre-tombe, veulent à tout prix, au prix de leur sang qui coule encore impudiquement pour notre salut, nous rétrécir à leur image, nous modeler sur leurs corps vertueux de madone des déshérités et des frustrés. À nous de ne point être leurs victimes, les proies dociles, qui n’auront pu recevoir d’autre héritage que leur bave intime, leur trou noir, leur vide, leur éternelle mesure de toutes choses.
En recourant une nouvelle fois à son écriture courte, hérissée, cinglante et pourtant profondément poétique, l’auteur s’en prend ici à toutes ces saintes femmes de jadis et de naguère qui ont perpétué l’art de survivre dans l’ombre, l’obéissance, l’intolérance, la rancœur et l’obsession de transmettre à leur descendance cette malédiction du devoir, du sacrifice qui empêchera l’être humain, l’épouse, la mère essentiellement, de s’épanouir au vent du bonheur et de faire éclater par la grande fenêtre de la liberté un cœur assoiffé de lumière.
Un recueil, inquiétant et tonique à la fois, qui nous met en garde avec force et humour contre le péril du matriarcat castrateur… Celui qui règne encore trop souvent dans notre subconscient servile…
Michel Ducobu, Reflets Wallonie-Bruxelles, n°36, avril-mai-juin 2013
Une sorte de château branlant, de château-misère, aux pièces multiples, aux détours sans fin, avec ses pièces condamnées où se passent on ne sait quelles scènes atroces – Barbe-Bleue n’est pas loin –, où le vent répète à l’infini ses échos douloureux. Et elles sont là, celles d’avant, elles interviennent sans cesse, ne laissant nulle paix, vous poursuivant de leurs conseils, de leurs directives, de leurs jérémiades, de leurs radotages. Elles vous étouffent, vous empêchent de vivre : le barrage des trépassées. Car elles sont bien les forces de l’ombre, et l’ombre, le vide, autour d’elles, se font de plus en plus denses, de plus en plus effrayants. Une peur diffuse, que l’on ne peut situer en nul endroit précis. Mais elles sont là. Toujours. L’atmosphère est un peu celle des drames symbolistes, et l’on songe à Aglavaine, à Mélisande, à toutes ces sœurs disparues, mangées par l’ombre.
Il y a chez Corinne Hoex un peu de la sorcière et de la fée, rien d’étonnant à se l’imaginer pareille à une de ces jeunes femmes que peignirent les préraphaélites.
Elle traite avec une grande maîtrise ce thème difficile, qui aurait pu verser dans bien des poncifs. Non, nous sommes pris au jeu, nous nous perdons en ces couloirs sombres, et c’est à nous aussi que s’adresse cette étrange injonction, de jeter le vide qui nous étouffe, de rejeter celles d’avant, celles du dessous, pour émerger dans le monde vert de la forêt vivante. 
Joseph Bodson, La Lettre de l’AEB, mai 2013
Une fille (une femme, fille ou petite-fille…) s’adresse à ces voix qui hantent la mémoire. Toute maison, toute demeure (en soi) est hantée. Que de voix n’ont-elles pas franchi les murs ! Que de fois n’avons-nous pas senti venir quelque voix des fonds, « des caves de la mémoire » comme le disait Pessoa dans « Le livre de l’intranquillité  » !
Corinne Hoex, dans ce dixième recueil, poursuit sa quête des blessures de l’enfance. Le « rouge » de la souffrance émerge çà et là, dans le tissu de poèmes brefs, six ou sept vers pour dire l’impact (comme on le dit de balles !) de ces voix féminines « gaveuses » qui l’enjoignaient à « se secouer ».
Six parties structurent ce beau livre hanté. Les titres rappellent « la veilleuse » de la mémoire. Les « racines nouées » en soi, de toutes celles qui nous ont porté(s). Avec leur force, leur orgueil, leur conviction. Une langue qui resserre le cou, qui engonce le lecteur dans un puits de plâtras, de ruine. Mais langue sûre ! Dans « Farces et attrapes », les sizains cisaillent la réalité. On est « sans air », « sans oxygène », « dans le trou ». Dans le caveau des morts. Où les mots frôlent les murs et l’on en perçoit les voix, les plaintes, les souffles. Sous l’égide d’un beau vers de Rilke, Hoex sait que le travail de mémoire vive (comme la chaux) est une œuvre de sape, de saccage.
« Jusqu’où faut-il creuser ? » semble nous dire, au fond du trou, celle d’aujourd’hui qui, au plus nu, au plus vrai, creuse, fore loin. Oui, oui, « ce sont elles en robes de voyage » comme nous l’assure l’auteur à l’entame de son livre car nous sommes tous « à l’origine de la faille ».
Philippe Leuckx, Textures, mars 2013
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11. Décollations
 
Prose
Éditions de L’Âge d’Homme, 2014
90 pages
De tête, Eugénia n’en a point, voilà presque l’histoire d’une vertigineuse absence. Alors, sans faire mal au crâne, Corinne Hoex entame un défilé fantasque et plutôt rigolo de toutes les situations dans lesquelles une tête manquante peut nous faire travailler du chapeau. Voilà bien le casse-tête : comment qualifier cet inclassable petit bouquin par lequel l’auteur du Ravissement des femmes décapite comme au coupe-cigare les conventions les mieux établies, bille en tête ? On se croirait dans la scène culte des Tontons Flingueurs : ça a un goût de littérature… Y en a, de la jolie. J’y trouve un goût de poésie… Y en a aussi. Un court extrait, tenez : « Parfois la langue me manque. Bien pendue. Déliée. Rose à souhait. À tout hasard, je vérifie. Hélas ! Je ne l’ai pas en poche ! Pas même moyen de l’offrir au chat ! » Corinne Hoex provoque l’envie d’entrer dans le jeu et de jouer à sa suite à faire chanter les mots qu’elle esquisse, à en perdre la boule. Verdict sur la cuvée : manque peut-être un peu de corps mais se rattrape sur la fantaisie. Gouleyant. Et pas trop capiteux.
Stève Polus, Wolvendael Magazine, novembre 2014
 
“Coupez-lui la tête ! Ça lui fera les pieds !” Stimulée par une aussi catégorique injonction, Corinne Hoex s’est amusée – et nous amuse à sa suite – à une variation autour d’expressions de langage qui prennent la tête pour cible et, pour plusieurs d’entre elles, remontent à son enfance souvent explorée et qui semble n’avoir pas tout à fait fini de l’inspirer. Dans la famille d’Eugénia, héritière de l’insolence et de la lucidité de précédentes héroïnes de ses romans, chacun s’attelait, en effet, avec orgueil à posséder une tête – plutôt bien faite et bien remplie – alors qu’elle-même avait toujours ailleurs la tête qu’on lui destinait pourtant aux grandes écoles. Sa mère ne cessait de l’interroger : Eugénia, où avez-vous la tête ? tandis que tante Léontine entérinait : Vous n’avez pas de tête. Personne ne s’autorisait à la lui voir sur les épaules. Le père, plus perspicace, l’entrevoyait dans les nuages où, effectivement, elle promenait allègrement des yeux qui voient tout mais ne sont pas là où les autres pensent qu’ils sont.
Loin de se laisser déstabiliser par son corps auquel ses proches ne reconnaissent pas de tête, la jeune fille se rassure au plaisir de pouvoir jouir d’une liberté inédite. Elle a enfin la bride sur le cou. Plus de tête à droite, de salut, de soumission, de repas interminables. Elle n’aura plus à porter le chapeau. Et si sa langue lui manque parfois, elle admet que, de toute façon, elle ne pouvait pas la tenir. Sans tête, on peut tout se permettre. Tout imaginer aussi. Y compris faire de la haute voltige dans les jeux de mots et les maximes populaires. Encore que cette gymnastique-là exige une dose respectable d’esprit et d’érudition. Corinne Hoex en a. Et il faut bien qu’on lui attribue un peu de tête quelque part pour convenir de son esprit. Vagabondant à la suite de sa fantasque Eugénia hors de la sphère familiale, elle saisit diverses opportunités d’installer la tête au centre du discours. De considérations animalières en apprêts culinaires, de coquetteries appropriées en complicités historiques avec ces autres têtes coupées – on appelle cela des décollations – que furent une Charlotte Corday ou un saint Jean-Baptiste, d’aventures en mésaventures et, parfois, nostalgies et questionnements, elle se livre à une fantaisie qui n’a pas de genre défini mais où l’écriture se fait corde raide pour une main assurée.
C’est insolite, espiègle, loufoque. Vaguement déconcerté, on est ébloui par la performance, si extravagante soit-elle. On n’a pas le temps de s’ennuyer. C’est court, très court, enlevé à un rythme enjoué. Et quand on referme le livre, on rejoint le sourire d’Eugénia qui s’éclipse sur une pirouette : Peut-être s’est-elle payé notre tête. En ce qui concerne Corinne Hoex, pas vraiment.
Monique Verdussen, La Libre Belgique, 5 mai 2014
Avec Décollations – au pluriel – Corinne Hoex ne fait pas dans la dentelle ! « Décollation » signifie en effet « décapitation », et le livre nous plonge dans une atmosphère de délicieuse cruauté adolescente, hors de tout cliché sur la douceur des femmes. On y devine l’histoire d’une jeune fille qui refuse de se prendre la tête face à des adultes qui tentent de lui bourrer le crâne. Et si réellement, comme ils le lui disent, elle n’avait pas de tête ? Forte de cette hypothèse, Corinne Hoex nous entraîne dans un univers de fantasmes. En magicienne des mots, elle joue avec les variations autour du mot « tête », dans un texte à la fois drôle et savant, truffé de calembours. Mais, au-delà de ce brillant exercice de style, elle nous pose, en filigrane, une question existentielle : notre tête peut-elle vivre sans notre corps et vice-versa ?
Evelyne Guzy, BXFM, 5 mai 2014
 
En gastronomie, la Belgique francophone connaît la paupiette ou roulade de veau farci baptisée ‘oiseau sans tête’, enseigne par ailleurs d’un restaurant de l’Île-de-France. En poésie, il y eut les « Quatre sans cou » de Robert Desnos, le « Je perds la tête » de Gilbert Delahaye, l’aphorisme de Scutenaire : « Je perds souvent la tête. On ne me la rapporte jamais ».
Les romans consacrés à Harry Potter connaissent le ‘chapeau sans tête’ qui rend invisible, ainsi qu’un Sir Nicholas de Mimsy-Porpington alias Nick-Quasi-Sans-Tête. Henri IV a fait l’objet d’un livre intitulé « Le Roi sans tête ». Viviane Moore a écrit un thriller historique sous le titre de « La femme sans tête ». Sans compter les références recensées par Corinne Hoex elle-même en fin de volume : Dumas, Villiers de l’Isle-Adam, Restif de la Bretonne, Leroux, Lovecraft et consort.
En chanson, si on perd souvent la tête dans les romances d’amour, voici maintenant « Le Cavalier sans tête » de Damien Saez. Au cinéma, on a vu le court métrage de Solanas « L’Homme sans tête » et un film de Tim Burton « La Légende du cavalier sans tête ». Quant aux jeux vidéo, ils connaissent aussi leur « Cavalier sans tête », leur « Poulet sans tête » et un zombie acéphale.
Corinne Hoex vient s’ajouter à cette liste avec ses « Décollations ». C’est d’abord un joyeux exercice de style tournant autour du vocable ‘tête’, de son champ lexical, de ses expressions, de ses signifiés potentiels au propre comme au figuré. Le tout ayant pour pivot central un de ses thèmes récurrents, celui de la fille mal aimée par une mère envahissante voire castratrice, épaulée par un mari passivement à sa suite.
Ce pourrait être un autoportrait, un de ceux peints par les surréalistes pratiquant à la fois la figuration réaliste et les associations absurdes. C’est celui d’Eugénia (la bien née), prénom ironiquement significatif pour une enfant persécutée. À travers l’exploration de la vie de cette personne atteinte d’acéphalie, membre d’une famille où sa maladie semble peu à peu devenir contagieuse, il y a en effet pas mal d’ironie. À commencer par ce proverbe appliqué au quotidien : « Il y a loin de la coupe aux lèvres. Pour moi, quelle vérité ! ».
Teinté d’autodérision, l’humour est noir, on s’en serait douté. Il baguenaude aussi du côté de la parodie, de la pataphysique chère à Jarry et à Vian, des jeux de mots évidemment puisque c’est le point de départ de cette écriture, du comique de situation. Il s’agrémente d’anecdotes empruntées à l’histoire, aux martyrs béatifiés… Il s’étale dans un inventaire des avantages et des inconvénients à n’avoir ni crâne, ni visage, ni chevelure, ni oreilles. C’est drôle, un bon moment à passer, oserait-on l’affirmer ?, en tête-à-tête avec Corinne.
Michel Voiturier, Reflets Wallonie-Bruxelles, n°40, avril-mai-juin 2014, et site de de l’AREAW, 28 avril 2014
 
Corinne Hoex s’est abandonnée à la fantaisie la plus totale dans ces Décollations hilarantes : poème, pochade, exercice de style et de haute voltige. Invention à multiples voix, de toute évidence, cet opus atypique exhibe une maîtrise réjouissante de la langue et des jeux lexico-sémantiques qu’elle permet à qui la connaît et la manipule à plaisir comme cette auteure. S’abandonner, dans son cas, n’est qu’une métaphore de plus pour tenter de caractériser sa démarche dans ce recueil très organisé d’une courte centaine de variations sur un thème unique. C’est bien de perdre la tête qu’il s’agit dans ces décollations diverses. Voilà une expression toute faite que Corinne Hoex prend au mot, d’où le titre de son texte. De même qu’elle va inventorier toutes les occurrences du terme dans toutes sortes de contextes, les énonçant en séries lexicales ou, pour varier les plaisirs, en jouant sur les variations sémantiques d’un même lexème selon différents emplois, différents niveaux de langue, différents registres sociaux et poétiques. L’auteure relève aussi les dérives amusantes qu’entraîne ce cou coupé, de haut lignage, bride sur le cou, bien sûr. Soient la longue histoire des décapités les plus fameux et le cortège animé des céphalophores connus : infortune ou béatitude. Ne boudons pas notre plaisir à cette lecture. Corinne a le don des listes et grâce à une documentation étonnante peut nous énumérer tous les couvre-chefs que sans tête on ne portera pas, tous les plats auxquels on ne goûtera plus et les privations de tous ordres. Mais aussi comptabiliser les avantages de ce nouvel état, ce que l’on gagne finalement en perdant la tête, du temps, par exemple, pour vivre. Pour mieux vivre, car l’esprit demeure, lui qui est chevillé au corps, selon elle. C’est donc à une jouissance de tous les sens qu’elle nous invite dans cette suite virtuose de têtes manquantes en paroles gourmandes. Elle nous apprend que le peintre Lucian Freud peint la tête de ses personnages en dernier lieu. Il l’ajoute, en quelque sorte. Elle, en revanche, la sublime en l’envoyant se promener dans les nuages.
Jeannine Paque, Le Carnet et les Instants, avril-mai 2013
Un délire à la langue bien pendue et fantaisiste qui dénombre autant les couvre-chef devenus inutiles que les mets et autres collations que l’on n’avalera plus (cette tête pressée spongieuse par exemple), ou les avantages de voir oubliés torticolis ou céphalées. Une litanie qui convoque la liste longue des saints décapités et témoins de l’échafaud en une noria sublime qui ne manque pas d’aboutir à cette métaphysique question : reste-t-il une vie après ce cou coupé apollinairien ? Réponse personnelle: la langue toujours et son verbe gourmand.
Eric Brucher, Radio Antipode, 11 et 13 avril 2014
Mine de rien, en un peu plus d’une décennie, Corinne Hoex s’est imposée comme une valeur sûre des lettres belges francophones. En quatre romans, aussi noirs que toniques et cruels, elle a construit un style et une parole qui font mouche et nous touchent au plus profond de nos traumas. Et nous font rire, souvent. La famille est au centre de son travail et singulièrement la figure de la mère. Impitoyable figure maternelle, cause de tant de nos tourments. Des titres en forme de programme : Le grand menu, Ma robe n’est pas froissée, Décidément je t’assassine, Le ravissement des femmes, et il ne faudrait pas oublier la poésie : Cendres, La nuit, la mer, Celles d’avant…
 
Car, oui, Corinne Hoex est poète. Et le mélange des genres donne, chez elle, de la nitroglycérine. C’est le cas de ce petit livre qui paraît aux éditions de L’âge d’homme, dans la collection La petite Belgique, Décollations, ça s’appelle. L’histoire d’Eugénia qui a, littéralement, perdu sa tête. Et ça a l’air de lui convenir très bien ! Mais que mange-t-on quand on est décapité, comment séduire ou même embrasser quand on n’a rien au-dessus des épaules, que pense-t-on, que dit-on ? Au moins, on ne ressemble à personne. L’auteure à la crinière orange nous entraîne dans un monde extravagant, absurde, où la fantaisie côtoie, pourtant, les questionnements les plus sensés. « Eugénia est libre et sa tête, la tête qu’elle n’a pas, roule sa bosse où elle veut », après tout, voilà, peut-être, ce qu’il peut nous arriver de mieux. Perdre la tête.
Laurent Dehossay, Le Soir, samedi 8 et dimanche 9 mars 2014
On pourrait contester la qualité de « poèmes » aux textes que Corinne Hoex rassemble dans ce petit livre élégant et drolatique. Ils sont quelquefois écrits en vers cependant et certains d’entre eux possèdent la limpidité lapidaire des aphorismes. Mais on trouve également dans ce recueil des petits récits féroces, des micros nouvelles, des souvenirs aigus, et certains frisent la recette de cuisine, avec, mine de rien, tout juste assez d’épices verbales pour tourner en poison les délices annoncés.
Perec écrivit bien tout un roman en se privant d’une voyelle indispensable : “La disparition” est en somme une sorte de tour de force poétique et technique, celui de se passer du « e ». En voudrait-on à Corinne Hoex de se priver, elle, de la tête, du visage, du cerveau ?
“Décollations” est en effet construit sur tout ce qui, dans la langue et ses expressions ferait « perdre la tête ». Mais, loin de l’exercice un peu arbitraire de l’oulipien Perec, le travail poétique de Corinne Hoex, en examinant le langage, donne également des frissons et procure la légère électrocution, ce choc délicieux et inquiétant où se reconnait le poème.
« Il faut être surpris pour devenir vrai », écrivait Michel de Certeau. Une vérité attend les lecteurs de “Décollations.” Certes, ce livre allègre va les divertir (et pourquoi pas ?), les éblouir (qui s’en plaindrait ?) et les entraîner dans une virtuosité devenue rare. Certes, le jeu sur la langue est ici même jubilatoire. Il n’en est pas vain pour autant. Car le grand thème qui anime l’œuvre entière de Corinne Hoex : celui de l’enfance massacrée trouve en ce nouveau livre bien plus qu’une occasion de ressassement : une échappée cruelle. Ce monde de langue et de couteaux vous fait tourner la tête, et vous laisse, en définitive étourdi, décervelé, mais plus sensible.
Lucien Noullez, Recours au Poème, mars 2014
Seize livres publiés en cinq ans (2008-2013) dans des genres différents (romans, poèmes, ouvrages bibliophiliques) : Corinne Hoex est sans doute notre auteur belge le plus prolifique et créatif.
L’auteur a son univers : la noire et étrange famille déjà décrite par ailleurs, ici convoquée autant que la langue, puisqu’il s’agit au fond de tresser lexique et cousinage et fratrie. « Celles d’avant » (Le Cormier) portraiturait déjà quelques spécimens de femmes pas piquées des vers !
Sur la trame de la « tête » à friser, à couper, à découper… l’auteur s’en donne à cœur joie pour dérouler presque toutes les expressions françaises relatives au « chef », au sens étymologique. L’intérêt, certes, n’est pas savant, on s’en doute (quoiqu’il y ait ici beaucoup de références historiques et autres), mais comment mieux servir le propos qu’en servant bien cette langue qui tisse tant de fleurs à cette « tête » de veau, à celles et ceux qui n’en ont pas, écervelés…, à ceux  qui ont « tête persillée »… L’ingénieuse poète rameute bêtes et gens autour du thème central. On perd beaucoup de têtes dans l’aventure dans ce recueil de textes et les « Décollations » du titre visent autant Salomé que les pauvres hères d’une famille déjetée, aux prénoms improbables et surannés : Madame Armance, modiste ; Eugénia, la narratrice, Cousine Edwige, Cousin Désiré, Alphonsine, Léontine…
Il y a le père, il y a la mère, les frères et sœurs, les célèbres sans tête, les Denis et autres Eusèbe, qui ont continué à penser sans tête, à vivre comme si…
En matière de récit familial, déjanté et assuré par un style qui puisse relayer folie, étrangeté, le livre 18e de Corinne peut être comparé à ces ovnis de la littérature belge que sont « Plume » de Michaux, « Marin mon cœur » de Savitzkaya , « Trou commun » de Besschops, « Le laitier de Noël » de Counard (dommage que ces deux derniers soient si discrets !).
L’humour — noir, forcément —, l’insolite, les dialogues impayables (— Je vais lui tordre le cou ! hurle Mère/ Coupez-lui la tête ! ça lui fera les pieds !) font de cette œuvre un jalon essentiel de notre littérature.
Philippe Leuckx, Texture, mars 2014
Corinne Hoex, vraie révélation poétique des dernières années, tranche, elle aussi, sur la production poétique courante. Décollations (L’Âge d’homme) est un nouvel « Exercices de style » à sa façon. L’ironie, la cruauté, la dérision, les jeux oulipiens sur la langue, les inventives références romanesques (la bien née si mal torchée Eugénia), le regard braqué sur ce que le réel du langage peut receler de vie et de vitalité expertes, tout ici gagne en profondeur et aisance. Grands dieux de la prose poétique : tout tourne autour des têtes « à couper », à coupler, à jouer, à démonter, à décoller. De la comptine dérisoire en apparence au tableautin familial aigu, tout y passe : la tête et le corps, le cœur, l’aigu, l’aiguille qui traverse, perce. Où va-t-elle pêcher tout cela ?
Plus pérecienne tu meurs ! Soutenir tout un livre sans qu’il ne verse la tête, chapeau !
Philippe Leuckx, Le Journal des Poètes, 1-2 2014
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12. Jadis vivait ici
 
Poésie
Éditions de L’Âge d’Homme, 2015
91 pages
Se rafraîchir en barbarie.
Jadis vivait ici, d’emblée, nous voici bien loin en lisant ces mots, et déjà rêveurs. Corinne Hoex a-t-elle décidé de nous enchanter en décidant de ce titre ?
Titre programme, car la suite est bien plus étonnante encore. Once upon a time ? bien mieux, car au-delà du conte nous voici plongés dans les romans, de la table ronde ou non. Sept chapitres ou mieux sept chants vont s’énoncer à l’enseigne de jadis mais aussi annoncer un art du futur – ça reviendra –, des premiers aux derniers vers du recueil. Menace ou espérance ? Danger, s’il s’agit de brûler Tristan et la reine, qui moururent autrement. Espoir car la terre labourée revient à soi, boue natale, terre ferme enfin. Même si domine la violence en cet avenir imaginé, il y a l’assurance de vivre de la terre en sa terre.
Entre ces deux seuils, toute une histoire, comme on dit. D’abord un défilé, un répertoire imagé d’herbes mauvaises, menaçant les enclos, et qu’il faut éradiquer. Ensuite un voyage parmi les « anciens morts » et le décompte des os, des reliques, des mânes supposés qui bientôt se monnayent. Quant aux desservants, ermites, pèlerins, pénitents, sinon martyrs, sont-ils saints, en définitive, ces suppliciés qui saignent en volupté, fréquentent les bûchers ou les potences ? Petit feu ou hautes flammes, il n’y a de salut que dans le scandale, semble-t-il.
Foin de l’aspiration au très-haut, c’est la terre et ses richesses qui importent. Et le retour à l’animalité, celle des bêtes, celle de l’homme premier et même celle de la femme.
En fait, Corinne Hoex nous invite à une excursion, un voyage et une plongée en moyen âge, sauvage ou courtois, c’est selon, mais riche en couleurs, en paroles surtout. Mots rares, mots oubliés, images sorties de manuscrits enluminés. Jadis vivait, ici ou ailleurs, un héros, affreux ou splendide. Je crois que Corinne Hoex a voulu retrouver les charmes de ce temps-là, qu’ils se transmettent sous la forme de poison ou doux breuvage, parce qu’elle a, comme nous tous peut-être, gardé la nostalgie du philtre d’amour dangereusement irrésistible… L’essentiel est d’y croire ou de le désirer. Mais qu’on ne s’y trompe pas, notre auteure n’a aucun goût pour la cruauté. Sa seule délectation est de nommer, de jouer des mots et de l’arithmétique lexicale.  En poète toujours.
Jeannine Paque, Le Carnet et les Instants, 28 mai 2015
« Frères humains qui après nous vivez… » (François Villon)
Avec Jadis vivait ici (paru aux Éditions L’Âge d’Homme à Lausanne), un élégant texte pointilliste tissé sur une trame médiévale, notre compatriote Corinne Hoex apporte une nouvelle preuve de sa grande virtuosité littéraire et de son talent étrange et remarquable à raconter des histoires terribles à coups de petites touches sensibles, d’images captivantes et de mots qui font rêver.
Dans ce qui constitue une sorte de chanson des gestes de la vaine ambition humaine de faire de sa vie quelque chose d’impérissable, Corinne Hoex fait résonner la voix des trouvères pour convoquer les forces obscures de la nature, de la destinée, de la religion, du mal, de la foi, de l’esprit chevaleresque, de la désespérance, de la souffrance et de la mort pour nous tendre le miroir de notre époque, perpétuation de l’âge de fer des fanatismes en tout genre et des croyances naïves à propos de supposées qualités miraculeuses de la terre-mère, de ses animaux et de ses plantes.
Bernard Delcord, M… Belgique, 22 au 28 mai 2015, ainsi queblogs de Lire est un plaisir (http://lireestunplaisir.skynetblogs.be) et de Homelit(http://homelit.skynetblogs.be), partenaires de Radio Nostalgie,ainsi que magazine satirique belge sur Internet SATIRICON.BE (http://www.satiricon.be/?p=9746), 19 avril 2015, ainsi que newsletter de mai 2015 des guides gastronomiques DELTA (www.deltaweb.be).
Jadis vivait ici évoque, sous la plume limpide et acérée de Corinne Hoex, les contrées d’un Moyen Âge fantasmé, sombre et lumineux, fervent et violent, mêlant la livrée d’or de la courtoisie aux transports magnifiques d’une quête du Graal, mêlant les échardes d’immortalité à la volupté de saigner dans les supplices.
Ah, les échardes comme les épines, Corinne Hoex les aime, elle que fascinent les pointes, les piques ou les becs, les épées et les dards, les ronces ou les chardons. Tu ne vaincras pas les épines, écrit-elle. Car tout peut être vaincu sans doute, même la douleur, même les blessures que guériront les onguents magiques ou le miracle des simples ; tout sauf les épines, et la mort qui laisse les os des saints hommes innocentés par les lombrics. Or mais, en ce Moyen Âge envoûtant, il y a aussi les philtres et les poisons, les cryptes et les monastères, les ascètes et les pèlerins marchant sous la grêle, les saintes horreurs, les bûchers et le combat des preux chevaliers, les chasses aussi, les royautés et les prières, les sévices délicieux ou l’eau bénite et les dévotions.
Un univers médiéval magnifié par une langue superbe, dégraissée à l’extrême, décapée jusqu’à l’essentiel, ses chairs vives, ses tendons, sa moelle – celle des mots mis en exergue, étonnants et précieux, qui toujours ravissent. Jadis vivait ici de Corinne Hoex a quelque chose de l’écrin qui, tel celui de l’entomologiste, épingle le papillon magnifique d’une relique adorée.
Eric Brucher, Chronique littéraire Radio Antipode, 12 avril 2015.
http://www.antipode.be/blog/litterature/2015/04/jadis-vivait-ici-corinne-hoex-l’age-d’homme-2015/
 
Dans Décollations, son avant-dernier opus, Corinne Hoex nous invitait à perdre la tête au rythme de variations loufoques et pleines d’une fantaisie qui me faisait songer àune jam session.
Aujourd’hui, en maniant davantage l’implicite et en usant d’une palette de vocabulaire plus riche encore, cette poète de haut parage nous jette un sort par le truchement d’une entêtante incantation qu’elle a intitulée Jadis vivait ici. Relents d’un Moyen Âge baroque et farceur, cruel et païen. Mélopée psalmodiée par une sorcière aux cheveux de feu et à la bouche d’or : « Ça reviendra, le silence sous la pierre. Ça reviendra sous la mémoire, le silence. Chardon bleu des sables. Épine de Judas. Chardon-bénit. Chardon-Marie. Ça reviendra, l’homme en son manteau rouge. L’écharde sous l’ongle. La herse abattue. Ça reviendra, la ronce, le robinier et le prunier sauvage. » Comment ne pas songer à un grimoire aux grimaçantes figures, à l’un de ces livres maudits ? « Pipistrelles. Roussettes. Battements d’ailes dans tes cheveux. Nuit mauvaise aux oreilles pointues. » Totentanz baroque, Charme vénéneux, philtre où se mêlent la barbe de chanoine, le myrte sauvage, le doigt de bergère et la poivrette d’or… Entre Bosch et Rabelais, car jamais la farce n’est loin, l’un de ces livres qui ne ressemblent à rien – un talisman.
Christopher Gérard, Salon littéraire, 28 mars 2015
 
Étrange livre, que celui-ci, et fort différent des recueils de poèmes auxquels Corinne Hoex nous avait habitués, même si, sans défaut, on y reconnaît sa griffe. Tout pétri de légendes, de folklore, qui ne vont pas sans une certaine cruauté, une certaine frayeur. N’oublions pas que Corinne Hoex avait fait un mémoire sur les arbres à clous. Ces arbres où l’on accrochait des linges, des ex-voto, à des clous, pour obtenir la guérison. Ils sont vieux comme le monde, et il en reste encore.
Serait-elle devenue plus explicite ? Elle s’aventure au jardin des mauvaises herbes, en un Moyen-Âge encore tout hérissé de herses et de mâchicoulis. Elle traite sans trop de respect les vieux os des saints de ce temps, jonglant avec les reliques impitoyablement recyclées. Tout un saint-frusquin d’attirail de pèlerin – même peut-être la foi (p. 21).
Toute cette dévotion est parfaite, mais elle reste à l’imparfait ou au passé décomposé (p. 24). Un assortiment de plantes dangereuses à l’ouïe déjà et de décor baroque. Échec cuisant en fin de partie, à chaque coup l’on perd. Un mélange de cruauté et de piété, comme on le trouvait parfois en Espagne, autrefois. Un goût des énumérations, qui nous ramène aux Miroirs du Moyen-Âge, bêtes et plantes, toute la création est convoquée. Elle jette ces noms par poignées, comme du pain pour les carpes : noms de plantes vénéneuses, noms de bêtes malfaisantes et malheureuses. Cela finit par ressembler à un tableau de Jérôme Bosch, grouillant de gargouilles et de chimères, ou à l’un de ces portraits d’Arcimboldo, à ces trognes rutilantes de mille créatures assemblées (…)Tout ici est dans le ton, un ton d’incantation, de malédiction, doué d’une force extrême, de par la répétition et la gravité du propos, plutôt que dans l’enchevêtrement pittoresque des termes rares. Tout nous ramène ici au Moyen-Âge, à son anxiété, à sa  cruauté. Comme si cet être multiforme qu’elle tutoie, il fallait l’écraser, l’humilier, le mettre plus bas que terre. Étrange relation d’amour-haine, incessant combat et lutte incertaine.
Joseph Bodson, Site de l’AREAW, 23 mars 2015 et Reflets Wallonie-Bruxelles, n°44, avril-mai-juin 2015
http://areaw.org/corinne-hoex-jadis-vivait-ici-poemes/
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13. Les Mots arrachés
 
Gravures de Véronique Goossens
Poésie
Éditions Tétras Lyre, 2015
Collection Lettrimage
22×22 cm
6
4 pages
Corinne Hoex, romancière et poète, a publié depuis 2001 vingt livres. On garde un très beau souvenir de ses romans Le Grand Menu, Ma robe n’est pas froissée, et bien sûr, de ses poèmes, Celles d’avant, L’Autre Côté de l’ombre, Jadis vivait ici.
Sur une trame familiale, sur les femmes, sur les proches, poèmes et romans forent émotions, sentiments, et glissent, au travers des constats, leur poids de blessures, de déchirures.
Le dernier recueil, dans une belle présentation carrée du Tétras Lyre (coll. Lettrimage, et un travail graphique de Véronique Goossens, de belles gravures en noir et blanc, jouant de l’ombre, de l’effacement, de taches et d’un exceptionnel sfumato), ne déroge pas à la thématique précitée. Le livre “accompagne” (au sens de Je l’écoute respirer d’Anne Philipe, ou de L’accompagnement de René de Ceccatty) les moments derniers d’un proche, en l’occurrence la mère de l’auteure, et toutes les ombres que lui laisse la défunte.
L’essentiel, ici, conjugue l’altération d’un corps aimé, les vannes lâchées de la “rescapée”, cette “bouche ouverte/ emplie d’ombre”. Même le dur passage de vie frêle à trépas, dans cette “inspiration/ l’asphyxie/ la noyade”. En quintils et sizains, le plus souvent, la poète traque le dru, l’insupportable, le plus nu de la perte : “tu tâtonnes/ vers un appui/ qui manque”.
Il a fallu traverser la chambre de la mort imminente, assister au silence qui part ; il faut à présent faire siens les ombres d’après, le reflux des souvenirs d’elle, le débordement contraint  — par la langue, la pudeur, le style, l’élégance — du cœur qui dicte les mots de départ et d’amour.
Quel hommage corseté à cette “vie” “remise en jeu”! Une voix qui compte en poésie belge féminine (avec L. Wouters, V. Daine, A. Bonhomme, V. Wautier, F. Lison…)
Philippe Leuckx, La Lettre de l’AEB, août 2015
ou Phœnix (Marseille)