GIRAUD Albert

Biographie

 Albert Giraud [ps. d’Émile Albert Kayenberg] est né à Louvain en 1860 et mort à Schaerbeek en 1929.

 Il entreprit à l’Université catholique de Louvain des études de droit que, faute de moyens financiers, il ne put achever, mais qui lui donnèrent l’occasion de fréquenter Iwan Gilkin (1858-1924), Émile Verhaeren (1855-1916) et Max Waller (1860-1889). Il assura sa subsistance par le journalisme et, sur le tard, par un emploi de bibliothécaire.

 Il fut un des principaux animateurs de La Jeune Belgique dont il devint un des copropriétaires à la mort de Max Waller. Il y défendit avec virulence la doctrine de « l’art pour l’art ». Il eut de ce fait, en 1885, un duel (sans gravité) avec Edmond Picard (1836-1924) qui défendait, d’une manière non moins agressive, « l’art social » dans L’art moderne.

 Il devint en 1920 un des quatorze premiers membres de l’Académie royale de Langue et de Littérature françaises.

 Ses dernières années furent attristées par la cécité.

Son œuvre est, avant tout, celle d’un poète parnassien qui méprise tout sentiment plébéien.

Bibliographie

  •  Pierrot lunaire, Paris, Lemerre, 1884.
  •  Souvenirs d’un autre, La Renaissance du Livre, 1929.
  •  Le scribe , recueil de contes,Bruxelles, Hochsteyn, 1883.
  •  Le parnasse de la Jeune-Belgique, Paris, Vanier, 1887.
  •  Pierrot Narcisse, Bruxelles, Lacomblez, 1891.
  •  Les dernières fêtes, Bruxelles, Lacomblez, 1891.
  •  Héros et Pierrots, Paris, fischbacher, 1898.
  •  Hors du siècle, Bruxelles, Lacomoblez, 1897.
  •  Victor Hugo, Bruxelles, Weissenbruch, 1902.
  •  Alfred de Vigny, Bruxelles, Weissenbruch, 1902.
  •  Anthologie des Ecrivains belges, Bruxelles, Dechenne, 1908.
  •  La guirlande des Dieux, (ouvrage couronné par l’Académie française) Bruxelles, Lamertin, 1910.
  •  La frise empourprée, Bruxelles, Lamertin, 1912.
  •  Eros et Psyché, Bruxelles, La Vie Intellextuelle, 1921.
  •  Le miroir caché, Bruxelles, La Vie Intellectuelles, 1921.
  •  Le concert dans le musée, Bruxelles, La Vie Intellectuelle, 1923.
  •  Laurier, 1919.

Textes

Au lecteur

” Heureux qui comme Ulysse, a fait un beau voyage ! ”
Comme ils sonnent en nous, ces mots du doux songeur !
L’ un découvre une Antille et l’ autre, son village,
Mais tout voyage est beau pour le vrai voyageur.

D’ un voyage secret entre l’ art et la vie
Je fixe en ces sonnets les souvenirs flottants ;
J’ ai l’esprit inquiet, la chair inassouvie,
Mais je célèbre encor les dieux de mon printemps.

Assis au coin du feu, je respire des roses,
En évoquant pour vous les êtres et les choses
Que rencontra mon rêve au hasard du chemin.

Et sur l’ écran du vers se projette irisée,
Comme un miroir caché dans le creux de ma main,
Une âme mi–naïve et mi-désabusée.

 

Au lecteur

Mon foyer s’est  éteint et ma gerbe est fanée.
Je regarde mourir, les pieds sur mes chenets,
Ces reflets de ma vie habillés en sonnets
Dans le miroir mobile où leur image est née.

Ai-je réalisé ce que j’avais tenté ?
Notre oeuvre vaine est comme une table de fête,
où soudain vient s’ asseoir, à côté du poète,
Un convive inconnu qu’ il n’a pas invité.

Mais bah ! je me console et me dis à moi-même :
” Quelques rythmes nouveaux chantent dans ce poème ;
Si l’ on veut les trouver, il faudra les chercher.

J’y tiens fort, mais je fuis la réclame brutale ;
Le rimeur fait briller son audace et l’étale;
Le poète discret s’ amuse à la cacher. ”

extraits de Le Miroir Caché

 

Commentaires

L’ inauguration du buste d’ Albert Giraud

Sous un ciel parfaitement bleu, dans le calme jardin de Saint-Donat, où chantait un jet d’eau et où le souffle de la brise murmurait dans les feuillages, les autorités louvanistes, les représentants de notre gouvernement, et de nos grandes institutions littéraires, ont inauguré, à la mémoire d’ Albert Giraud, le buste charmant, spirituel, et qu’on pourrait dire voltairien, que le maître Victor Rousseau a sculpté du poète de la ” Guirlande des dieux “.
On remarquait, parmi les personnalités présentes, MM. Bovesse, ministre de l’instruction publique; Grojean, et Guslin, secrétaire de son cabinet ; Marlow, Gille et Ansel, délégués de l’ académie de langue et de littérature françaises; Toussaint, Van Boelaert et Van Zijpe, secrétaires perpétuels des académies flamande et française de Belgique; Doutrepont et Bayot, Délégués de l’ université de Louvain; Pasquier, représentants de la ville de Louvain, notons MM Doms, ff. de Bourgmestre; Les échevins Van Leeuw, Van Langendonck et Thieriar.
C’est monsieur Doms qui prit le premier la parole pour caractériser l’ esprit dans lequel Louvain avait voulu cette manifestation à la mémoire de nos fils.
En inaugurant dans notre ville flamande, le buste d’ Albert Giraud, poète d’expression française, nous avons voulu affirmer notre incessant désir de voir élargir le champ de notre culture et de nos admirations. Albert Giraud, naquit à Louvain le 23 juin 1860. Louvain, ville des fondeurs de cloches et des ciseleurs d’art, ville universitaire, ville de pensée, dans laquelle notre passé s’affirme avec tant de splendeur et de noblesse, ville de notre coeur, dit notre poète, où jadis nous chatâmes l’ivresse des vingt ans et de la liberté. Ecoutez sonner les cloches de nos carillons pendant que vous cheminez le long des rives de la Dyle; revenez vers le centre de la cité et admirez le travail d’ orfèvrerie des tours de notre hôtel de ville, du portail de nos églises et vous coprendrez l’art d ‘ albert Giraud, cet art d’une richesse luxuriante qu’ il l’ apparente aux plus grand poètes.
Aprés M. Doms, M. toussaint van Boelaere célébra en Giraud un poète qui, bien qu’infidèle à sa langue natale, est resté fidèle à sa race par l’amour bien flfamand qu’il témoigne à ses peintres et aux magies de la couleur.
Puis, un jeune élève de l’Athénée,M. Frans, salua la mémoire du poète et M. Valère gille appporta à Giraud, non seulement le salut de l’ Académie, mais le fidèle souvenir d’ une vielle amitié.
Ce beau discours , d’ une langue parfaite et d’une émotion profonde, évoque, comme il le fallait, une âme qui, après avoir voulu se réfugier loin du monde, dans sa tour d’ivoire, devait être ramenée au coeur m^me de la vie collective par les horreurs de la guerre.
C’est le thème que le ministre Bovesse devait développer ensuite, après que M. Pasquier eût apporté à la mémoire de Giraud l’ hommage de l’ association des ecrivains belges
[…] Le Soir, ¨[s.d.], par Richard Dupierreux