ANDERSEN Christian Erwin

Biographie

Né le 21 janvier 1944, à Charleroi, en Belgique, d’une mère flamande, Yvonne Marie Dhuygelaere, et de André Maurits, d’origine danoise par son père, sa famille est de condition modeste. Après Christian, deux autres enfants, René et Nicole, viennent compléter le foyer. Christian Erwin s’éveille très tôt à la politique. À 16 ans, il participe aux manifestations et aux piquets de grève des ouvriers de Charleroi en grève générale (quasi insurrectionnelle) au cours de l’hiver 1960-1961. À la faveur de cet événement, il devient militant actif du P.O.R(T) – Parti Ouvrier Révolutionnaire Trotskyste, section belge de la IVème internationale (Posadiste). À 17 ans il est secrétaire de la cellule de Monceau-sur-Sambre (Charleroi). Peu après, il est coopté par le bureau politique et exerce les responsabilités de la sécurité de l’organisation et de membre suppléant du bureau européen de l’internationale. À cette époque déjà, il joue un rôle éditorial en participant à la réalisation et à la publication de ” La Lutte Ouvrière “, le périodique du groupe. Élève turbulent et rebelle, Andersen ne se soucie guère de ses études et les échecs se succèdent. En septembre 1961, il renonce à poursuivre ses études et trouve du travail, en qualité de commis, dans une banque de Charleroi où il passera sept ans. Il sera ensuite ouvrier dans l’alimentation en gros, comptable dans une câblerie, à Gilly, avant de réussir des examens de recrutement et de devenir, en mai 1970, fonctionnaire au Ministère des Travaux Publics où il sera en activité jusqu’en 2005. Bien que très actif au sein de son parti, Andersen, au grand dam de ses camarades, garde un esprit critique. Avant même les événements de “mai 68”, avant même “le coup de Prague” et l’invasion de la Tchécoslovaquie par les troupes soviétiques, il a cessé de “croire au marxisme”. Il s’en éloigne, ne supportant plus le dogmatisme et les ukases, la discipline de parti et ses absurdités. Son caractère rebelle, son goût de la liberté, ne pouvaient en supporter davantage. Il se radicalise et évolue vers des positions anarchistes. Mais, en définitive, c’est en poésie qu’Andersen s’engage le plus durablement. Au début des années 1970, il mène à Charleroi, une existence quasi bohême et fréquente les peintres et poètes Philippe Henri Coppée, Ghislain Olivier, Jacques Ransy, André Aubry, Salvatore Gucciardo, Jean-Marie Flémal (dit Zappa)… Ils sont ses compagnons des virées répétées et interminables de cette époque “folle” mais joyeuse et féconde.
En 1973, à la suite d’une rupture amoureuse, il se met (de son propre aveu “par exorcisme” ) à écrire ses premiers poèmes qui seront, par la suite, publiés sous le titre de Terre sang feu et s’en va, avec un ami suisse, René Québatte, tenter une traversée du Sahara, en auto-stop. C’est l’échec. L’équipée se termine à El Goléa mais elle est le début d’une longue série de voyages, tout aussi aventureux les uns que les autres, à travers l’Afrique. 1973 apparaît donc comme une année charnière dans la vie d’Andersen. C’est, en effet, aussi, l’année de son “entrée en écriture”. Les premiers textes sont griffonnés sur une table d’un bistrot, “le Club”, situé rue de Marchienne, à Charleroi, qui est le point de chute de la jeunesse contestataire et “fêtarde” de la région. En 1976, publication, à compte d’auteur, de Terre sang feu, premier livre. En 1977, Éléments pour un sacrifice (Prix Gauchez-Philippot) paraît chez Louis Dubost Éditeur (France). Enfin, en 1982, Ligatures & caillots mécrits, est publié, préfacé par Werner Lambersy. De 1982 à 2003, Andersen cesse complètement d’écrire pour se consacrer tout entier à sa recherche « saharienne ». Certains le tiennent pour mort. On n’entend plus parler de lui.

En 2003 il réapparaît et écrit Adresse aux chiens & Petite histoire du meurtre. En 2005, il rédige Poèmes aux enfants tristes du siècle innommable. Il écrit aussi quelques essais : L’exorcisme du sable, L’évidence, La fonction poétique, La norme jubilatoire, J’ai déserté mes haricots…

Avec son amie Nicoletta Gossen, il crée un site internet de poésie bilingue Verbalata Poésie. Il fonde une collection de poésie baptisée « rien qu’ 1 poème » et une association: Profana Bellica CRM – Coordination des Résistances aux Monothéismes.

Christian Erwin est décédé le 19 décembre 2020.

 

 

 

Bibliographie

Poèmes :

  • Le cri de la myrtille : sur un marbre blanc. Tapuscrit.
  • Terre sans feu, poèmes, à compte d’auteur, 1975.
  • Éléments pour un sacrifice, poèmes, Éditions Louis Dubost, France, 1977, Collection « Le dé bleu », n°16. Prix Gauchez-Philippot.
  • Ligatures et caillots “mécrits” et poèmes antérieurs, poèmes, Éditions Louis Dubost – France, 1982, Collection « Le dé bleu ».
  • Adresse aux chiens et petite histoire du meurtre, poèmes, Éd. Profana Bellica C.R.M., Charleroi, 2004.
  • Poèmes aux enfants tristes du siècle innommable, Éd. Profana Bellica. Charleroi, 2006.
  • 33 ritournelles des temps obscènes, poèmes, Éd. Profana Bellica C.R.M., Charleroi, 2007.

Prose (*) :

  • L’exorcisme du sable, réflexion inachevée sur une expérience saharienne en compagnie des dieux.
  • J’ai déserté mes haricots.
  • La norme jubilatoire
  • La fonction poétique
  • Lévidence
  • Le poète habite une étincelle
  • Poètes-chamanes

(*) Ces cinq textes sont publiés aux Éditions Profana Bellica C.R.M., Collection « Rien qu’un poème » ; 2007.   À consulter : http://www.over-blog.com/com-1122191940/Christian_Erwin_Andersen.html

Textes

 

Extraits du tapuscrit : Le cri de la myrtille : sur un marbre blanc.

Ma vie est une équation sans inconnue une monstruosité mathématique un délire euclidien   à tout bien considérer il eut mieux valu que je l’ignore   je croyais que comme toutes les vies elle avait eu un commencement et qu’elle aurait une fin   mais voilà que je me mets à douter et ça remet tout en question   je croyais qu’il y avait une inconnue et il n’y en a pas   ma vie est une abomination mathématique une traîne d’étoiles rouges au cou d’un théorème noir

 

******************************

On a bien ri une fois n’est pas coutume bien épilogué aussi ça ne fait de mal à personne   le jour s’est défait pièce par pièce nous avons perdu nos fous noirs blancs l’échiquier s’est dépeuplé peu à peu   la nuit frappait du poing sur la table exigeant sa part de rêve   nous avons cédé elle a tout repris et le jeu a repris un autre jeu avec d’autres couleurs     ************************************   Entre Vizinar y Alfacar : sur les lieux de l’assassinat, en 1936, de Frederico garcia Lorca   Imagine dos au rocher l’aube épaulant son fusil et sur le cran de mire juste ce qu’il faut de soleil blafard pour le coup précis et la mort exacte   puis très vite comme déboutant d’une ravine le cabri noir de la peur et dans les yeux goulus de l’homme à bout portant une chevrotine de thym de menthe de laurier   enfin la poudre vive son crachat de métal et la montagne ivre d’échos qui ne dessoûlera plus     ************************************   Ma parole ne se couche jamais elle dort debout et accompagne le soleil   si ma parole se couchait le soleil qui meurt où il n’y a pas d’hommes pas de veilleurs mourrait à son tour   mes mots veillent la vie continue je chante et le soleil est mon ami     ***************************************     Mon sang est né au Pays des Chiens à deux pas des sources du questionnement il en est le féal et fleure bon l’époque   enfant en bail de violence il est de fureur surtout il hante les banlieues insurgées   mon sang a de la voix elle gronde si on venait à le blesser nul doute elle prendrait les armes car lorsqu’il s’élève le chant de mon sang réjouit mes pères   comme eux il est vif et fort il guerroie avec les hordes ses fêtes sont mes lumineuses liturgies elles incendient mes saisons allumant sans faiblir les contre-feux des autodafés ou des bûchers   le chant de mon sang s’adresse aux chiens conçu dans l’infini il peut être entendu du plus grand nombre je le tiens des fourmis envoyées par les sbires elles venaient avides à mon berceau pour voler le miel de mes lèvres et tenter de tarir ma parole   mon sang aujourd’hui est joyeux il n’a cependant pas toujours chanté jeune il fut de larmes celles qui courent sur le fil des couteaux   mon chant a mémoire du linceul d’aube blême qu’il porta en ces temps des rafles et d’injures où ça cognait ferme dans les crosses aortiques   mon chant a beaucoup appris sa bannière est d’ecchymoses sur fond de casse-tête   il est devenu fier mais il peut être différent : il parle chien aux chiens.     ********************************   Enfant j’aimais la compagnie des puits leurs grands yeux d’eau sombre et profonde leurs fortes épaules de pierres scellées le chant lancinant des poulies à la peine   sous ce docte magistère je connus mort heureuse sans avoir à la subir en épousailles fatales ce fut fête je pus lui rire aux nez   les puits ironiques appelaient mort heureuse les pièges de sens et les contresens de la raison l’atonie doucereuse du giron la narcose des rêves les distillats ténus et fragiles de la conscience   ils m’enseignaient l’ivresse des vertiges m’initiant à la dangereuse proximité des gouffres   les puits furent mes miroirs j’y vis mon double en face j’appris à lire sur les lèvres de ma mort

 

Extrait de Terre sang feu, premiers écrits, en 1973.

ÊTRE

je suis entré en moi
sans un bruit dans mon tumulte
pas un cri du bois
pas un grincement du pêne
rien
à peine le crissement d’une larme
sur le désert d’une joue

j’ai poussé le verrou
comme on passe la main
sur un front moite
ou sur un ventre chaud
et la poigne qui me serrait le cou
a relâché son étreinte
le grabat rouge de ma peau
me tendait les bras
et dans un râle de vague
sur le cimetière d’une plage
je m’y suis étendu
j’ avais payé mon dû

j’ ai fermé les yeux
et aux horizons de ma rétine
tout a vacillé
le soleil de ma nuit interne
m’a mordu les paupières
insensiblement le galop furieux
des jours des soirs des nuits
s’est estompé
mille hennissements l’ont salué
là-bas ciel et terre
s’accouplaient sauvagement

dans la gouttière oxydée
de mes artères
le sang s’est remis à couler
à longs glouglous
au rythme de ma respiration
se commet l’assassinat
inlassablement répété
de l’oxygène
des armées en déroute
refluent dans mes veines
mon sang charrie des cadavres
les électrons même
ont déposé les armes
brisé les fusils
signé l’ignoble trêve
et aux créneaux de la citadelle
ne se dressent plus
que de sombres déclins
tandis que
dans mon poing crispé
s’apaise
la brûlure du poignard
qu’insidieusement l’on m’a glissé
en me disant :
la vie


Extrait de Éléments pour un sacrifice (1977)

Ce recueil a reçu le prix Gauchez-Philippot.

cri

de la myrtille sur un marbre blanc
une saison saigne le corps éructe

 

le verbe – feu – follet
énonce la mort
aux lèvres bleuies

tout est noir
bleu
crache son dégoût
un soleil schismatique
érige le chaos

les racines s’effarent
la terre bâfre
les héliotropes
la cendre trace
ses ellipses
la parole scelle les judas
inscrit l’ombre et le feu
dans la durée

cri
de la myrtille
sur un marbre blanc

personne n’entend
tu ris
mes mots ont les yeux du sommeil


Extrait de Ligatures & caillots mécrits (1982)


nous vivons un règne de vase
quelque tropisme calme
de poumons
gorgés d’eau

le vitriol des horloges
a défiguré tout espace
défait ces plissements du temps qui
conférant les rides
gravaient notre durée

nous sommes
sur drap de batiste noire
la pâleur des corps captive
de candélabres d’aisselles

            ***

rien n’est inscrit de sève
pour brasser le vide

questionne si tu oses

l’iglou des coudes autour du feu
est-il si rond

la bouche si close
n’accueillant plus
qu’en blanc de porcelaine
l’obole
des ligatures et caillots

           ***

bien avant
elle eut des cliquetis de cils longs
à fourbir les larmes

l’Aïd commence par l’agneau
et passe par le sang

la fête n’a ni queue ni tête
malgré les psaumes décapités

            ***

 rien ne cadenassait
le coffre à outils du viol
trois mots suffirent

une ambulance me traverse
avec ses cris de goret
qu’on égorge

***

je suis qui mêle orchidées et chair
le métronome insomniaque des danses

         ***

il faut
agrandir la maison
que le feu
y tienne moins de place
les chaises peu d’espace

la table sera nette
de tout relief
pour abattre les cartes

l’anémie du geste
ne peut échapper

qui sortira l’as

***

grand vent la nuit
dans les haubans du sommeil
au fil à plomb de la douleur
vibrent les ventres des noyés

on bivouaque

outre nœuds d’ouate des silences
le tu reclus
toujours siffie
en nos cordages de bave

poids de paupières
mots de passe
assaillent les guetteurs

entre berges de suif
passent les cachalots de la parlotte
happés par le large

Les amants du chemin creux (2007)

pour mon pote Diegane,

le désir les a couchés sans appel
dans l’herbe tendre du chemin creux
la meute est loin ils jouent et jappent
la connaissance  participe de l’obscène
et procède de ses joies

nus les corps célèbrent le sacrilège
à la face du ciel de dieu confondu
en bons chiens de retour au chenil
ils se déchireront et le savent

meurtris et défaits à l’échouage
dans le no mans land des équivoques
dextre ou senestre liés les amants
joueront aux dés leurs démons
à qui  gagne perd et meurt

ils cultivent l’illusion sur le trèfle
de s’aimer vraiment à quatre feuilles
il l’avait trouvée offerte
et sitôt sans ambages troussée
à présent son sexe rose bée  luit
et clapote sous sa main

agonisante  elle gémit part en cascades
s’y  noyant  en cris spasmes et saccades
l’homme grogne et jure on le croirait fou
d’un coup terrible de son sexe il l’éventre

le sang blanc du sperme gicle brûlant
par la carotide du désir qui l’égorgeait
il meurt en sanglotant elle lui dit merci

 

Quelques textes de l’auteur.

 

L’évidence de Christian Edwin Andersen.

J’observe beaucoup mes contemporains. Cela m’évite le théâtre… Mais quel cinéma! J’vous dis pas. J’explique. En quelques phrases.   Avez-vous remarqué qu’il n’y a qu’une chose que l’homme, obstinément, ne peut pas voir : c’est les évidences. Ça saute aux yeux. Que l’une d’elles se présente, il secoue la tête et se met en fureur. Il dit : non, non et non, l’homme. Il ne veut rien savoir. Il doit avoir lu Daumal, pas Camus. De toute façon, bien qu’il s’en défende, c’est à Jiji Cri qu’il carbure et là c’est mal barré. Un de mes amis, qui est alcoolo me l’a confirmé : il paraît que c’est une maladie, on s’en sort difficilement. On ne peut même pas leur en vouloir. De toute façon, a-t-il ajouté, c’est les autres qui souffrent.   Il a vu – et souffert – l’Inquisition. Il en a senti les odeurs de chair brulée. Mais il n’a jamais cessé, et jusqu’à écœurement, de déguster l’hostie du Pape. Il aime qu’on lui donne du goupillon l’animal. On a beau lui dire que l’on est entré dans l’ère postchrétienne. Il feint de ne pas comprendre. Il ne se sent pas concerné. L’ère post quoi? Serait-ce que, l’admettant, il se sentira contraint de faire quelque chose? Ou, perversion suprême, est-ce parce qu’au fond il a une âme d’esclave et que sa vraie nature est d’en baver? Bref. De toute façon, la bave du crapaud n’atteint pas les étoiles…   Auschwitz? Il s’en est rincé l’œil. Même s’il en redemande. Pour y faire de la savonnette arabe ou tzigane. Mais il n’est pas raciste. Bien sûr que non. Simplement, il nourrit la bête, la sienne, une belle bête, qui est au chaud, dans son ventre. Il ne peut quand même pas cogner sa femme tous les jours. Faut pas exagérer, voyons!   Autre exemple de sa mauvaise foi – ah la foi – la pollution? Ne lui demandez pas de consommer moins : lui sa bagnole elle roule comme celle du curé, à la foi aussi, à l’eau souvent, même pas bénite, par souci d’économie. Non, lui il trie ses plastics, ses verres, ses cartons, les siens… C’est les autres qui polluent. Et j’en passe. Pas envie de recopier l’annuaire téléphonique pour que vous puissiez les appeler et leur passer un cigare : puisque c’est forcément pas eux qui polluent, c’est vous. Et c’est vrai. Vous!   Et encore, je fais attention à ce que je dis? Je pèse mes mots : un sale type, l’homme. Un fieffé hypocrite. Un salaud. Pour tout dire, je ne l’aime pas. C’est simple : je suis un antihumaniste moi. Mais qui se retient. Vous devez le sentir d’ailleurs, ma retenue. Car je ne voudrais pas avoir à le combattre, l’homme : c’est un vicieux. Les coups fourrés, il connaît. Un mec dangereux, je vous dis. Je n’aimerais pas que l’on me retrouve raide, étouffé, un matin, dans la ruelle derrière l’église. Ou la mosquée, ou derrière n’importe quel temple, avec une bible, un coran, ou le Popol Vuh, ou l’Avesta, ou le Yi King, un Simenon ou même les aventures de Tintin, voire tout à la fois, enfoncés dans la gorge. Vous ne vous en doutiez pas? Et bien si! J’ai peur aussi, moi, parfois.   Et j’en rajoute. Parce que, s’il ne veut pas voir en face les seules choses qui vaillent, les très rares et précaires « évidences » qui se comptent sur les doigts d’une main, c’est qu’il préfère croire, l’homme. C’est plus confortable. C’est qu’il sait, le futé, que son hominienne espèce elle ne va pas rigoler longtemps encore. Que les carottes sont cuites. Il sait cela, parce qu’il va à l’école l’homme, maintenant. Il n’ignore pas que son espèce, en naissant, était appelée à périr et périra, quoi qu’il fasse. Et que comme tout ce qui ne doit la vie qu’à la mort, tout, elle a entrepris de mourir, sur le champ, illico presto, l’espèce, à l’état embryonnaire déjà. En quelque sorte elle se réalise par régression, auto dégénérescence, l’espèce. Dans tout nouveau né, il y a du cadavre, is it not ? C’est son destin, à l’espèce, le sens et unique sens que l’on puisse lui prêter pour autant qu’il faille lui en trouver un.   Et alors ça lui fout le tournis à mon compagnon de pré carré. Je vois bien qu’il broute. Mais il ne digère pas. Ça le travaille, comme on dit. Il se fait du mouron. Je le sens irrité et prêt à tout casser. Je me méfie car au lieu d’en tirer la plus grande félicité de ce constat (puisqu’il n’y a plus de soucis à se faire pour l’avenir, allons-y, jouissons plein tube et éprouvettes) ça lui met les chocottes à mon soi-disant frère l’humain. Il voudrait bien jouir mais il n’ose pas. Il a peur que sa voisine le voie ou l’entende. Ça ne se fait pas. C’est mal vu. Alors, à la carte, il souffre de l’estomac, de l’automobile, du portefeuille, de sa femme, de sa maîtresse, des ses enfants.   Il souffre surtout beaucoup de ce qu’il ne fait pas. De frustration comme on dit. Il souffre de tout ce qui peut le faire souffrir, à satiété, goulûment quasi. Le Galiléen, Hanemanien avant l’heure, lui a enseigné que le meilleur remède à la douleur c’est la souffrance. Il a envie de se flinguer. On peut s’attendre à tout. Poussé par le désespoir, il est devenu inventif confirmant ainsi que l’angoisse est la clé du progrès : il a assassiné les dieux qui voulaient qu’il danse « comme dans la folie des bals musette et que son envers soit un véritable endroit » (dixit Artaud, de mémoire) il a inventé la maladie des prêtres (la dot et l’antidote), la médecine qui a réduit son corps à une fédération mal ficelée d’organes.   Même les frileuses étoiles, dans la pluie froide des nuits, en rient. Et j’en ris avec elles. Nous nous comprenons. Je ris souvent. Notamment en travaillant. J’ai ri cent fois en écrivant ceci. « Frères humains qui après nous vivez, N’ayez les cœurs contre nous endurcis »… (L’épitaphe Villon) – Décidément vous saurez tout.   Charleroi, le 23 août 2003. Billet d’humeur n°2.  
La norme jubilatoire.   Un fondement essentiel de ma pensée est la « norme jubilatoire ». Cela tant dit, je me trouve aussitôt tenu de préciser que c’est ici de ma pensée de poète qu’il s’agit et ce n’est pas innocent.   La fonction de la pensée poétique, dès qu’elle apparut, dans la haute antiquité, fut, notamment, d’organiser et « mettre en musique » le ballet des divinités, de conseiller sagement les maîtres avisés qui y recourraient, d’éloigner les ténèbres sans pour autant exposer aux coups de soleil.   C’est à quoi j’aimerais qu’elle retourne et c’est parce que malheureusement elle s’en éloigne que la remarque est d’importance. C’est pour ça que je crois nécessaire de vous préciser comment je vois les choses et comment je fonctionne….   La « norme jubilatoire » règle le souci permanent de ne prendre, le plus souvent et posément possible, pour repères pérennes fiables, soient-ils moraux, éthiques, philosophiques, politiques ou autres que ce qui n’exige ni efforts, ni sacrifices, ni renoncements, ni soumission, ni abandon, ni auto mutilation tout en participant harmonieusement au grand concert du renouvellement de l’infini de la vie dont l’homme est partie, mais partie seulement, fondamentale bien sûr, mais pas d’avantage que la fourmi, que le saule, que le tungstène, etc…   Nos règles de vie, selon cette norme (qui ne risque guère d’être publiée au journal officiel), doivent être souples et intimement adaptées à la volatilité de notre existence éphémère pour la faire resplendir jusqu’à fascination.   Chaque vie doit devenir, par son éclat, une invitation réitérée à l’éternité. Avant de vouloir le bonheur des autres, nous aurons soin de prendre notre pied et, surtout, nous le garderons.   Car il est grand temps, non seulement de rompre avec la morale du ressentiment et de la culpabilisation que nous tenons du judéo-christianisme, mais aussi de peaufiner et diffuser nos valeurs païennes aussi paillardes puissent-elles paraître.   Nous pourrons alors, et une fois pour toutes, aimer, vivre et mourir comme il est bon de le faire : follement, sans retenue, à pleine bouche, à pleins poumons!   J’aimerais que l’on enseigne à l’homme le « souci raisonnable de soi » (la raison n’étant en l’occurrence qu’un « grand bon sens incarné » dicté par l’enivrant breuvage de nos « sens » et de nos chairs ») avant le « souci fallacieux, souvent misérabiliste ou hypocrite de l’autre ».  
  Pour Enno.   Rescapé de la traversée amniotique tu dors oublieux des tempêtes de l’assaut des vagues qu’affronta le frêle esquif maternel tu dors au creux de tes rêves à même le sable sur ta première plage blonde tu dors comme dorment les étoiles au fond du ciel les blanches sirènes au fond des océans sur les genoux des tendres baleines tu dors Enno tu n’as encore pas inventé les nuages ni les orages ni le gros temps dors Enno au creux de tes rêves dors Enno sur cette plage première dors avant que ne s’invente la première blessure dors.  
  Lettre à René Pommier du 24.11.2003   « C’est un bonheur de pouvoir se tromper et j’ai été très heureux … ». C. E. A.   « Cette expérience m’a rendu très méfiant non seulement à l’égard des religions et de tous les obscurantismes, mais aussi de toutes les idéologies, voire de tous les systèmes de pensée… ». R. P.   Permettez-moi d’ajouter ceci, à mon message précédent, en me référant à votre phrase en exergue:   Je me demande dans quelle mesure les systématisations ne sont mêmes pas plus dangereuses que les pensées qu’elles véhiculent, ou sur lesquelles elles se fondent, s’articulent. Nous mêmes dans notre dénonciation de l’Islam et du judéo-christianisme devons prendre garde aux globalisations, aux systématisations, aux redites et resucées assénées à répétition et donnant, ou prétendant donner, l’illusion d’être la clé qui ouvre toutes les portes à la compréhension, à l’intelligence des problèmes.   J’ai fréquenté des « laïques » qui étaient proprement insupportables et ridicules car ils déclinaient à l’infini toutes les formes de leur pensée, ou dirais-je mieux de « leur reliquat de pensée » avec le même fanatisme que les imams, que n’importe quel moine du Tibet, que n’importe quelle sœurette du sacré cœur de Jésus.   Ils transforment ainsi le propos laïque en ce qui ressemble par trop aux professions de foi et dissuadent la recherche déjà tellement handicapée par l’éternelle paresse de l’esprit.   Nous devons constamment, même si c’est fort difficile, souligner la « précarité » de toute pensée et en particulier de la nôtre car seule cette affirmation du droit à l’erreur, seule cette extrême et profonde modestie, nous autorisent à dénoncer les totalitarismes, quels qu’ils soient et à garder « la conscience relativement propre ». C’est cette conviction profonde que toute pensée est infiniment précaire, « qu’une idée n’est qu’une idée » qui nous autorise mais aussi nous commande d’être aussi intraitables dans la lutte contre les idées que nous devons être plus respectueux de celui qui les véhicule même si nous abhorrons ce qu’il a dans la tête.   Je ne dirais pas que la pensée est une maladie de l’esprit mais je m’en méfierai toujours et une certaine prophylaxie, une sorte de vaccination périodique (comme celle contre le tétanos) ne serait pas un luxe.   Le corps est bien moins dangereux : comme l’univers, comme les systèmes solaires en formation ou en extinction il avale, il excrète, il continue à participer de l’infini quand déjà la pensée est mourante, voire morte.     Sur cette pensée profonde! Je vous salue de nouveau,

  • E. Andersen.

 

 

 

Commentaires

Document publié en janvier 2004 par la revue littéraire Remue – Méninges (Charleroi)

ENTRETIEN AVEC C.E. ANDERSEN

Réalisation Eric Allard

 

Christian Andersen, d’où viens-tu ?

Parce que l’hypothèse de l’apparition de l’homme en Afrique est celle qui me séduit le plus, j’ai choisi de naître entre les sources du Nil et la Grande Faille d’Afrique, du côté des lacs Edouard et Victoria, aux pieds du Kilimanjaro. J’ai dû, pour arriver à vous, suivre des chemins tortueux et je me suis égaré souvent. Récemment encore, vers 1976 – 77, je me suis même perdu à Marchienne-au-Pont, chez un peintre raté qui a tenté de m’envoûter. On ne m’y reprendra plus. Il y a mieux. Mon voyage, qui n’est pas fini m’a conduit, vers 1720, à Erslev, dans le nord du Danemark, puis à Hambourg, enfin à Charleroi. J’avais alors les jambes de mon père André, les poumons de mon grand-père Erwin, les yeux de mon arrière grand-père Jens Peter et les mains de Anders Skomager. Ils sont tous en moi, là, je le sens et je le sais à ce qu’ils remuent. Demain je repars. Vers le sud. Toujours plus loin.

 

Quels sont les auteurs ou artistes qui t’ont marqué, les livres qui ont changé ta vie ?

Un livre, tous les livres même, ne suffiront jamais à changer la vie. Le fatum est tellement fort. Mais certains livres ont été des stimulants, des phares dans la nuit noire : Georges Bataille, Céline, Artaud, Nietzsche, Desnos. J’ai vécu à Bruxelles et là, certains « toutes boîtes » comme Vlan ont aussi influencé mon destin… l’aventure était au coin de la rue, à la faveur de mes déménagements. La poésie est partout.

 

« Mon appétit de désert ne fut sans doute qu’un appétit de poésie et un appétit féroce de vivre »: écris-tu dans L’exorcisme du sable. Sans parler de tes divers engagements… On pense aussi à cette citation de Joë Bousquet : « plus de poètes, des êtres de poésie. Les êtres de poésie remplacent les poètes et la poésie » Peut-on vivre la poésie autrement que par l’écriture ?

 

L’appétit de vivre, quand on a le bonheur de l’avoir, est le plus extraordinaire des poèmes… Il est en vers libres, sans rimes ni raisons. C’est, de loin, le plus beau que je connaisse. Il me fait penser aux sagas de mes proches ancêtres Vikings ou aux histoires véhiculées par la tradition orale de ma très ancienne parente Lucy qui résidait non loin du lac Turkana, en Ethiopie, dans la vallée de l’Omo… Je les cite parce que cet appétit merveilleux c’est d’eux que je le tiens…

Le reste n’est qu’une question de formes et puisque je viens de citer Artaud, faisons-le parler : « Vivre c’est brûler des formes ».

 


Tu as cessé d’écrire pendant vingt ans. Peux-tu comprendre les écrivains qui ont fait une parenthèse dans leur oeuvre ou ont carrément arrêté (voir Bartleby et cie de Vila-Matas) ?

Chacun à ses raisons, ou n’en a pas, c’est selon … Moi, je n’avais plus rien à dire, j’étais « vide » et en pareil cas je crois qu’il faut fermer sa gueule. J’étais amer, bien sûr, mais c’était le prix de l’authenticité. J’ai une tellement haute opinion de l’art en général et de la poésie en particulier, de leur fonction dans la société, que je n’admets pas les faussaires, les singes, les écrivasseurs ou les barbouilleurs comme ce peintre qui aurait voulu m’envoûter. Il y en a trop, beaucoup trop. Il faut bien comprendre que nos civilisations, plus elles vont décliner, plus le cadavre des morales judéo-chrétiennes va se décomposer, vont avoir besoin, impérativement, de l’art et en premier lieu de la poésie et des « êtres de poésie ». Nous devrons être prêts.

 


Bonello, réalisateur, déclarait récemment (Les Inrockuptibles n°411), à propos de son dernier film Tirésia : « Le mythe grec, c’est du polythéisme ; un bordel sauvage, barbare jouissif, très vivant, et, aujourd’hui, on se retrouve avec un Dieu unique, c’est-à-dire quelque chose de très austère où la notion de destin a disparu au profit de la culpabilité » Je suppose que tu souscris à cet avis…

Oui, bien que certains termes me semblent inadaptés. Je le formulerais autrement. Je ne me référerais pas uniquement aux Grecs. La vie ne peut être digne de ce nom et d’être vécue que dans son « essence la plus profonde, sa fonction la plus sublime» : la création. Et que voulez-vous inventer de plus prodigieux – et de plus nécessaire – que des dieux ? Chaque jour, à chaque moment, dans toutes les circonstances ? Pour la joie comme pour la peine, des dieux cruels ou fraternels, beaux ou laids, sages ou écervelés … comme nous, inégalables !

 

 

Tu déclares : « Je suis un antihumaniste qui se retient ». C’est mal aujourd’hui d’être antihumaniste ? L’homme ne serait-il pas bon ?

L’homme n’est ni bon ni mauvais. Comment pourrait-il être l’une ou l’autre chose puisqu’il n’a jamais, de toute son histoire (sinon à l’époque des chasseurs-cueilleurs qui, c’est scientifiquement établi, fut une période d’abondance), eu le loisir, le bonheur « d’être » , simplement « d’être ». Et puis ces qualificatifs sont tellement grossiers, approximatifs !

 

Quant à l’anti-humanisme il fallait que l’on y arrive. Le bain de sang dans lequel nous barbotons a assez duré. On ne peut décemment pas appeler humanisme l’ensemble des doctrines (philosophie, éthique, conception politique, etc …) qui ont conduit à cette faillite sanglante. Il faut les dénoncer, toutes ! Il n’y a pas que Marx, Lénine, Trotsky et leurs amis qui avaient de l’homme une vision infantile. Les autres aussi, quasi tous. Et ça vaut aujourd’hui encore. La séculaire duperie de l’humanisme est peut-être ce qu’il faut combattre avec le plus de vigueur, le plus impitoyablement. Il faut simplement espérer que la période « anti » ne dure pas trop longtemps, qu’il n’y ait pas trop de casse. Et lorsque je dis que je me retiens, c’est une boutade … mais partiellement seulement… je me retiens parce qu’il est dangereux d’être antihumaniste, que c’est éminemment subversif et que j’ai déjà un volumineux dossier à la Sûreté de l’Etat…

 

Bien sûr je serais le premier à souhaiter que l’on s’attaque au problème avec un esprit positif, sans violence mais la violence va éclater, partout . Ca va déraper car ceux qui se cachent derrière le paravent du mythe humaniste, les conservateurs aussi bien que les « progressistes » grugés vont devenir enragés en sentant toutes leurs valeurs s’effondrer avec les cours de la bourse !

 

La redéfinition de l’homme doit être radicale. Elle a commencé d’ailleurs. Ouvrez les yeux. Les intellectuels et les artistes doivent y tenir le premier rôle et s’y préparer. C’est par les voies de l’art que la connaissance de l’être humain a le plus avancé, par la quête inlassable de la beauté qui seule peut sauver le monde.

 

Il faut que l’on sache qui est l’homme « dans son tréfonds, au plus profond de lui-même » et ce qu’il veut avant de lui fourguer des doctrines, des dogmes, de l’enfermer dans des codes, des lois … les Grecs avaient commencé ce travail qui a été réduit à néant par la catastrophe du monothéisme mosaïque. Car enfin, parler d’humanisme c’est comme tailler un costume à un fantôme : l’homme n’existe pas encore … il arrive… là-bas…essayons de faire sa connaissance, de prendre ses mensurations, de le connaître. Il est couvert de la boue du christianisme … du communisme, du nazisme, du capitalisme… de l’égoïsme libéral… laissons lui le temps de se doucher. Ensuite, et alors seulement, quand il aura soufflé un peu, il parlera … et je vous assure qu’il y aura des surprises quand il dira « ce qu’il veut, ce qu’il lui faut ». Qui est si simple…

 

 


Henry Michaux : « Qui laisse une trace, laisse une plaie .» Vivre pleinement, c’est nécessairement blesser ?

Si, comme dans Maldoror, on « plante ses ongles dans le ventre d’un bébé » oui. Mais vivre pleinement n’implique pas que l’on blesse. Et puis, qu’est-ce que la « blessure » ? Les griffes laissées dans le dos par une maîtresse exacerbée ? Une épisiotomie est-elle une blessure ? Une violence oui. Une brutalité non (Voir la distinction faite par Jean Genet). Tout est relatif et je prévois que dans les quelques deux ou trois centaines d’années à venir le sens des mots va changer considérablement, jusqu’à inversion complète même, avec l’arrivée, enfin, de l’homme… Michaux a dit – et surtout écrit – de bien meilleures choses.

 

Valéry : « Le poème, cette hésitation prolongée ente le son et le sens. » ; Michaux : « La seule ambition de faire un poème suffit à le tuer. » Ta définition du poème ?
Ce qui est sacré ne peut être défini. Ce tabou doit être total. On ne peut pas vivre sans tabou. Impossible !

 


Quand es-tu déjà mort ?

Je ne m’en souviens plus. Mais pas assez souvent. Je manque encore d’expérience. Pourtant il serait temps… sinon je risque de ne pas savoir comment m’y prendre le moment venu !

 


Qu’est-ce qui te fait lever le matin ?

L’aventure d’une nouvelle journée.

 


A quoi as-tu renoncé ?

Définitivement à rien. C’est une réponse définitive.

 


A quoi te sert l’art ?

A cultiver mon jardin.

 

 
Qu’as-tu été capable de faire par amour ?

Douter, douter, douter.

 


Le don de la nature que tu aurais aimé avoir ?

Je n’ai pas de convoitise et si j’avais trop de dons ils se chamailleraient.

 
Si tu pouvais modifier une seule chose dans ta vie, ce serait quoi ?

Sa masse. Jusqu’au seuil critique.


L’engagement (politique) qui te paraît prioritaire aujourd’hui ?

Développer la démarche antihumaniste, expliquer ce que c’est et pourquoi on doit passer par là, favoriser l’émergence pacifique de l’homme post-chrétien, revenir au paganisme, au chamanisme (on en parle beaucoup depuis quelques années, c’est révélateur de besoins profonds) mettre un terme au développement des macro sociétés invivables et suicidaires qui conduisent êtres et choses à l’abîme, il n’y a pas une mais des familles humaines, il y a « des » civilisations, il y a « des » cultures » il ne peut y avoir une seule et gigantesque société, il faut revenir aux microsociétés … hiérarchisées et codifiées à la mesure de l’homme… et CA URGE ! Et puis, ceci, pour que vous y réfléchissiez (et je resterai volontairement sibyllin) : la nature, qui est si belle… savez-vous qu’elle est profondément inhumaine ? Avez-vous remarqué qu’elle ne fait pas de sentiments ? Mais peut-être n’êtes-vous pas d’accord avec Artaud : « la cruauté est une des formes supérieures de l’amour ! ».


Quel est ton vers préféré ?

Il est de Robert Desnos : « Enfin sortir de la nuit, sortir de la boue. Ho ! Comme elles tiennent aux pieds et aux membres la nuit et la boue »…


Ton plus beau moment de poésie ?

Il y en a deux, très différents : la libération de Saïgon par le Vietcong, après la défaite américaine au Vietnam, et le soleil couchant sur Tagrera lorsque j’y suis arrivé, en 1983, après avoir marché 10 jours et parcouru 300 km dans le Tassili du Hoggar, Sahara algérien.

 Propos recueillis par Eric Allard le 26.11.03

(Certaines questions sont tirées du questionnaire de Sophie Calle et Grégoire Bouillier)